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Gilets Jaunes, retraites, mépris : ce quinquennat que Macron a peur de défendre

Emmanuel Macron présente ce jeudi 17 mars 2022 son programme. La guerre russe en Ukraine et ces 2 ans de pandémie ne doivent pas nous faire oublier le quinquennat qui se termine. Le quinquennat des Gilets Jaunes. Le quinquennat des retraites. Le quinquennat des deux plus longs mouvements sociaux depuis plus de 50 ans en France. Le quinquennat de l’explosion de la fortune des milliardaires « et en même temps » de la pauvreté de millions de Français. Le quinquennat de sorties fracassantes du président le plus méprisant de l’histoire de la 5ème République. Le quinquennat des lits d’hôpitaux fermés en pleine crise sanitaire. Le quinquennat d’une double condamnation pour inaction climatique par la justice. À toutes fins utiles, 5 minutes pour nous rafraichir collectivement la mémoire sur ce quinquennat qu’Emmanuel Macron refuse de défendre devant les autres candidats. Notre article.

3 ans après le début des Gilets Jaunes, le pouvoir d’achat est la priorité absolue des Français pour la présidentielle

17 novembre 2018. Le pays se drape de jaune fluo. On ne le sait pas encore, mais l’une des plus longues et des plus fortes insurrections populaires que la France ait connue dans son Histoire récente vient de démarrer. Le mouvement des Gilets Jaunes. Des gilets fluos vont fleurir aux quatre coins du globe (voir carte ci-dessous). À l’instar de l’augmentation du prix du ticket de métro à l’origine de la révolution citoyenne chilienne, de la taxe instaurée sur l’application d’appels gratuits WhatsApp à l’origine de la révolution citoyenne libanaise ou encore de l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi à l’origine de la révolution citoyenne tunisienne et par extension du printemps arabe, l’explosion du prix de l’essence est l’évènement fortuit qui déclenche le mouvement des Gilets Jaunes en France.

Carte Gilets Jaune dans le monde
Carte des peuples à avoir enfilé le Gilet Jaune en protestation au pouvoir en place

Très vite, dès les premiers actes, l’injustice sociale, le refus de continuer à être exploités pour un salaire de misère, les discussions autour du pouvoir d’achat et du partage des richesses envahissent les ronds-points, les cortèges, et noircissent une large partie des cahiers de doléances. Le 29 novembre 2018, les Gilets Jaunes édictent les « directives du peuple ». Des propositions de révolution sociale et démocratique qui coïncident à 95% avec un programme politique actuellement aux portes du second tour.

Trois ans après le début des Gilets Jaunes, le prix de l’essence et des produits de première nécessité explosent à nouveau. 38 millions de Français survivent avec 55 euros à partir du… 10 du mois. Et « en même temps », la fortune des 500 familles les plus riches du pays a doublé sous Emmanuel Macron, passant de 570 milliards en 2017 à 1 000 milliards en 2021. Autant dire que le partage des richesses est plus que jamais un sujet. Le pouvoir d’achat est même la priorité absolue des Français pour la présidentielle qui se tient dans 25 jours. Dans la dernière enquête Harris interactive publiée ce jeudi 16 mars 2022, avec 59% le pouvoir d’achat (+5% en une semaine) arrive largement en tête des préoccupations des Français.

La féroce répression policière des Gilets Jaunes : ces sombres pages du quinquennat que Macron voudrait vous faire oublier

Pourtant, ces revendications de justice sociale ont été accueillies de manière… glaciale par le pouvoir en place. Des citoyennes et des citoyens montant pour certains pour la première fois manifester à Paris ? Le bizutage a été féroce. 4 439 blessés, 40 yeux crevés, 5 mains arrachées, des traumatismes durables pour passer l’envie au peuple d’oser encore protester. Une sanglante répression policière condamnée par l’ONU et le Parlement européen.

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Jérome Rodrigues, Gilet Jaune qui perd un œil le 26 janvier 2019 place de la Bastille.

Des violences policières documentées par le journaliste David Dufresne et son documentaire Un Pays qui se tient sage, des revendications sociales et démocratiques des Gilets Jaunes documentées brillamment par le documentaire Un Peuple d’Emmanuel Gras (encore en salle). « Il faudra se rappeler que notre pays tout entier repose sur ces femmes et ces hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal » déclarait Emmanuel Macron en pleine crise du Covid-19. C’est de ces invisibles, essentielles, exploitées, oubliées, ces travailleurs et travailleuses payés une misère, tous ces citoyens pour qui la survie quotidienne relève de l’exploit face à l’explosion des prix, tous ces Gilets Jaunes, dont il faudra se rappeler dans 25 jours dans l’isoloir.

Les retraites, le plus long mouvement social depuis mai 68 stoppé par le Covid

Il s’agirait de ne pas oublier non plus qu’avant l’arrivée de ce satané Covid19 qui a comme suspendu nos vies depuis maintenant plus de 2 ans, de ces isolements qui ont laissé de profondes séquelles sur le moral des Français et notamment de notre jeunesse confinée des semaines entières dans des chambres de 9m2, il s’agirait de ne pas oublier qu’avant ces 2 ans d’enfer la France a vu se soulever le plus long mouvement social depuis mai 1968. Le mouvement des retraites : le 5 décembre 2019, ce sont plus d’1,5 millions de Françaises et de Français qui sont descendus dans les rues du pays.

