Jean-Luc Mélenchon à Matignon ? La Constitution de la 5ème République est une mécanique politique méconnue d’une majorité d’électeurs. Pour beaucoup, l’élection présidentielle est majeure et les législatives qui suivent sont, sinon accessoires, tout au moins secondaires. Depuis la réforme du quinquennat, appliquée pour la première fois en 2002, les législatives voient l’abstention croître régulièrement et donnent par défaut une majorité de députés au locataire de l’Élysée.
Or, l’électorat semble avoir oublié, ou n’avoir pas connu, les trois cohabitations du temps du septennat. À la suite des élections législatives des 12 et 19 juin, Jean-Luc Mélenchon pourrait devenir Premier ministre. Une seule condition : qu’une majorité de députés de la NUPES, l’alliance historique de la gauche, soit élue. Petit rappel en 2 minutes de ce que dit la Constitution. Notre article.
Une constitution limpide
Si l’article 5 précise le rôle du Chef de l’État, l’article 20 définit celui du gouvernement : « Le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il dispose de l’administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50. »
Enfin, l’article 21 dispose que « le Premier ministre dirige l’action du gouvernement. Il est responsable de la défense nationale. Il assure l’exécution des lois. Sous réserve des dispositions de l’article 13, il exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils et militaires. »
Le Président dispose d’une majorité ?
Dans ce cas, le plus fréquent depuis 1958, le vrai décideur est le Président de la République. Théoriquement, les articles 20 & 21 font que le chef de la majorité est le Premier ministre. Mais dans les faits, ce dernier n’est qu’un exécutant qui met en musique les ordres du Président. Tout se décide au plus haut niveau.
On l’a vu, récemment, avec Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron, Chefs de l’État omnipotents, entourés de conseillers plus puissants que les ministres, décidant de tout, avec des Premiers ministres jouant un rôle secondaire et une majorité aux ordres à l’Assemblée nationale. On parle alors de monarque républicain et de députés godillots.
Le Président n’a pas de majorité ? Mélenchon peut être Premier ministre
C’est ce qui s’est passé en 1986, 1993 et 1997 où le Président a été contraint de nommer un Premier ministre issu de l’opposition devenue majoritaire à l’issue des élections législatives. Dans ce cas, les articles 20 & 21 se sont pleinement appliqués. Le vrai pouvoir se situait à l’hôtel Matignon et non plus à l’Élysée. Le Roi était nu.
Dans l’hypothèse où la Nouvelle Union Populaire remporterait la majorité à l’Assemblée nationale le 19 juin prochain, Emmanuel Macron, pourtant vainqueur le 24 avril, serait dans l’obligation de nommer Jean-Luc Mélenchon Premier ministre : il serait le nouveau chef de la majorité.
Finalement, les choses ne sont pas si compliquées. Mais, puisque les médias mainstream ne le font pas, il nous revient de faire de la pédagogie à nos électeurs et aux abstentionnistes. Le plus grand nombre n’intègre pas ces données, tant la notion de pouvoir présidentiel et le système politique de la 5ème République sont implantés dans les esprits. Ces élections législatives sont cruciales et historiques. La France peut encore choisir un autre chemin : un programme de rupture avec le capitalisme pour répondre aux urgences sociale, écologique et démocratique. Réponse dans les urnes ce dimanche, et celui d’après.
Claude Cherblanc