Total Pouyanne
Visite de Patrick Pouyanné, PDG de TOTAL à l'Ecole polytechnique le 24112017

Salaires contre dividendes : comment les grands groupes volent le travail et détruisent la planète

C’est l’inflation des dividendes. Les responsables de la catastrophe ont un visage. Entre 2011 et 2021, les 100 plus grandes entreprises cotées ont versé à leurs actionnaires en moyenne 71% de ce qu’elles ont gagné chaque année. On ne peut plus parler de « partage de la valeur », mais de braquage du capital sur le travail dans la répartition de la valeur ajoutée. On estime ainsi que 250 milliards d’euros sont passés des poches du travail vers celles du capital, dans un silence assourdissant. Et alors que les salaires ne sont toujours pas indexés sur l’inflation, proposition rejetée par le gouvernement et le Rassemblement national, le capital continue de grignoter le travail, et la planète. C’est l’enseignement d’un nouveau rapport choc de l’ONG Oxfam sortie ce 26 juin 2023.

45% des dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires par les 100 plus grands groupes français suffiraient à financer la transition écologique

Un chiffre à retenir de ce rapport et à marteler dans le débat publique : en 2019, 45 % des dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires par les 100 plus grandes entreprises cotées en bourse auraient suffi à couvrir leurs besoins en investissement dans la transformation écologique. L’ONG souligne une « déconnexion » accrue entre dividendes et salaires depuis 2018. Entre 2020 et 2021, les paiements aux actionnaires ont bondi de 31,4 milliards d’euros soit presque autant que l’ensemble de la masse salariale des entreprises du top 100, soit 37 milliards d’euros entre 2020 et 2021.

Les responsables de la catastrophe écologique et sociale, ils ont des noms, ils ont des adresses, ils ont des visages. Total Energies et son PDG Patrick Pouyanné arrivent en première position, avec 61 milliards d’euros de dividendes. Suivent ensuite Sanofi et ses 53 milliards d’euros reversés aux actionnaires entre 2011 et 2021, puis Axa, avec 27 milliards d’euros. La folie des grandeurs pour gaver les actionnaires comme priorité absolue, même avant la santé financière de l’entreprises. Certaines grandes entreprises n’hésitent en effet pas à cramer leur caisse et à s’appauvrir pour payer leurs actionnaires. C’est par exemple le cas d’Engie qui, en dix ans, a accumulé 784 millions de pertes alors que, dans le même temps, les sommes versées aux actionnaires sur la même période s’élèvent à 23,6 milliards d’euros.

L’ONG dénonce la responsabilité du gouvernement qui « surprotège » ces multinationales en les gavant d’argent public sans exiger aucune contrepartie. Depuis 2010, le montant moyen de ces aides atteint 8,5% du PIB par an, soit près de 200 milliards d’euros sans aucune exigence en termes de responsabilité sociale ou environnementale. Cette course à la satisfaction « à tout prix » des actionnaires empêche les grandes entreprises d’investir dans leur transformation écologique ou d’augmenter les salaires. L’ONG préconise d’utiliser la fiscalité comme outil de redistribution afin de réaligner la fiscalité capital sur celle du travail, d’encadrer la part des bénéfices versés aux actionnaires, conditionner les aides publiques au plafonnement des dividendes et aux investissements dans la transition écologique.