Autoroute A69

Autoroute A69 – Perchés dans les arbres ou à terre, la résistance s’intensifie

Autoroute A69. La mobilisation des opposants à ce projet écocidaire ne faiblit pas, bien au contraire. Nous vous en parlions dès mars 2023 : un projet en forme de vieille lubie pour relier Toulouse à Castres, vieux de plus de 30 ans, très coûteux, inutile, créant un tronçon de route pour les riches du fait de droits de péage exorbitants, un projet destructeur de nature (découpage d’arbres multi-centenaires, artificialisation de plus de 310 hectares). Hier, un rassemblement contre l’autoroute A69 avait lieu devant le ministère de la Transition écologique, l’autre, en même temps, devant le Conseil régional d’Occitanie

8 personnes ont entamé une grève de la faim pour montrer leur refus catégorique de voir l’A69 Toulouse-Castres voir le jour. Pour l’instant, le gouvernement campe sur ses positions anti-sociales et anti-écologiques. Les opposants au projet ne sont pas écoutés. Ils sont matraqués, blessés, parfois jusqu’au coma, traqués et dénigrés par le camp présidentiel, ses troupes et ses alliés. Cette situation rappelle combien il ne fait pas bon vivre être militant révolutionnaire en France. Mépris, surveillance, répression, violences policières, Sainte-Soline… Jusqu’où ira la dérive autoritaire du pouvoir, contre les défenseurs du vivant ? Notre article.

Hier 20 septembre 2023, rassemblement contre l’autoroute A69 devant le ministère de la Transition écologique et le conseil régional d’Occitanie

La mobilisation des opposants à l’autoroute A69 ne faiblit pas, bien au contraire. Hier soir avaient lieu deux rassemblements contre ce projet, l’un à Paris devant le ministère de la Transition écologique, l’autre à Toulouse, devant le conseil régional. En effet, la présidente de la région Occitanie, Carole Delga, est une fervente défenseuse du projet. L’ambiance était chaleureuse et déterminée.

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Une délégation de députés insoumis au rassemblement à Paris devant le ministère de la Transition écologique
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Des opposants au projet d’autoroute A69 se retrouvant devant le conseil régional d’Occitanie

Thomas Brail, militant écologiste, en grève de la faim et perché dans un arbre face à un ministère

La détermination des opposants à l’Autoroute A69 est totale. La preuve : l’un d’entre eux, Thomas Brail, est en grève de la faim depuis 21 jours. Il est perché dans un arbre, en face du ministère de la Transition écologique à Paris. De nombreux élus sont déjà venus lui apporter leur soutien depuis début septembre. Le militant réclame l’arrêt des travaux et une réunion avec Clément Beaune, ministre des Transports et Carole Delga, présidente de la région Occitanie, tous deux favorables au projet. Avant-hier, le militant écologiste a été reçu par Clément Beaune. Bilan ? Le ministre campe sur ses positions et n’entend pas les arguments des opposants sur ce projet écocidaire.

À peine ressorti de cette entrevue, Thomas Brail est remonté sur son arbre, on ne peut plus résolu à continuer sa grève de la faim. Martine Sorba, co-présidente du Groupement National de surveillance des Arbres (GNSA), créé par Thomas Brail, témoigne auprès de Reporterre : «Thomas est déterminé. Il met en danger sa santé, son travail, mais il a ce combat chevillé au cœur : en sauvant les arbres, c’est la biodiversité et la vie que l’on sauve ». Selon Basta, « sept autres personnes sont entrées en grève de la faim pour demander un arrêt immédiat des abattages d’arbres et une suspension du chantier de l’A69, le temps que la justice rende sa délibération sur les recours ».

Leurs noms doivent être connus, leur implication dans ce combat saluée de la meilleure façon qui soit : Olga, 21 ans, boulangère activiste, 13ᵉ jour de grève, Marion Hermet, 41 ans, agricultrice, 9ᵉ jour de grève, Reva, 35 ans, chef d’entreprise, 9ᵉ jour de grève, Victoria, 29 ans, 8ᵉ jour de grève, Matthieu Monceaux, 46 ans, 8ᵉ jour de grève, Bernard Boussard, 68 ans, entrepreneur de l’économie sociale, retraité, 7ᵉ jour de grève, Çelik, 7ᵉ jour de grève (Contre-attaque)

Une telle ténacité a de quoi impressionner. Pourquoi certains militants en arrivent là ? Parce que c’est la seule façon pour eux de se faire entendre et que l’on parle de ce sujet. La dernière fois que le projet d’autoroute A69 a fait la une de l’actualité, c’était lors d’une grande manifestation en avril 2023 organisée par ses opposants. À l’époque, Gérald Darmanin craignait un nouveau Sainte-Soline. Mais loin des fantasmes du ministre de l’Intérieur, la manifestation était à la fois déterminée et joyeuse. Aujourd’hui, face à un gouvernement aux petits soins avec less puissants soutiens à ce bout de macadam, ses opposants n’ont d’autre choix que de souffrir dans leur propre chair pour se faire entendre.

