36% des étudiants ont déjà renoncé à une aide médicale, la moitié d’entre eux a déjà sauté un repas, 43% des étudiantes ont déjà renoncé ou reporté une consultation gynécologique. Tels sont les chiffres glaçants issus de l’enquête 2023 menée par l’IFOP et l’association Cop1, qui organise des distributions alimentaires partout en France pour lutter contre la précarité étudiante.
Alors qu’entre 2002 et 2018, le taux de pauvreté des 18-29 ans a bondi de plus de 50%, que la crise sanitaire a vu le nombre d’étudiants recourant à l’aide alimentaire exploser, que les témoignages de détresse se sont multipliés, voilà plus d’un an que l’inflation frappe de plein fouet les étudiants français, dont le pouvoir d’achat est souvent très limité.
En connaissance de cause et en usant des arguments les plus fallacieux, le camp présidentiel a pourtant tout fait pour s’opposer aux propositions visant à les protéger de la précarité. Repas à 1 euro pour tous les étudiants ? C’est non. Garantie d’autonomie au niveau du seuil de pauvreté ? Non plus.
Les étudiants et les jeunes en lycée professionnel sont l’avenir du pays. Emmanuel Macron veut en faire de la chair à patron et les laisse plonger dans la précarité. Notre article.
Plus d’1 sur 3 a déjà renoncé à se soigner : les chiffres chocs sur la précarité étudiante
« Comme manger dehors, c’est trop cher, en général, je ne mange pas le midi, et le soir, je suis souvent trop fatiguée pour me faire à manger comme je rentre tard vers 23H. Donc, je saute beaucoup de repas ». Ces mots sont ceux de Layla, 20 ans, étudiante en deuxième année de médecine, pour le compte de l’enquête IFOP/Cop1.
Ils auraient aussi pu être ceux de près de la moitié des étudiants français, qui ont déjà supprimé un repas à cause de l’inflation (46%), ou des 49% qui ont déjà dû limiter ou renoncer à l’achat de denrées alimentaires. Des chiffres qui grimpent tous deux à 67% pour les bénéficiaires de l’association Cop1.
Mais les privations des étudiants français ne se limitent pas à leurs dépenses alimentaires. Pris à la gorge par l’inflation ou des charges professionnelles trop lourdes, ils sont des milliers à devoir mettre en danger leur santé pour pouvoir boucler leur fin de mois. Ainsi, 43% des étudiantes ont déjà renoncé ou reporté une visite ou un soin gynécologique, et 60% des étudiants bénéficiaires de l’association Cop1 ont déjà renoncé à une aide médicale ou psychologique par manque d’argent.
Pour les mêmes raisons, ils sont aussi 52% à devoir limiter ou renoncer à leurs achats de loisirs, de sorties ou d’habillement. Rien d’étonnant donc à ce que près d’un étudiant sur deux (45%) indique se sentir souvent ou toujours seul, et à ce que 62% soient inquiets pour leur avenir.
De manière générale, l’enquête IFOP/Cop1 indique que 50% des étudiants ont un reste à vivre après déduction des charges et du loyer inférieur à 100 euros, dont la moitié ne dispose que de moins de 50 euros. Il arrive par ailleurs à 39% des étudiants d’être à découvert, une proportion qui monte à 55% pour les bénéficiaires de l’association COP1.
Qu’autant de jeunes vivent et a fortiori étudient dans une telle précarité est indigne de la 7ème puissance économique mondiale. Pourtant, le gouvernement semble très peu intéressé de ces privations, des dépressions, trop souvent des suicides des étudiantes et étudiants français.
Quand le camp présidentiel fait rejeter à une voix près le repas à 1 euro pour tous les étudiants
9 février 2023. La minorité présidentielle, aidée par Les Républicains, fait rejeter à une voix près la proposition de loi socialiste visant à instaurer le repas à 1 euro pour tous les étudiants. Cette mesure, qui aurait permis de soulager le quotidien de milliers d’étudiants précaires non-boursiers, a été rejetée sur l’autel d’arguments grotesques masquant mal l’indifférence du camp présidentiel à l’égard de la précarité étudiante.
Pour aller plus loin : Scandale : à une voix près, le repas à 1 euro pour tous les étudiants rejeté par la macronie
En chœur, les macronistes justifiaient leur opposition à la mesure par le fait qu’elle aurait permis aux enfants de Bernard Arnault de manger eux-aussi pour 1 euro au restaurant universitaire. Sérieusement ? Qui pour y croire ?
