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Européennes – À Mayotte, le candidat RN qui propose « d’éradiquer » des Comoriens est confirmé dans ses fonctions

Le 20 avril, Marine Le Pen annonce que Saidali Boina Hamissi, délégué départemental du Rassemblement national (RN) à Mayotte, figurera sur la liste pour les élections européennes conduite par Jordan Bardella. 4 jours plus tard, le 24, le parti annonce finalement qu’il n’y sera pas présent.

En cause, la parution d’un article révélant que Saidali Boina Hamissi s’est fendu de plusieurs publications Facebook racistes, misogynes et conspirationnistes.

Le parti d’extrême droite ne pouvait bien sûr pas ignorer les prises de positions de celui qui est depuis plus d’un an l’homme fort du RN à Mayotte. D’ailleurs, malgré son éviction face à une forte pression médiatique, les responsables du parti refusent de condamner les propos de celui qui est maintenu « catégoriquement » par Marine Le Pen dans ses fonctions départementales.

Saidali Boina Hamissi sera oublié comme bien d’autres racistes avant lui. Le comportement du RN dans cette affaire est révélateur de sa nature profonde, celle d’un parti n’ayant aucunement rompu avec son héritage xénophobe, misogyne, n’aillant pour programme que l’incompétence et la haine de l’autre. Notre article.

Pour Saidali Boina Hamissi « la soumission de la femme vient naturellement », des habitants de Mamoudzou sont des « cafards », Vladimir Poutine est un « visionnaire »

Le 22 avril, le journal Libération révèle que Saidali Boina Hamissi s’est fendu de plusieurs publications Facebook alternant xénophobie, misogynie et complotisme (des publications depuis supprimées).

Ainsi, en 2017, l’homme qualifie de « vermines » et de « cafards » les habitants d’un quartier de Mamoudzou, et partage la publication d’un autre militant RN local appelant les Mahorais à « éradiquer ce fléau migratoire […] cette vermine qui nous ronge jusqu’à l’os [Les Comoriens]. » Toujours selon Libération, étaient associées à cette publication l’image d’une femme tenant un pistolet et un drapeau français présentant une croix celtique, et la légende « butez-moi ces merdes ».

Outre l’incitation à la haine et à la violence raciale, Saidali Boina Hamissi soutient par ailleurs que « la soumission de la femme vient naturellement lorsqu’elle se sent aimer, protéger et valoriser (sic) par son mari ».

En parfaite harmonie avec le Rassemblement National qui a imprimé des milliers de tracts à son effigie, Saidali Boina Hamissi qualifie Vladimir Poutine de « visionnaire ». Il appréhende aussi la distanciation sociale et les gestes barrières comme « liés au satanisme ».

Dans de mêmes délires complotistes, l’homme considère en 2022 « qu’il n’existe pas de terrorisme islamique. [Mais qu’il] s’agit de mercenaires recrutés, payés, entraînés, armés et protégés par des gouvernements occidentaux, notamment ceux des US et de la France ». Peut-être Saidali Boina Hamissi faisait-il alors référence à Jean-Claude Veillard, ancien candidat du Front National, ayant supervisé la collaboration du groupe Lafarge et de Daech en Syrie.

Face à la pression médiatique, le RN exfiltre Saidali Boina Hamissi des européennes, mais le confirme dans ses fonctions locales

Comme l’on pouvait s’y attendre, les cadres du parti fondé par Jean-Marie Le Pen nient avoir eu connaissance des prises de positions publiques de Saidali Boina Hamissi, dont certaines ont pourtant été tenues alors qu’il était déjà délégué départemental du RN à Mayotte.

Bien-sûr, lorsque Jordan Bardella et Sébastien Chenu (vice-président RN de l’Assemblée nationale) font mine de découvrir la xénophobie et la misogynie de Saidali Boina Hamissi, ils mentent. Mais même s’ils disaient la vérité, leurs attitudes et déclarations dans cette affaire dénotent d’une grande complaisance à l’égard des abjectes déclarations de leur ex-futur candidat.

Ainsi Sébastien Chenu, se cachant derrière la liberté d’expression, se trahit en déclarant prudemment ne pas être « fan » et « favorable à ce genre d’expression », expression qu’il qualifie par ailleurs, avec un sens aigu de la litote, de « peu verte ». En d’autres termes, c’est bien davantage la forme que le fond qui dérange ce cadre du RN. Ce qui le dérange, c’est que Saidali Boina Hamissi ne se soit pas plié à la stratégie de dédiabolisation du parti d’extrême droite, et qu’il exprime sans se cacher son idéologie nauséabonde.

Même son de cloche du côté de Jordan Bardella qui trouve à se plaindre que son parti soit « lasérisé », et botte en touche à la question de savoir si Saidali Boina Hamissi sera maintenu dans ses responsabilités départementales. Mais pas de chance pour lui, c’est Saidali Boina Hamissi lui-même, visiblement toujours pas assez entraîné, qui déclare que Marine Le Pen en personne a refusé sa démission d’un « non catégorique ».

Répétons-le s’il le faut : Marine Le Pen confirme dans ses fonctions un homme déclarant que « la soumission de la femme est naturelle », et qui appelle ni plus ni moins qu’à tuer des Comoriens.

Saidali Boina Hamissi n’est pas bien différent de Jordan Bardella et de Marine Le Pen : il est juste moins bien entraîné

Cet épisode nous rappelle une fois encore combien la dédiabolisation du RN, permise par les médias dominants autant que par le camp présidentiel, n’est qu’une façade. Au fond, Marine Le Pen et Jordan Bardella n’ont pas vraiment de divergence de fond avec Saidali Boina Hamissi, et sa confirmation dans ses fonctions à Mayotte en témoigne avec éloquence.

Moins bien entraîné que d’autres, cet homme est loin de ne représenter que lui-même au Rassemblement National. Rien qu’à l’Assemblée nationale, le parti compte un député ayant tenu une librairie négationniste, un autre comparant l’avortement à la Shoah, un autre encore déclarant préférer les chiens aux migrants…

Pour aller plus loin : notre série consacrée aux députés du RN

Fondé par des nazis, le Rassemblement National n’a rien perdu de l’idéologie nauséabonde du temps de Jean-Marie Le Pen. Et malheureusement pour sa fille, ses cadres et militants locaux, les moins formés et les plus honnêtes, sont toujours là pour le rappeler.

Par Eliot

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