« Ce n’est pas vrai que la loi immigration contienne des dispositions du RN » avait déclaré dans un déni complet le chef de l’Etat sur C à Vous le 20 décembre dernier. Son adoption a été salué comme « victoire idéologique » par le RN. Et pour cause, les grandes mesures défendues par le parti d’extrême droite depuis 50 ans y figurent : retrait des allocations familiales et APL aux étrangers en situation régulière, fin de l’automaticité du droit du sol, déchéance de nationalité, remise en cause de l’aide médicale d’Etat etc..
En ce jour d’allocution présidentielle, la question se pose. Le Président de la République va t-il de nouveau mentir en direct à la télévision ? Après six années de vœux, osera t-il encore appeler à « l’unité » et la « bienveillance », formules plates des précédents vœux, malgré l’adoption de l’abjecte loi immigration et tout ce qu’elle signifie ? L’Insoumission revient dans ses colonnes sur les 10 mensonges en direct lors de la dernière intervention médiatique du chef de l’Etat, le 20 décembre dernier. Notre article.
« Ce n’est pas vrai » que le texte [de loi immigration] comporte « des dispositions qui sont de nature Rassemblement national » : –> FAUX
« Ce n’est pas vrai » que le texte [de loi immigration] comporte « des dispositions qui sont de nature Rassemblement national », affirme Emmanuel Macron. Vraiment ? Que le Rassemblement National qualifie le vote de la loi Immigration de « victoire idéologique » ne le fait-il donc pas réfléchir un minimum ? Le leader insoumis lui a rappelé sèchement et précisément ligne par ligne les mesures du programme du RN reprises au cœur de cette loi.
La déchéance de nationalité pour les binationaux auteurs d’homicides sur les personnes dépositaires de l’autorité publique est dans le programme présidentiel du RN. De même que l’automaticité du droit du sol (il faudra manifester sa volonté d’acquérir la nationalité française entre 16 et 18 ans), l’allongement de la durée avant de pouvoir bénéficier du regroupement familial (2 ans au lieu de 18 mois / revenu stable et régulier), la préférence nationale pour les allocations familles et APL, la remise en cause de l’AME (prévue au cours d’un prochain projet de loi en 2024, ndlr)… Du Jean-Marie Le Pen comme socle et matrice du texte.
Pendant l’interview sur le plateau de C à vous, Emmanuel Macron se cache derrière le processus législatif de l’Assemblée nationale et le nécessaire durcissement de la loi vers la droite extrême pour qu’elle soit votée. Sauf qu’il savait très bien qu’on en serait là aujourd’hui. Malgré un rejet de son texte il y a 10 jours par l’Assemblée nationale, il a fait le choix de ne pas le retirer.
« Je revendique de porter le projet le plus opposé de ce que fait le RN » : –> FAUX
Depuis 2017, Emmanuel Macron s’est lepénisé et a fait la courte échelle au Rassemblement National. D’où, notamment, l’arrivée de 89 (aujourd’hui 88) députés d’extrême droite à l’Assemblée nationale. Au moment de sa première élection, il se présentait comme « le président des patriotes face à la menace des nationalistes ». Le 24 avril 2022, Emmanuel Macron déclarait : « À celles et ceux qui ont voté pour moi, non pour soutenir mes idées, mais pour faire barrage à celles de l’extrême droite, votre vote m’oblige ». Le 19 décembre 2023, 75% de ses députés votaient une loi saluée comme « victoire idéologique » par le RN.
L’hommage au Maréchal Pétain, traître à la patrie, qualifié de « grand soldat » ; Marine Le Penn qualifié de « trop molle » par Gérald Darmanin, sans qu’Emmanuel Macron n’ait quelque chose à redire ; la chasse à l’« islamo-gauchisme » qui gangrènerait les universités ; la réhabilitation de Charles Maurras, leader de l’Action française et figure historique de l’extrême droite, pour parler du régalien… Autant de moments, de paroles qui ont participé à la lepénisation d’Emmanuel Macron.
Aujourd’hui, la préférence nationale est intégrée dans une loi sur l’immgration. Les principes de la République sont sapées par ce texte, mais le chef de l’État ne s’en émeut pas et nie en bloc. Ce n’est pas en reprenant les mots et les propositions de ceux qu’on prétend combattre qu’ils seront vaincus. Comment pourront-ils refaire le coup du barrage face à un candidat d’extrême droite au second tour après avoir repris le vocable, les obsessions racistes et les mesures des fascistes ?