Tout le monde l’aura compris : le rejet de cette proposition était un choix politique. Celui de ne pas investir 90 millions d’euros (chiffres avancés par le gouvernement lui-même) pour soulager un peu les difficultés financières de tous les étudiants précaires du pays, alors qu’ « en même temps » le camp présidentiel ne cesse, depuis 6 ans, de faire des cadeaux aux plus riches.
Le gouvernement veut en faire de la chair à patrons, LFI propose une garantie d’autonomie de 1102 euros pour les jeunes en formation
« Vous n’avez qu’à travailler pour payer vos études ! » Voilà le genre de solutions proposées par le camp présidentiel à une jeunesse qui souffre. Savent-ils au moins que près d’un jeune sur deux travaille déjà en parallèle de ses études, et que comme le soulève l’enquête IFOP/Cop1, il arrive à 45% d’entre eux de sauter malgré tout un repas ?
« Nous aussi on est passé par là ! » s’exclament-ils encore. Et alors ? Ne voulez-vous pas que les choses changent ? Que les étudiants français, en plus de leur vingtaine d’heures de cours hebdomadaires, de leurs dizaines d’heures de révisions, de leurs charges personnelles, n’aient plus à être exploités par des patrons qui ne les voient la plupart du temps que comme une main d’œuvre malléable ?
Pour le Président de la République et son camp, une bonne jeunesse est une jeunesse qui travaille plutôt qu’une jeunesse qui apprend. C’est d’ailleurs le sens du projet de réforme du lycée professionnel annoncé par Emmanuel Macron, ou de la sélection chaque année plus dure à l’entrée ou au sein de l’enseignement supérieur, en particulier pour les jeunes issus des classes populaires.
Alors, pour lutter contre la précarisation de la jeunesse, contre sa considération comme une simple chair à patrons, La France insoumise propose la création d’une garantie d’autonomie pour les jeunes étudiants et lycéens professionnels détachés du foyer fiscal de leurs parents, fixée au-dessus du seuil de pauvreté, soit 1102 euros.
Une telle mesure vise à assurer aux jeunes Français la possibilité réelle de l’émancipation par la formation, par l’instruction, la possibilité d’un épanouissement. Car comment croire, sinon en ne servant que les intérêts des grandes entreprises, qu’étudier sous le seuil de pauvreté, tout en devant travailler pour survivre, offre un environnement propice aux étudiants pour se créer les conditions d’une vie meilleure, d’une vie qu’ils aient choisir ?
La précarité étudiante n’est pas une fatalité, c’est un choix politique
Enfermé dans son idéologie, le gouvernement s’est bien sûr opposé à cette allocation d’autonomie. Il fait le choix politique de rejeter les possibilités d’émancipation réelle de la jeunesse, de laisser sous le seuil de pauvreté 26% des jeunes de 18-24 ans (selon l’étude DREES/INSEE 2023 sur la base de la situation en 2014, alors que le seuil de pauvreté a aujourd’hui augmenté).
Le système de bourse français est obsolète. Il laisse plus de 70% des étudiants de côté alors qu’au Danemark, par exemple, plus de 90% des étudiants bénéficient d’une bourse. Aujourd’hui et en dépit de l’inflation, les étudiants français boursiers touchent entre 145€ et 633€ par mois, et seulement pendant 10 mois de l’année. En d’autres termes, le montant maximum que peut percevoir un étudiant boursier reste toujours près de deux fois inférieur au seuil de pauvreté.
L’action d’associations comme Cop1, qui organise non seulement des distributions de produits de première nécessité, mais procure des aides administratives aux étudiants partout en France, se révèle aujourd’hui salvatrice pour des milliers de jeunes. Malheureusement, leur admirable dévouement ne peut suffire. La précarité étudiante est un choix politique.
Mais il pourrait en être autrement. Le choix d’une refonte totale du système de bourse peut être fait. L’instauration du repas à 1€ pour tous et d’une garantie d’autonomie jeunes est possible. Le choix politique de faire contribuer les ultra-riches de ce pays, les actionnaires qui se gavent, les 3 millions de millionnaires français au profit d’une jeunesse qui se sert la ceinture peut être fait.
La précarité étudiante n’est pas une fatalité. C’est un choix politique.
Par Eliot