Pour aller plus loin : A69 Toulouse-Castres : après une manifestation réussie, la lutte contre l’autoroute écocidaire continue

Autoroute A69 Toulouse-Castres : un projet inutile et écocidaire

Quelques rappels s’imposent. Le projet d’autoroute A69 est une vieille lubie, et surtout un projet inutile et écocide, combattu par plusieurs collectifs depuis des années. Il existe depuis bien avant le début des années 2000. Il est financé à hauteur de 220 millions d’euros par l’État et les collectivités territoriales, puis laissé sous la gestion privée de NGE/ATOSCA. En quoi consiste-t-il concrètement ? Quatre voies de circulation supplémentaires, en parallèle et à quelques centaines de mètres des deux voies existantes de la RN126, viendraient s’ajouter, pour écouler un trafic mesuré à moins de 7.000 véhicules jours alors que le minimum couramment admis pour justifier un tel ouvrage est de 20 à 25.000 véhicules par jour.

Toutes les autorités indépendantes, Autorité environnementale, Commissariat général à l’investissement, Conseil national de protection de la nature ont émis des avis très critiques, voire défavorables à ce projet sur le plan de la justification économique comme sur l’impact environnemental. À noter, un coût exorbitant du péage : 17 euros l’aller/retour pour 77 km, à comparer aux 3,40 € de l’A/R Albi Toulouse pour la même distance. Une autoroute pour les riches et une iniquité flagrante pour les habitants du sud du Tarn.

Comme le résument les opposants au projet, « c’est 10 à 25 minutes offertes au capitalisme qui accélère nos vies et nous veut toujours plus rapides, productifs, efficaces, connectés, mais qui détruit nos liens, entre humain·es, avec nos lieux de vie et toutes les espèces compagnes qui les peuplent ».

Pour aller plus loin : Scandale : 400 hectares de terres agricoles et de zones naturelles menacées par le projet d’autoroute Toulouse Castres

Les dégâts potentiels écologiques de ce projet sont considérables. Au total, plus de 310 hectares seraient artificialisés si le projet arrivait à son terme (Reporterre). Pour une autoroute inutile, des arbres multicentenaires sont abattus, des collines boisées sont mises en pièce par des bulldozers. La folie du capitalisme va plus loin que ce qu’on imagine. Fin août, plus de 200 personnne se sont rasssemblées à Vendine (31) pour s’opposer s’opposer pacifiquement à la reprise des coupes d’arbres centenaires prévues dès le lendemain. Face à eux… 200 gendarmes armés de gaz lacrymogènes, encadrant et protégeant 200 merveilles de la nature.

Dédain, insulte, répression : il ne fait pas bon vivre être militant révolutionnaire en France

Il ne fait pas bon vivre être militant révolutionnaire en France. Dernier exemple en date : le procès politique de neuf militants anti-bassines à Niort, le 8 septembre 2023, jugés pour avoir organisé des rassemblements contre les « méga-bassines » à Sainte-Soline en mars dernier. Neuf personnes, membres de la Confédération paysanne, de la CGT, de Solidaires et du collectif Bassine Non Merci et toutes membres des Soulèvements de la Terre.

L’État souhaite les réprimer comme s’il s’agissait de terroristes alors qu’ils ne font que défendre le vivant, ce bien commun si fragile. À Niort, les nombreuses personnes venues soutenir les militants font un pied de nez au camp présidentiel en scandant : « Nous sommes tous des éco-terre-eau-ristes ! », en référence aux propos de Gérald Darmanin destinés à criminaliser les actions des militants écologistes.

Pour aller plus loin : « Nous sommes tous des éco-terre-eau-ristes ! » : à Niort, le procès politique des anti-bassines

Vous vous rappelez de la manifestation de Sainte-soline contre les méga-bassinnes ? Quelques rappels de ce qu’il s’y est passé : usage d’armes de guerre, 5015 grenades tirées, tirs de LBDs depuis des quads, des secours empêchés d’arriver ou largement retardés, 50 blessés parmi les manifestants et les forces de l’ordre, des dizaines de mutilés et un manifestant, Serge, inconscient pendant trois mois après avoir été gravement blessé à la tête… Bref, l’illustration ultime du maintien de l’ordre à la sauce du camp présidentiel, particulièrement répressif contre les militants écologistes.

Surveillance accrue, garde-à-vue prolongées et humiliantes une fois interpellés, refus d’accéder à des droits judiciaires élémentaires, violences policières d’une rare violence en manifestation : la répression des militants écologistes s’est largement renforcée ces derniers mois.« L’actuel durcissement législatif montre que les écologistes tendent à être considérés comme des terroristes », peut-on lire dans Socialter. Un durcissement surtout défendu par le pouvoir en place. Même les services de renseignements sont partisans de positions moins sécuritaires : « Ils savent que les écolos sont pacifistes et s’agacent des accès de panique des politiques. »

Une telle situation ne peut plus durer. Depuis trop longtemps, le camp présidentiel est sur une pente autoritaire. Face à cela, une réponse est possible : l’union populaire. Un très large collectif de plus de 100 organisations s’est constitué pour appeler à manifester partout en France, le 23 septembre. Parmi elles, EELV, le NPA, la CGT, la FSU, Solidaires, ATTAC, de nombreux collectifs Justice et Vérité dont le collectif Justice pour Adama. L’objectif ? Marcher contre les violences policières et pour toutes les justices. Plus de 50 rassemblements sont déjà prévues partout dans le pays. À la fête de l’Humanité, Jean-Luc Mélenchon : « abattez la citadelle ! ». Le 23 septembre peut contribuer à mettre plus bas que terre cette société dont nous ne voulons plus.

Par Nadim Février

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