« Il y a un problème d’immigration en France » –> FAUX
« Il y a un problème d’immigration en France » , a déclaré le président de la République sur C à vous. C’est faux, il y a une crise de l’accueil. De quoi parle-t-il alors ? Depuis l’an 2000, la population immigrée en France a augmenté de 36%, c’est-à-dire bien en dessous du reste de l’Europe de l’Ouest comme l’Autriche (+75%).
Entre 2005 et 2022, les titres de séjour délivrés chaque année sont passés de 193 000 à 311 000. Dans le détail, 51% correspond à de la migration estudiantine, seulement 4% correspond à de la migration familiale. (François Héran, via l’Obs). La France a accueilli, ce fût bien normal, 100 000 Ukrainiens. Cela n’a pas soulevé de débats. Pourquoi cela en poserait-il autant maintenant ?
Les populations ne devraient pas à avoir à partir de chez elles. C’est toujours une souffrance, pour qui que ce soit devant quitter son chez-soi, à cause des guerres, de la famine, de la pauvreté ou du climat. Quoi qu’il en soit, une dynamique migratoire globale est en cours sur notre planète. Emmanuel Macron a-t-il parlé de ce qui déclenchaient des migrations forcées de populations, comme les accords de libre-échange, véritables des catalyseurs de désastres économiques qui poussent à des migrations forcées de populations ? Sûrement pas. Son logiciel néolibéral fait de lui un de leurs plus ardents défenseurs.
Pour aller plus loin : Les causes de l’immigration – Quand le libre-échange sème la misère
« Est-ce que vous en avez entendu un dire : Je quitte la majorité, je suis en rupture ? » –> FAUX
Interrogé sur la fronde au sein de son camp au sujet de la loi immigration, Emmanuel Macron n’a pas bronché : « Est-ce que vous en avez entendu un dire : Je quitte la majorité, je suis en rupture ? ». La contradiction est flagrante, puisqu’à quelques minutes d’intervalle, il expliquait qu’il « respectait » la démission d’Aurélien Rousseau, son ex-ministre de la Santé désormais, scandalisé par le vote d’une telle loi. Circulez, il n’y a rien à voir, balaie le chef de l’État.
Comment peut-il dire que personne n’est en rupture avec son camp, quand 25% des députés macronistes ont voté contre la loi Immigration ? Comment le chef de l’État peut-il être si sûr de lui, lorsque les ministres Patrick Vergriete (Logement), Sylvie Retailleau (Enseignement supérieur) et Clément Beaune (Transports) ont mis leur démission dans la balance si le projet de loi immigration était voté à l’Assemblée nationale ?
« Les prix ne reviendront pas au niveau d’avant » : –> VRAI, à qui la faute ?
Interrogé sur l’inflation, le président de la République a expliqué que « les prix ne reviendront pas au niveau d’avant », même si « les prix vont arrêter de monter ». Dans son raisonnement néolibéral, la phrase suivante pourrait être : « Voilà, c’est comme ça, c’est le capitalisme, chacun se débrouille ».
Les prix des produits alimentaires ont augmenté de plus de 20% en 2 ans. En 1 an, les marges des industriels sur les carburants ont été multipliés par 5, sachant que 51% de l’inflation alimentaire est causée par les super profits. Le camp présidentiel a-t-il augmenté le SMIC ou bloquer les prix, comme le proposent les insoumis depuis de nombreux mois ? En aucune façon. Emmanuel Macron a protégé les super-profits de l’agro-industrie et de la grande distribution qui se sont gavées sur le dos des Français.
Pire, les députés macronistes ont multiplié les magouilles pour empêcher le vote de la loi défendue par Manuel Bompard sur le blocage des marges à l’Assemblée nationale le 30 novembre dernier. Après l’adoption victorieuse des articles de la loi, les macronistes et les LR se sont agités pour faire annuler les votes de l’Assemblée.
Résultat, la situation s’empire dans le pays. 35% des Français ne mangent pas trois repas jours. « Ça craque de partout », a estimé auprès de l’AFP Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), qui regroupe quelque 800 associations de lutte contre la précarité. De son côté, le Secours populaire alerte sur « une situation extrêmement préoccupante de par l’intensité de la pauvreté et de l’ampleur de la population touchée ».
