inflation
« Achats, Entreprise, Commerce de détail », Alexas_Fotos, Pixabay

Inflation : même le PDG de Carrefour alerte sur « un phénomène massif de privation » !

Inflation. « C’est un tsunami de déconsommation. Quand l’essentiel n’est plus accessible, il faut agir vite […] On est en présence d’un phénomène massif de privation ». Un rappel salutaire, réalisé de façon inattendue par… Alexandre Bompard, le PDG de Carrefour dont l’Insoumission.fr vous a déjà parlé il y a quelques mois. Chose rare, un PDG parle de l’inflation et il a raison. Les chiffres sont accablants : hausse de 21% sur les produits alimentaires, 11% sur les fournitures scolaires, conjugués avec l’augmentation de 10% des tarifs de l’électricité au 1er août, le prix des carburants, les loyers…

De l’autre côté de la barricade, le camp présidentiel parle d’abaya pour tenter de masquer le résultat de sa politique : une inflation des prix mais aussi… des super-profits et des dividendes qui atteignent de nouveaux records (comme le nombre de millionnaires). Et « en même temps », les capitalistes de l’agroalimentaire engrangent toujours plus de marges et se gavent au détriment de tous. À quand la fin de la récréation pour les profiteurs ? À quand le blocage des prix ? À quand la gratuité des fournitures scolaires ? À quand la taxation des superprofits et le SMIC à 1600 euros net ? Il n’y a pas 36 solutions face à l’inflation. Soit les salaires augmentent, soit la consommation baisse et le chaos continue. Notre article.

« On est en présence d’un phénomène massif de privation » : la crise alimentaire prend les gens à la gorge

Interrogé au micro de France info, mardi 29 août, Alexandre Bompard a décrit la réalité quotidienne des Français, la « privation » sur des produits « essentiels » avec des baisses de vente « à deux chiffres ». Comprendre : les rayons se vident moins vite car les gens sont affamés et que leurs salaires stagnent ou baissent. Nul doute que le PDG est plus inquiet pour sa faim de profits que les fins de mois des Français, mais qu’importe, son propos décrit une réalité qu’ignorent délibérément les macronistes.

Et lui, l’homme dont le salaire équivaut à 300 années de salaires chez Carrefour, ne peut pas être accusé de travailler dans une officine bolchévique. Sur la même chaine, un « spécialiste de la consommation », Olivier Dauvers, emboite le pas : « On n’a jamais connu un tel niveau de déconsommation depuis 33 ans et sur aussi longtemps. ».

Même le magazine Capital – dont le nom suffit à le dédouaner de toute accusation de propagande révolutionnaire – a aussi vu rouge. Dans un article publié il y a déjà quelques mois, son chroniqueur préfère parler d’« enflation », qui signifie « que les entreprises ne se sont pas “contentées” de seulement répercuter les hausses de prix aux consommateurs, mais en ont profité pour se rajouter, au passage, de solides profits »

Au total, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Depuis aout 2021, les prix des produits alimentaires ont bondi de 21,3%. Tous les produits sont concernés et de trop nombreuses familles sont prises à la gorge et abordent cette rentrée la boule au ventre. D’après un sondage Elabe, 55% des Français renoncent à acheter certains produits. Résultat : le recours à l’aide alimentaire explose. Il a triplé en dix ans avec une hausse significative ces deux dernières années.

À l’approche de la rentrée, chaque famille passe aussi à la loupe tout achat d’accessoire de rentrée et de fournitures scolaires. Et pour cause, leurs prix ont augmenté de 11% entre aout 2022 et aout 2023 d’après une étude de l’association de consommateurs UFC-Que-Choisir. Cette réalité, les dirigeants insoumis Manuel Bompard et Mathilde Panot l’ont bien rappelé aux journées d’été de la France insoumise lors du meeting de clôture de l’Union populaire. À l’inverse, Macron n’en a pas un dit un mot dans sa dernière interview-fleuve au Point. Chacun soit son camp, celui d’un autre monde ou celui de l’ancien fondé sur le capital. 

« Maintenant, on regarde les prix des légumes et des fruits avant d’en prendre » 

Cet été, les caravanes populaires de La France insoumise ont sillonné le pays. Les militants insoumis mobilisés ont pu le confirmer encore une fois : l’inflation continue ses ravages. Partout, les mêmes témoignages reviennent sans cesse : il y a alerte sociale. Les macronistes qui fanfaronnent tous les quatre matins en disant que « les prix baissent » ou que le « pic de l’inflation » est atteint feraient bien de vite se reconnecter au réel et d’aller faire un tour.

Le 16 aout, à Saint-Gaudens en Haute-Garonne, Maria, 37 ans, caissière, témoigne : « La vie est de plus en plus dure. On a commencé par supprimer les loisirs et les vacances. Puis on a retiré les confiseries et les gâteaux du caddie. Puis on a acheté de moins en moins de viande. Maintenant on regarde les prix des légumes et des fruits avant d’en prendre… Si ça continue comme ça, je ne sais pas ce qu’on va finir par pouvoir manger… Dans le supermarché où je travaille, tous les caddies sont de moins en moins remplis, c’est la même galère pour beaucoup de familles. Tous les jours, il y a des gens qui reposent des produits en caisse, c’est inquiétant ».