Le 5 décembre 2019, plus d’1,5 millions de Français descendent dans la rue pour protester contre la réforme des retraites d’Emmanuel Macron

Le gouvernement s’est cyniquement servi du premier conseil de ministre dédié au Covid 19, à l’issue duquel la ministre de la santé d’Emmanuel Macron déclarera que le risque de contamination au Covid19 est « quasiment nul » avant de démissionner pour mener campagne pour devenir Maire de Paris, pour tenter de faire passer la réforme des retraites en force par 49.3 avant de suspendre toutes ses réformes prenant mesure de la gravité de la crise sanitaire.

N’ayant visiblement pas bien compris l’opposition du pays à sa réforme, Emmanuel Macron vient d’annoncer par la voix de son porte-parole son projet de reculer l’âge de départ à la retraite à 65 ans en cas de réélection. Des candidats en position de se qualifier au second tour, Jean-Luc Mélenchon défend seul contre tous la retraite à 60 ans. La retraite à 60 ou 65 ans, l’augmentation des salaires, le blocage des prix, la bifurcation écologique et la 6ème République pourraient d’ailleurs être des sujets auxquels Emmanuel Macron serait obligé de répondre en cas de qualification de Jean-Luc Mélenchon au second tour, loin des débats sur l’immigration et la sécurité en cas de nouveau second tour face à Marine Le Pen.

Emmanuel Macron, l’homme qui fermait des lits d’hôpitaux en pleine crise sanitaire

Gilets Jaunes, retraites, ce quinquennat restera également comme celui de la destruction méthodique de l’Hôpital public. 17 000 lits d’hôpitaux fermés durant ce quinquennat. 5 700 lits d’hôpitaux fermés en 2020, en pleine pandémie. 4 milliards d’euros d’économie réalisés sur l’Hôpital sur le mandat. Un hôpital à bout de souffle, achevé par le quinquennat Macron.

« Vos soupirs quand on vous parle du personnel soignant, c’est juste abject ». L’alerte avait pourtant été lancée dès le 29 juillet 2017 par Caroline Fiat, la première députée aide-soignante de l’Histoire. La députée insoumise surnommée « la députée bac-2 » par les députés macroniste a alerté durant tout le quinquennat sur la destruction de l’Hôpital public. En vain, la sanglante austérité s’est poursuivie non seulement à l’Hôpital, mais dans l’ensemble de nos services publics.

7 900 postes supprimés par Jean-Michel Blanquer dans le second degré (soit l’équivalent de 166 collèges), des enseignants, des soignants, des policiers et des magistrats qui se suicident, des pompiers matraqués et gazés par ce gouvernement, ce sont l’ensemble de nos services publics qui sont épuisés par l’austérité imposé par ce gouvernement. Dans 25 jours, il faudra se rappeler que notre pays tout entier repose sur ces femmes et ces hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal au moment de glisser son bulletin de vote dans l’isoloir.

Emmanuel Macron, le président le plus méprisant de l’Histoire de la 5ème République

Comme si son sanglant bilan économique ne suffisait pas, Emmanuel Macron sera passé maître dans l’art des sorties dégoulinant de mépris de classe. Les Français ? « Des Gaulois réfractaires au changement ». 29 août 2018. Une gare ? « Un lieu où l’on croise les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien ». 29 juin 2017. « Les fainéants ». 8 septembre 2017. «  Le meilleur moyen de se payer un costard, c’est de travailler  ». 27 mai 2016. « Les illettrés ». 17 décembre 2014. Les « 66 millions de procureurs ». 21 janvier 2021.

Ce mépris du peuple s’inscrit dans une idéologie réactionnaire assumée par le chef de l’État. Et de plus en plus décomplexée. Le candidat Macron déplorait dès 2016 l’« absence de la figure du roi », affirmant que le « peuple français n’a pas voulu sa mort ». Les républicains apprécieront. Le Président a franchi un pas supplémentaire dans une interview au journal l’Express. Le chef de l’État y réhabilite Philippe Pétain et Charles Maurras, et fustige : « l’écrasement des hiérarchies induit par la société du commentaire permanent : le sentiment que tout se vaut, que toutes les paroles sont égales. » Emmanuel Macron a décidément bien du mal avec l’égalité républicaine et la souveraineté populaires.

Emmanuel Macron refuse de défendre son bilan face aux autres candidats

Du mal avec la démocratie. Emmanuel Macron ne veut rendre de compte à personne. En témoigne l’exercice du pouvoir solitaire d’Emmanuel Macron, qui aura été un autre des marqueurs forts de ce quinquennat. Un piétinement assumé du Parlement, dénoncé y compris au sein des rangs de la majorité présidentielle. Un contournement des institutions démocratiques pour décider seul en Conseil de Défense depuis le début de la crise sanitaire, et n’avoir de compte à rendre à personne. Le président-candidat ne veut pas rendre de compte, en témoigne son refus de débattre avec les autres candidats.

Industrie, chômage, hôpitaux, école, écologie, agriculture, impôts, retraites, indépendance, nucléaire, recherche, inégalités, EHPAD, handicap, « vivre mieux », « vraie campagne »… Quand on se penche sur les 21 mensonges d’Emmanuel Macron dans sa lettre aux Français, on comprend mieux sa peur de débattre.

Face à l’urgence sociale, alors que 8 millions d’entre nous ont besoin de l’aide alimentaire pour se nourrir alors les milliardaires français ont engrangé 236 milliards supplémentaires en 19 mois de crise sanitaire, magot avec lequel on pourrait quadrupler le budget de l’hôpital public ou distribuer un chèque de 3 500 euros à chaque Française et Français, face à l’urgence écologique, alors que ce gouvernement a été condamné a deux reprises pour inaction climatique par la justice, face à l’urgence démocratique, alors que 66% des Français sont restés chez eux lors des dernières élections, nous n’avons plus 5 ans à perdre avec un nouveau quinquennat Macron.

Par Pierre Joigneaux.