COP 28 : « On continue d’accélérer, on y est ! » –> FAUX
« On continue d’accélérer, on y est ! », s’est réjoui Emmanuel Macron au sujet de la COP 28. Les ambitions de la COP 28 sont à la hauteur de ses faibles objectifs climatiques pour le pays. En ressort un appel à une « transition hors des énergies fossiles ». Même si l’accord a été présenté comme « historique », c’est dans les petites lignes que se cache le diable. Rien n’est exigé, rien n’est obligatoire : les Etats sont « appelés à contribuer » à la « transition hors des énergies fossiles ». Le niveau d’exigence est très faible, voire inexistant.
Surtout, cet « appel à contribuer » « peut être réinterprété à l’aune des « circonstances nationales », ce qui en limite la portée : il n’y a ici ni plan d’action global, ni agenda, ni objectifs précis assignés aux Etats », explique l’économiste Maxime Combes. Conclusion : la diplomatie climatique des COP 28 est inefficace pour affronter la crise climatique qui nous fonce dessus. COP après COP, il faut que tout change pour que rien ne change.
Pour aller plus loin : COP 28 : À Dubaï, les lobbyistes pétroliers mènent la danse
« Ca, c’est une des victoires de cette COP qui au niveau international a reconnu l’importance du nucléaire pour mener cette stratégie », a par ailleurs insisté Emmanuel Macron. Devenu un véritable chantre du nucléaire, le chef de l’État souligne ainsi la reconnaissance de l’importance de cette énergie pour mieux sortir des énergies fossiles.
Sauf que le nucléaire n’est pas une énergie désirable pour notre futur en raison de ses coûts faramineux, de ses déchets qui ne peuvent toujours pas être traités, de ses dangers, de l’intermittence de cette énergie à cause du réchauffement ou des baisses de niveau des cours d’eau alimentant les circuits de refroidissements mais aussi en raison du pillage des ressources au fondement de cette énergie (uranium du Niger et du Kazakhstan)
Pour aller plus loin : Nucléaire : quand Macron met en danger la France
Fête d’Hanouka à l’Elysée : « Je pense que ce n’est pas une infraction aux règles de la laïcité » –> FAUX
Le 7 décembre 2023, le grand rabbin de France, Haïm Korsia, a allumé la première bougie de Hanouka en présence d’Emmanuel Macron. S’est ensuivi un tollé dans la classe politique. Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise a fustigé une « faute politique impardonnable ». En effet, organiser une cérémonie religieuse publique à l’Élysée, de quelque religion que ce soit, est une violation évidente de la loi de 1905, notamment de son article 2 : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »
« Je pense que ce n’est pas une infraction aux règles de la laïcité », s’est défendu le Président de la République sur le plateau de « C à vous ». Pourtant, même le président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) a pointé une « erreur ». « Ce n’est pas la place au sein de l’Elysée d’allumer une bougie de Hanouka parce que l’ADN républicain c’est de se tenir loin de tout ce qui est religieux », avait-t-il déclaré sur Sud Radio dès le lendemain.
Palestine : « La boussole [de la France] est constante », la position du chef de l’État « respecterait l’histoire diplomatique de la France » –> FAUX
« Quelle est votre boussole dans ce conflit ? », interroge le journaliste Patrick Cohen. Si la question est posée, c’est bien parce qu’elle n’est pas claire. « La boussole [de la France] est constante », répond le chef de l’État. Mensonge en direct. Nous avons eu plusieurs fois l’occasion d’y revenir dans nos colonnes. Emmanuel Macron a mis 32 jours après le 7 octobre pour appeler à un cessez-le-feu en Palestine, quand Jean-Luc Mélenchon et les insoumis, eux, y ont appelé dès le premier jour, montrant les premiers le chemin de la paix par le respect du droit international.
Au Conseil de Sécurité, la France a d’abord refusé de voter en faveur d’un cessez-le-feu. Quand les experts de l’ONU ont parlé d’un « grave risque de génocide », les autorités françaises sont d’abord restées silencieuses. Dans un entretien accordé à la BBC le 9 novembre, Emmanuel Macron a « exhorté Israël à cesser » les bombardements sur les civils de Gaza. Face au tollé qu’a suscité sa déclaration chez les dirigeants israéliens, l’Élysée a souligné une nouvelle fois « le droit d’Israël à se défendre » (FranceInfo). Volte-faces sur volte-faces.
