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Immigration – Préférence nationale sur les aides : Macron fait du Le Pen

Pour faire adopter leur loi sur l’immigration, les macronistes sont prêts à tout, quitte à parler et agir comme Jean-Marie Le Pen et ses héritiers. En témoigne la dernière prise de position de la ministre Aurore Bergé hier dans l’émission Dimanche en Politique. Instaurer un délai de plusieurs années avant que les étrangers en situation régulière puissent avoir des allocations familiales ? « Je ne dis pas non », affirme la ministre d’Emmanuel Macron. Ou comment mettre en pièces le principe d’universalité, fondateur de notre République et épouser une thèse lepéniste : la préférence nationale. Comme la réforme de l’AME annoncée par Élisabeth Borne pour donner des gages à Marine Le Pen et aux Républicains (LR).

Les débats sur cette loi raciste portée par Gérald Darmanin mettent sous les feux des projecteurs les désaccords et tensions au sein de la macronie. « Le texte sorti du Sénat reprend clairement les idées du Rassemblement national et je n’ai pas été élue sur mon territoire pour voter des mesures d’extrême droite », dénonce Cécile Rilhac, députée du camp présidentiel. Un autre confesse : « On nous a vendu ce texte en vantant son équilibre. On va se retrouver qu’avec des mesures dures ». Alors, personne n’a craqué ?

Tous les regards sont maintenant tournés vers la Commission Mixte Paritaire (CMP), réunissant 7 députés et autant de sénateurs, pour trouver un « compromis » sur le projet de loi. En cas de CMP conclusive, la leçon serait claire : la fin des digues par l’alliance assumée entre la droite et l’extrême droite avec, à la clé, une question : que feront les députés macronistes face à un texte contenant des mesures d’extrême droite adoubées par Macron ? Si la CMP n’est pas conclusive, Macron serait contraint de retirer le texte. Dans tous les cas, l’horizon est celui d’une intense crise de régime. Affaire à suivre de très près ce soir et demain, 19 décembre. Notre article.

Empêcher des étrangers en situation régulière d’avoir des allocations familiales pendant plusieurs années : la ministre Aurore Bergé parle comme la famille Le Pen

Invitée dans l’émission Dimanche en Politique ce 17 décembre 2023, la ministre des Solidarités Aurore Bergé est interrogée sur le projet de loi immigration. Jusqu’où le gouvernement est-il prêt à lâcher du lest pour que la droite vote de concert avec lui ? Et soudain, patatras : elle ne dit pas non pour reprendre une idée, dont le premier à la porter a été un certain Jean-Marie Le Pen : la préférence nationale concernant les allocations familiales. Vous avez bien lu. En jeu, la possible instauration d’un délai de plusieurs années avant qu’une famille étrangère en situation régulière puisse faire une demande d’allocations familiales.

« Je ne dis pas non », déclare Aurore Bergé, droite dans ses bottes. « Nous avons besoin de faire évoluer le texte si nous voulons un accord », explique-t-elle. Au point de parler comme Jean-Marie Le Pen, fondateur du Front National en son temps. « Pour obtenir un accord sur son ignoble loi sur l’immigration, le gouvernement est donc prêt à reprendre le concept de préférence nationale forgé par Jean-Marie Le Pen », cingle Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise. En 2017, le sénateur Stéphane Ravier (Reconquête !) proposait un dispositif similaire. Les digues sautent les unes après les autres.

« Je n’ai pas été élue sur mon territoire pour voter des mesures d’extrême droite » : la minorité présidentielle au bord de l’explosion

Depuis le rejet par l’Assemblée nationale du projet de loi raciste de Darmanin, le camp présidentiel est au bord de l’implosion. Tous leurs désaccords sont sous le feu des projecteurs. Une trentaine de députés macronistes pourraient voter contre le projet de loi immigration selon Politis. L’enjeu ? Les fameuses « lignes rouges », comme la préservation de l’Aide Médicale d’État. « Un texte voté sans avoir jamais été examiné par l’Assemblée » serait un « gâchis épouvantable », déplore François Bayrou (MODEM), proche du chef de l’État. Le président du groupe parlementaire du MODEM, Jean-Paul Mattei, n’a pas donné de consignes de vote, au cas où le projet de loi reviendrait devant l’Assemblée nationale

« Le texte sorti du Sénat reprend clairement les idées du Rassemblement national et je n’ai pas été élue sur mon territoire pour voter des mesures d’extrême droite », dénonce Cécile Rilhac, apparentée au groupe Renaissance (ex-LREM) au Monde. « Qu’on ose me demander de voter ce texte au nom de l’unité de la majorité ou de la peur de signer la fin du quinquennat en cas d’échec, cela fait plus que m’agacer », assure-t-elle. Au sein du Gouvernement, l’ambiance est délétère entre Élisabeth Borne et ses ministres, elle qui joue son poste à Matignon.

Les 2 scénarios possibles de la commission mixte paritaire sur le projet de loi Immigration

Tous les regards sont maintenant tournés vers la fameuse Commission Mixte Paritaire. Elle doit se réunir à partir de 17 heures ce 18 décembre 2023. 2 scénarios sont sur la table. Premier scénario : les parlementaires n’arrivent pas à trouver un accord sur le projet de loi Immigration, Emmanuel Macron décide du retrait du texte. Le camouflet serait terrible pour le chef de l’État et l’ensemble de son camp, pour un texte considéré comme l’un des plus importants de ce second quinquennat.

Deuxième scénario : la CMP est conclusive, un accord est trouvé entre les 7 députés et 7 sénateurs, sur la base d’une loi bien plus répressive et xénophobe qu’elle ne l’est. Elle signifierait l’alliance assumée entre la droite et l’extrême droite. Dans ce cas, le texte de loi devrait être soumis à l’approbation du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Pour aller plus loin : VICTOIRE – « Le début de la fin pour la macronie » : le projet de loi immigration de Darmanin rejeté par l’Assemblée nationale

Pour rappel, l’Assemblée nationale a soutenu une motion de rejet lundi dernier et a rejeté le projet de loi raciste du gouvernement sur l’Immigration. « Le début de la fin pour la macronie », déclarait Mathilde Panot, présidente du groupe parlementaire insoumis. Une preuve, s’il en fallait une, que le camp présidentiel est minoritaire et n’arrive pas à faire voter ses textes de lois sans piétiner la représentation nationale. Le texte de loi aurait dû être retiré et le ministre de l’Intérieur aurait dû démissionner. Néanmoins, sous le règne d’Emmanuel Macron, qu’importe ce que le Parlement vote. À la fin, c’est sa volonté qui compte, rien d’autre. Affaire à suivre entre ce soir et demain, mardi 19 décembre.

Par Nadim Février