À une autre porte, un jeune homme demande à un militant insoumis « Vous pouvez emmener ma mère au supermarché ? » et précise « Là, on a plus de couches pour le bébé et on ne sait pas comment faire. » L’insoumis accepte sans hésiter. La conclusion est sans appel : l’inflation est LE sujet qui revient dans toutes les bouches. Pas l’abaya. Pas le burkini. Pas le voile.

Macron face à l’inflation : cinquante nuances d’inaction

Qui connait (ou se souvient) du « trimestre anti-inflation » ou du « panier inflation » ? Ces mesures annoncées en fanfare l’an dernier étaient censées limiter certaines hausses de prix et soulager le portefeuille. Alors, quelle a été leur efficacité ? L’échec. D’après une étude de l’association UFC-Que-Choisir, les prix des produits étiquetés « trimestre anti-inflation » ont « augmenté » entre le 23 mars et le 10 mai 2023.

Voilà le résultat de la politique de caresse de la macronie à l’égard des capitalistes de l’industrie agroalimentaire : de la poudre aux yeux. Dans le même temps, Bruno Le Maire et Elisabeth Borne ne cessent d’annoncer un « pic de l’inflation atteint », mais qui ne vient toujours pas. Le Ministre de l’Économie parle des « baisses de prix » quand dans le même temps, des patrons de supermarchés indiquent que ce n’est pas près d’arriver avant mars 2024. Bref, la cacophonie est totale et la désorganisation générale.

Hier, le Ministre de l’Économie sortait son nouveau coup de communication. Il réunissait les distributeurs de l’agro-alimentaires pour leur « demander » de « prolonger leurs opérations de baisse de prix ». Voilà le retour de « Bruno demande ». La méthode macronienne est toujours la même : demander des « efforts », lancer des « appels », pousser pour des « engagements ». Quel résultat ? Rien n’est fait sur le front de l’inflation. Les petites « décélérations » de prix, disent-ils, sont insignifiantes. Rien n’est fait pour s’attaquer aux racines du mal : les parasites du secteur agro-alimentaire qui prospèrent et refusent de céder une once de terrain. Il faudra les y contraindre.

Inflation de dividendes : à quand la fin de la récréation pour les profiteurs ?

Les uns se serrent la ceinture, les autres se gavent. L’inflation des dividendes en France est un sport olympique. Entre avril et juin 2023, les dividendes ont augmenté de 13,3%. Ils ont bondi de 46 milliards d’euros en trois mois. Ils représentent 30% de l’ensemble des dividendes versés à l’échelle du continent européen. Alors la question se pose légitimement : pourquoi ne pas les taxer ainsi que les superprofits du secteur de l’alimentation ? On le sait, les économistes le disent, qu’ils soient libéraux ou non : la hausse des tarifs alimente les profits.

Pour être plus précis, d’après les calculs de l’économiste Sylvain Billot, environ 40% de l’augmentation des tarifs du secteur alimentaire a en fait alimenté les profits du même secteur depuis fin 2021. L’inflation n’est rien autre qu’un impôt privé, une sorte de braquage permanent et légal dans l’Etat néolibéral. Elle est de ce fait un accélérateur de la lutte des classes : lorsqu’elle s’envole, le capital s’approprie les marges. Elle révèle et accélère ainsi les profondes inégalités de répartition entre le travail et le capital comme l’Insoumission.fr avait pu déjà vous le montrer.

Blocage des prix, hausse des salaires, gel des loyers : à quand l’application des propositions de La France insoumise ?       

Des solutions existent et sont martelées par les insoumis depuis plus de deux ans. À quand le blocage des prix ? À quand l’indexation des salaires sur l’inflation ? À quand le gel des loyers ? À quand la hausse du SMIC à 1600 euros nets ? Lorsqu’elles ont été proposées à l’Assemblée nationale par les députés insoumis, les députés de la minorité présidentielle comme ceux du Rassemblement national ont voté contre, main dans la main. Ces derniers osent parler (très rarement) de « pouvoir d’achat » et font du double langage une profession. Leurs votes, eux, ne mentent pas et traduisent leur vraie nature : des escrocs en bande organisé.

Une autre proposition est particulièrement urgente au vu de la rentrée imminente : la gratuité des fournitures scolaires. Jean-Luc Mélenchon l’a rappelé avec force aux journées d’été de la France insoumise, à l’instar des autres dirigeants insoumis.

Toutes ces mesures seraient synonymes de respiration, d’une bouffée d’oxygène et de vie pour la population. Elles sont finançables. Elles sont faisables. Elles ne demandent qu’à être mises en œuvre. Combien de temps Macron et ses sbires resteront-ils sourds à cette urgence sociale ?

Par Sylvain Noel