La position défendue sur la guerre au Proche-Orient respecterait « l’histoire diplomatique de la France », selon les mots du chef de l’État. A-t-il oublié la fronde de diplomates français ? La position de la France « est en rupture avec notre position traditionnellement équilibrée entre Israéliens et Palestiniens », dénonçaient-ils dans une lettre envoyée au ministère des Affaires étrangères. Ces diplomates s’inquiétaient d’ « une perte de crédibilité et d’influence de la France, et constate la mauvaise image de notre pays dans le monde arabe ».
Pour aller plus loin : À Gaza, « l’enfer sur terre » continue après le veto des États-Unis à un cessez-le-feu
« On ne peut pas laisser s’installer l’idée que lutter efficacement contre le terrorisme serait de tout raser à Gaza », a osé déclarer hier Emmanuel Macron. À Gaza, c’est « l’enfer sur terre », selon le commissaire général de l’agence de l’ONU pour les réfugiés de Palestine (UNRWA). Un nettoyage ethnique s’y déroule en toute imputé et jour après jour. Le Premier ministre d’extrême droite israélien s’est récemment dit « fier » d’avoir « empêché » la création d’un État Palestinien. Une condamnation ferme des crimes de guerre israéliens, responsables de la mort de plus 20 000 Palestiniens, n’a pas été clairement formulée par Emmanuel Macron.
« Je suis inattaquable dans la lutte contre les violences faites aux femmes et pour l’égalité femmes-hommes » –> FAUX
Voilà le retour de « la grande cause du quinquennat », tant vantée par le chef de l’État depuis 2017. « Je suis inattaquable dans la lutte contre les violences faites aux femmes et pour l’égalité femmes-hommes », assène Emmanuel Macron, droit dans ses bottes. Vraiment ?
0,25% du budget de l’État en 2022, voilà la part des finances publiques dédiée à l’égalité femmes-hommes. Les moyens alloués à la lutte contre les violences faites aux femmes sont très en deçà du milliard d’euros réclamé par les associations spécialisées. Macron n’y consacre que 184 millions € par an alors que 3 milliards € sont nécessaires. Une loi sur l’égalité salariale a-t-elle été mise en place ? Non. 1 femme est tuée par son conjoint ou ex-conjoint tous les 3 jours en moyenne sous le quinquennat d’Emmanuel Macron. La France « est 26ème sur 30 au classement des pays donateurs de l’aide vers les droits des femmes », rappelle Oxfam.
Gérard Depardieu, mis en examen pour viols et agressions sexuelles : une « fierté pour la France », selon Macron
« Moi, je suis un grand admirateur de Gérard Depardieu, […] il rend fier la France », assène le chef de l’État, interrogé sur les propos sexistes tenus par l’acteur, mis en examen pour viols et agressions sexuelles depuis décembre 2020. Ces propos sont choquants de la bouche du Président de la République. 14 femmes accusent Gérard Depardieu de violences sexistes et sexuelles. Le « Complément d’enquête » diffusé le 7 décembre dernier sur Gérard Depardieu a révélé de nombreux propos obscènes tenus par l’acteur lors d’un voyage en Corée du Nord.
Faut-il retirer la Légion d’honneur à l’acteur, lui demandent alors les journalistes de C à vous. « Ce n’est pas sur la base d’un reportage qu’on enlève une légion d’honneur », balaie Emmanuel Macron. « Est-ce que je vais commencer à retirer la Légion d’honneur à des artistes ou des responsables quand ils disent des choses qui me choquent ? La réponse est non, parce que ce n’est pas un ordre moral et je n’ai pas envie que ça le soit. »
Le chef de l’État, qui est par sa fonction grand maître de la Légion d’honneur, semble ignorer ici l’un des trois critères d’attribution de la distinction (voir ci-dessous). Il pourrait tout à fait retirer la Légion d’honneur à Gérard Depardieu, mais il ne le fait pas, se cachant derrière son admiration de l’acteur et tenant des propos choquants.
Par le comité de rédaction