Sécurité globale, Université : la macronie réduit encore nos libertés

Deux lois liberticides sont à l’ordre du jour ce 17 novembre à l’Assemblée nationale. Tout d’abord, la loi dite de « Sécurité globale » vise l’interdiction de diffuser les images de policiers, la surveillance généralisée par drone ou encore la privatisation de la police. Ensuite, la loi de « programmation de la recherche » met quant à elle gravement en danger la liberté académique et la contestation à l’université. Ces deux lois portent gravement atteinte à la liberté d’informer. Le jour anniversaire du lancement du mouvement des gilets jaunes… tout un symbole. Des rassemblements ont lieu partout dans le pays aujourd’hui pour dénoncer ces graves remises en cause de nos libertés fondamentales.

Invisibiliser les violences policières en remettant en cause la liberté d’informer

Deux ans jour pour jour après le premier acte des gilets jaunes, le gouvernement a choisi de fêter l’anniversaire du lancement d’un des plus grands mouvements sociaux de notre histoire récente à sa façon. La loi dite de « Sécurité globale » arrive en débat à l’Assemblée nationale. Nous avions déjà alerté sur les dangers de cette loi liberticide à travers un entretien détaillé avec le député Ugo Bernalicis, spécialiste des questions de sécurité, ainsi qu’avec un édito de présentation de la loi, par Clémence Guetté, secrétaire générale du groupe parlementaire de la France insoumise à l’Assemblée nationale.

L’article 24 de la loi est celui qui fait le plus de bruit. Et on comprend pourquoi. Il vise en effet à dissuader de filmer et photographier les policiers. Il n’était pas prévu dans la version initiale du texte. C’est un ajout de Gérald Darmanin sur recommandation d’Alliance police, corporation policière radicalisée, qui ne supporte pas que les journalistes et les manifestants puissent filmer et diffuser les violences policières. L’affaire Benalla ? Geneviève Legay ? Cédric Chouviat ? Les lycéens à genoux mains derrière la tête ? Les manifestants frappés au sol dans le burger King ? Le film de David Dufresne « Un pays qui se tient sage » ? L’œil de Jérôme Rodriguez ? Toutes ces images d’yeux crevés, de mains arrachées, de passages à tabac de manifestants ou de jeunes de quartiers diffusées sur les réseaux sociaux ? Que nenni ! Cette loi a pour objectif d’invisibiliser ces violences policières que le gouvernement ne saurait voir.

La loi « Sécurité globale » dénoncée par l’ONU

Une très grave atteinte à la liberté d’informer. Et ce, le jour de l’anniversaire du mouvement des gilets jaunes. Tout un symbole. Les 25 yeux crevés et 5 mains arrachées, toutes ces violences policières mises en lumière par le mouvement des gilets jaunes l’ont été… grâce à cette liberté fondamentale de filmer et de diffuser les images de manifestations. À l’aide d’un simple smartphone, tout citoyen jouissant du droit de manifester pouvait donc témoigner. Quid de Rémy Buisine et de tous ces journalistes effectuant des directs en manifestation ? De la liberté de la presse ? Le gouvernement botte en touche. La Défenseure des droits a souligné l’importance du caractère public de l’action des forces de sécurité permettant « son contrôle démocratique ». Saisie par la Ligue des droits de l’Homme (LDH), l’Organisation des Nations unies a sévèrement rappelé à l’ordre le gouvernement.

« L’information du public et la publication d’images et d’enregistrements relatifs à des interventions de police sont non seulement essentiels pour le respect du droit à l’information, mais elles sont en outre légitimes dans le cadre du contrôle démocratique des institutions publiques ». Ces mots sont ceux des rapporteurs de l’ONU. Mais la loi « Sécurité globale » ne s’arrête pas à cet article 24. L’usage généralisé des drones (article 22) et des caméras-piétons (article 21) constitueraient des atteintes graves à la liberté fondamentale de manifester. Le cœur de la loi, qui fait moins parler, prévoit la privatisation des missions de sécurité, la casse du statut de policier, la définition de la sécurité comme un marché : une partie d’échecs en passe d’être gagnée par le libéralisme comme le soulignait Ugo Bernalicis. Les rapporteurs de l’ONU sont clairs et sans appel : « Nous craignons que l’adoption et l’application de cette proposition de loi puissent entraîner des atteintes importantes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ».

La police de la pensée à l’Université

La loi « Sécurité globale » n’est pas la seule loi liberticide à être à l’ordre du jour ce mardi 17 novembre à l’Assemblée nationale. La loi de « programmation pluriannuelle de la recherche » (LPPR) remet en cause dans un silence assourdissant la liberté académique. Comme nous le soulignons dans un récent article, en plus de précariser encore un peu plus la recherche française, la LPPR vise à instaurer la police de la pensée à l’Université. Dans la nuit du 29 octobre, lors de son passage au Sénat,  un amendement soumettant « les libertés académiques » au « respect des valeurs de la République » est passé. Derrière la jolie formulation, c’est bien la liberté académique qui est attaquée. Conditionner les libertés académiques au respect de telle ou telle valeur politique, extérieure au champ scientifique, c’est détruire les libertés académiques. C’est une mise au pas, caractéristique d’un pouvoir autoritaire forçant les universitaires à se soumettre à lui.

Qui va juger de l’adéquation ou non d’un enseignement ou d’une recherche à ces « valeurs de la République » ? Qui va pouvoir attaquer en justice les universitaires censés ne pas les respecter ? En Roumanie, au Brésil, les études de genre sont rendues illégales. Personne n’est dupe, c’est bien les militants antiracistes et féministes que Jean-Michel Blanquer a dans le viseur. Le ministre de l’Éducation nationale avait annoncé la couleur le 24 octobre dans le JDD : une chasse aux sorcières contre les « islamo gauchistes » qui « gangrènent » l’Université. Plus de deux mille chercheurs lui ont répondu dans une tribune publiée dans le Monde refusant la police de la pensée à l’Université. Un autre aspect de loi concerne la répression de la mobilisation étudiante : jusqu’à 3 ans de prison et 45 000€ d’amende en cas de contestation. Sans parler de la précarisation accélérée pour les jeunes chercheurs.

Des rassemblements dans tout le pays pour défendre nos libertés fondamentales

Face à ces graves atteintes à nos libertés fondamentales, des rassemblements sont organisés partout dans le pays aujourd’hui. Contre la loi de programmation de la recherche, un rassemblement est organisé à 15 heures à Paris devant la Sorbonne. Contre la loi de « Sécurité globale », pour la liberté d’informer et d’être informé, pour la liberté d’expression contre une loi liberticide, des rassemblements sont organisés dans tout le pays. Ils sont recensés ici par la Ligue des droits de l’Homme.

Enfin, on peut s’attendre à des débats parlementaires houleux jusqu’à tard dans la soirée. Les députés insoumis ont déjà commencé à alerter sur les dangers de ces deux lois liberticides.

Par Pierre Joigneaux.

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