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Au Parlement européen, le forum d’Alternatives à l’Ubérisation cible Macron, lobbyste en chef d’Uber

Une scène inhabituelle s’est déroulée ce jour au Parlement européen. Plus d’une centaine de travailleurs des plateformes ubérisés ainsi que des syndicalistes, juristes et chercheurs se se sont réunis pour « empêcher Uber de faire sa loi en Europe ». Un « forum des alternatives à l’ubérisation » à l’initiative de la députée LFI Leila Chaibi, organisé annuellement depuis quatre ans.

« Qui aurait pu imaginer, il y a quatre ans, le chemin que nous allions parcourir ? » déclare l’eurodéputée insoumise en introduction. L’Histoire semblait écrite, « celle qu’on connait par cœur à Bruxelles, où les décisions politiques sont toujours prises dans le sens du marché, des puissants et des multinationales, contre l’intérêt des gens et des travailleurs. ». Cette histoire c’est celle menée par le mouvement insoumis aux côtés des travailleurs des plateformes pour leur permettre d’accéder au statut de salarié, et donc d’accéder aux droits afférents.

Après des années d’intenses bagarres, Leila Chaibi avait obtenu une victoire au Parlement européen par l’adoption d’une directive allant dans ce sens en décembre dernier. A la suite de quoi « nos adversaires se sont réveillés » a t-elle poursuivi. Le 16 février, Emmanuel Macron a en effet saboté cette victoire significative en bloquant la Directive au conseil européen. Du jamais vu. « A cause d’un caprice d’Emmanuel Macron, des avancées sociales pour des millions de travailleurs n’auront pas lieu » analyse Hervé Street, sous-traitant. Débuté aujourd’hui, le forum se clôturera demain. Un évènement qui marque la montée en puissance d’un lobby populaire contre Uber, toutes les plateformes et Macron, leur « lobbyiste en chef ». Notre article.

« Dénoncer le lobbying d’Uber et des plateformes »

Après quatre jours de marches depuis Lille, le chauffeur VTC Brahim Ben Ali est arrivé mercredi midi à Bruxelles. Avec lui, de nombreux autres travailleurs de plateformes ubérisés. 110 kilomètres parcourus pour « ne pas laisser Uber faire sa loi en Europe avec la complicité d’Emmanuel Macron ». Sacrifiant leur rémunération et malgré les cloques au pied, la fatigue, la pluie et le vent glacial, ils sont bien parvenus jusqu’au fronton du Parlement européen. Une action symbolique puissante pour dénoncer un système d’exploitation qui sévit partout en Europe. « A chaque pas, c’est une pensée que nous avions pour tous les travailleurs des plateformes » a déclaré Brahim Ben Ali au micro de l’Insoumission.fr.

« Ne laissons pas les plateformes dicter les règles » : une première journée de réunion de plus d’une centaine de travailleurs et chercheurs

Le jour 1 du forum s’est déroulé ce mercredi. A la tribune, Leila Chaibi a rappelé l’étendu du chemin parcouru depuis le premier forum des alternatives à l’ubérisation, il y a quatre ans, à son initiative. Depuis, le réseau a connu une évolution exponentielle. « Agents de ménages, travailleurs du clics, travailleurs de sous traitance, notre réseau s’est agrandi ! » s’est félicitée l’eurodéputée insoumise. Un réseau qui pèse, en témoigne le niveau de fébrilité des libéraux, Emmanuel Macron en tête, qui s’agitent pour tenter de conserver un rapport de force favorable aux plateformes ubérisés.

Ce quatrième forum des Alternatives à l’Ubérisation entend muscler ce rapport de force : « Vous êtes le lobby des travailleurs ! C’est vous qui avez inversé le rapport de force en Europe ! C’est grâce à vous que la commission a proposé une directive de présomption de salariat » a déclaré Leila Chaibi pour saluer les victoires arrachées précisément grâce à ce collectif qui ne cesse de monter en puissance.

Une montée en puissance qui se voit et s’entend ce mercredi au Parlement européen. Tour à tour, travailleurs, juristes et chercheurs prennent la parole. Brahim Ben Ali souligne l’importance de faire front commun : « il faut être ensemble ». Emilie, livreuse en France insiste sur l’importance d’un accompagnement pour que les travailleurs bénéficient de la protection sociale. Laurent Dégousé, du syndicat Sud Commerce, appelle à « aller à Paris pour se faire entendre ». Les initiatives et les propositions fusent et l’esprit de combativité est palpable. Amadine Mazenc-Elanco, travailleuse indépendante, précise que l’ubérisation « dépasse le cadre des livreurs et des chauffeurs », une observation confortée par Noraly, travailleuse espagnole : « quand on parle de l’union des travailleurs, ce n’est pas que Uber comme transport et Deliveroo en livraison, mais bien d’autres entreprises du secteur des technologies ».

« A cause d’un caprice d’Emmanuel Macron, des avancées sociales pour des millions de travailleurs n’auront pas lieu »

Cet échange est aussi l’occasion pour les travailleurs des plateformes de rappeler la nature des plateformes qui les exploitent, et de construire ensemble la riposte appropriée pour changer les règles du jeu. Leila Ouadah, livreuse pour Deliveroo le dit sans détours : « Les plateformes refusent catégoriquement le dialogue », soulignant la dégradation des conditions de travail qui va avec : « On travaille de plus en plus mais on est payé de moins en moins alors que l’inflation augmente ». Hervé Street, sous-traitant pour Fedex, avec lequel l’Insoumission.fr s’est déjà entretenu, poursuit en exposant les tactiques de surveillance par les donneurs d’ordre pour optimiser l’exploitation sur les travailleurs.

Pour le cas français, la colère des travailleurs des plateformes contre Emmanuel Macron est bien là : « C’est le VRP des plateformes » dénonce Brahim Ben Ali. « A cause d’un caprice d’Emmanuel Macron, des avancées sociales pour des millions de travailleurs n’auront pas lieu. Les macronistes sont complètement hors-sol ! Qu’ils aillent voir ce que c’est d’être livreur Uber. » poursuit Hervé Street. Il faut « faire une action contre lui, ou le mettre à vélo » rajoute Jeremy. Tous ont bien en tête la manœuvre du chef de l’Etat qui a bloqué la directive, pourtant adoptée par le Parlement européen, qui aurait permis de changer le cours de leur existence en leur permettant d’accéder au statut de salarié et aux droits qui vont avec.

Demain, le forum se poursuivra. Avec à la clé « une petite surprise pour Emmanuel Macron, lobbyiste en chef d’Uber » a déclaré Leila Chaibi en cloture de cette première journée.

Sylvain Noel, rédacteur en chef

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