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Le RN, héritier de Pétain : le camp présidentiel se fracture

Le Rassemblement National (RN) est « l’héritier de Pétain », a déclaré Élisabeth Borne le 28 mai 2023 sur Radio J. Un simple rappel de faits historiques. Cette déclaration lui a valu un recadrage d’un certain… Emmanuel Macron. Visiblement, le chef de l’État ne souhaite pas utiliser la vérité historique pour dénoncer la menace de l’extrême droite, plus importante que jamais. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a pris la défense de la Première ministre après le recadrage du président de la République. « Je pense que le RN a une histoire et que la Première ministre est parfaitement fondée à rappeler cette histoire », a déclaré le locataire de Bercy sur France Inter ce matin. Sur ce sujet, le camp présidentiel est fracturé. Pendant ce temps, le RN se frotte les mains.

Fallait-il attendre autre chose de la part d’Emmanuel Macron ? Ses flirts avec l’extrême droite durent depuis 8 ans maintenant. Hommage au Maréchal Pétain, réhabilitation de Charles Maurras, passivité face à la chasse à l’islamo-gauchisme lancée par son gouvernement ou lorsque Gérald Darmanin a qualifié Marine Le Pen de « trop molle ». Récemment, le chef de l’État a utilisé le terme de « décivilisation », concept fumeux inventé par l’extrême droite. Reprendre ses mots, la banaliser et « en même temps » diaboliser la gauche : le jeu auquel se livre Emmanuel Macron est terriblement dangereux. Notre article.

Macron recadre Borne, Le Maire contredit Macron : le camp présidentiel se fracture, le RN se frotte les mains

Le RN est « l’héritier de Pétain », a déclaré Élisabeth Borne sur Radio J le 28 mai 2023. Un simple rappel des faits. « Je ne crois pas du tout à la normalisation du Rassemblement national. Je pense qu’il ne faut pas banaliser ses idées, ses idées sont toujours les mêmes, a expliqué la Première ministre. Une position loin d’être partagée dans le camp présidentiel. Un certain… Emmanuel Macron a recadré sa Première ministre après sa déclaration, le 30 mai dernier lors du Conseil des ministres.

« Il faut combattre l’extrême droite mais on ne la combat pas avec les mots des années 90 et des arguments moraux, ça ne marche plus », a déclaré le chef de l’État, selon des propos rapportés par un ministre à France Télévisions (FranceInfo). La Première ministre a rappelé des faits historiques, mais Emmanuel Macron n’est pas du même avis.

Tout le monde n’est pas d’accord avec le chef de l’État. Bruno Le Maire a défendu les propos de la Première ministre. « Je pense que le RN a une histoire et que la Première ministre est parfaitement fondée à rappeler cette histoire », a-t-il déclaré sur France Inter ce matin. « On peut rappeler parfaitement, comme l’a fait la Première ministre, l’histoire du RN tout en combattant le RN sur ses propositions et sur ses idées », selon le ministre de l’Économie. Certains députés du camp présidentiel désapprouvent la position d’Emmanuel Macron. « Il a peut-être, dans son rôle de président, envie de calmer le jeu. Mais je ne crois pas qu’il faille calmer le jeu avec le Rassemblement national », considère Erwan Balanant, député MODEM. Le camp présidentiel est fracturé. Pendant ce temps, le RN se frotte les mains.

Du barrage au marche-pied : comment Macron a normalisé l’extrême droite

Fallait-il vraiment s’attendre à autre chose de la part du président de la République ? Ses flirts avec l’extrême droite durent depuis maintenant 8 ans. Quelques rappels s’imposent. En 2015, il déclare : « Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort. » En 2018, le chef de l’État qualifie le Maréchal Pétain, qui serra la main d’Adolf Hitler, de « grand soldat ».

2 ans plus tard, Emmanuel Macron réhabilite Charles Maurras, dirigeant de l’Action française en distinguant « pays légal » et « pays réel » pour parler du régalien. Il récidive le 14 juillet 2022 en utilisant dans son discours terme de « nation organique », rhétorique fondatrice des États fascistes en Italie et en Allemagne. Une idée reprise ensuite fidèlement dans la doctrine de Vichy « Travail, Famille, Patrie ». En 2021, le gouvernement agite le drapeau de la menace d’un pseudo « islamo-gauchisme » qui gangrènerait les universités : le chef de l’État laisse faire. De même lorsque que le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin qualifie Marine Le Pen de « trop molle ».

Pour aller plus loin : Pétain « grand soldat », « pays réel », « nation organique » : Macron, le nauséabond glissement vers la rhétorique d’extrême-droite

Récemment, le chef de l’État a repris le mot de « décivilisation », concept fumeux théorisé par l’extrême droite. Emmanuel Macron sert de marche-pied à l’extrême droite depuis trop longtemps, et « en même temps » diabolise la gauche. Un retournement du barrage républicain prédit par le philosophe Frédéric Lordon : plutôt Hitler que le Front populaire hier, plutôt Marine Le Pen que Jean-Luc Mélenchon aujourd’hui. Un jeu terriblement dangereux, qui fait le jeu de l’extrême droite.

Par Nadim Février