Dans la bande de Gaza, plus de 5 000 personnes ont été tuées par l’armée israélienne depuis le 7 octobre. Dans un interview pour L’Humanité, Francesca Albanese, rapporteuse spéciale de l’ONU appelle à « arrêter la furie et la rage d’Israël ».
La journée du 22 octobre 2023 a été marquée par une manifestation de plus de 30 000 personnes à Paris pour exiger un cessez-le-feu immédiat ainsi qu’une paix juste en Palestine. « En même temps », alors en visite à Tel-Aviv, la Présidente de l’Assemblée nationale a rappelé son « soutien inconditionnel » à Israël pour se défendre. Deux jours après, il est urgent que la France quitte le camp de la « vengeance terrible » de Netanyahou et rejoigne celui de la paix, aux côtés des Nations Unies et des organisations humanitaires.
Ce fut le sens du courrier adressé par Manuel Bompard, coordinateur de la France insoumise à Emmanuel Macron, en déplacement en Israël aujourd’hui. Dans sa lettre, le député insoumis lui demande de rétablir enfin « une voix forte de la France pour la paix, une voix indépendante et alignée sur aucune puissance ». Notre article.
Plus de 6 000 morts en 16 jours : un cessez-le-feu pour stopper l’escalade de crimes de guerre
Massacres de civils (5 000 Palestiniens, 1 400 Israéliens), prises d’otage, blocus. Depuis le 7 octobre 2023, le cycle de la violence se déchaîne. Francesca Albanese, la rapporteuse spéciale de l’ONU commence par rappeler dans son interview à L’Humanité que « les attaques contre les civils ne sont jamais tolérables et ce que le Hamas a fait s’apparente à un crime de guerre, sans doute. C’est extrêmement grave et je comprends que cela justifie une réponse. Mais celle qu’Israël est en train de mettre en œuvre n’a rien à voir avec l’autodéfense et va bien au-delà de ce qui est permis par le droit international. »
Israël s’appuie sur l’article 51 de la charte des Nations unies qui fait référence au droit des États de se défendre quand ils sont attaqués. Cependant, selon l’ONU, cela ne s’applique pas à cette situation. En effet, Israël n’est pas attaqué par un autre État, mais par un peuple qui vit sous occupation depuis 1967.
Entre 1947 et 1949, 750 000 Palestiniens ont été forcés de quitter leur terre sans espoir de retour. En 1967, 350 000 Palestiniens fuient, à nouveau. Aujourd’hui, c’est à 1,1 million de personnes que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu offre le choix entre l’exil et la mort. Les mots de la rapporteuse spéciale sont alarmants : « Si l’on en croit certains dirigeants politiques israéliens, le but est de pousser les Palestiniens dans le Sinaï. C’est du nettoyage ethnique. »
Depuis 2007, Gaza vit sous blocus. Le gouvernement d’extrême droite a renforcé ce dispositif condamné par l’ONU. Pendant 15 jours : plus d’eau, plus de médicaments, plus d’énergie. Ce week-end, 20 camions humanitaires ont pu rentrer sur la bande de Gaza. Or, comme l’explique Mme Albanese : « Avant le 7 octobre, des centaines de camions entraient chaque jour dans la bande de Gaza et c’était souvent insuffisant. » Pour survivre, les habitants doivent boire de l’eau de mer ou fortement contaminée.
Les cinq guerres menées contre Gaza, en 2008-2009, 2012, 2014, 2021, 2022, ont fait 4 200 morts au total. Depuis le 7 octobre, 5 000 personnes, dont 2 000 enfants, ont été tuées par l’armée israélienne. En moins de trois semaines. En Cisjordanie, un territoire où le Hamas n’a aucune emprise, 61 Palestiniens ont été tués par des colons israéliens.
La rapporteuse spéciale de l’ONU condamne les irresponsables qui donnent « carte blanche à ce qu’Israël est en train de faire » à Gaza
Francesca Albanese pointe en premier lieu la responsabilité des États-Unis qui ont mis leur veto à une disposition de l’ONU qui ne prévoyait rien d’autre qu’une « trêve humanitaire ». La France d’Emmanuel Macron ne fait pas mieux puisqu’elle a elle-même voté contre un cessez-le-feu à l’ONU le 16 octobre.
Pour aller plus loin : Gaza : la France a voté contre un « cessez-le-feu humanitaire » à l’ONU
Trois jours plus tard, même refus, au Parlement européen cette fois, lorsque Manon Aubry (LFI) propose : « un cessez-le-feu humanitaire ».
Sylvain Maillard, cheffe de file des députés Renaissance (ex-LREM) à l’Assemblée nationale, est encore plus clair quand il déclare : « je ne suis pas pour un cessez-le-feu. »
Dernière preuve en date de cette « carte blanche » à la « furie et la rage » du gouvernement d’extrême droite de Benjamin Netanyahu, Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, en déplacement à Tel-Aviv, avant même qu’Emmanuel Macron ait pu s’y rendre prononce ces paroles : « Rien ne doit empêcher Israël de se défendre ».
Pas en notre nom
Un contraste saisissant avec les 30 000 personnes rassemblées place de la République pour un cessez-le-feu immédiat en Palestine, soulignés par Jean-Luc Mélenchon.
Grâce à ce « collectif national pour une paix juste et durable entre palestiniens et israéliens », rassemblement des syndicats (CGT, Sud, FSU), deux partis politiques (LFI, NPA) et une centaine d’associations, il existe une France qui résiste aux sirènes de la vengeance, de l’alignement sur les États-Unis, à la théorie du choc des civilisations.
Toute cette semaine, des rassemblements auront lieu partout dans le pays pour porter, une voix française pour la paix.
Par Ulysse