Augmentation des salaires. Leroy Merlin, Bergams, Sanofi, Auchan, Decathlon, Labeyrie, Sephora, Alstom, Constellium, Ferropem, Conforama, Boulanger, Lidl, Carrefour, Flunch, Dassault Aviation… Un mouvement de grève est en cours dans tout le pays dont vous n’avez sans doute pas entendu parler. Les salariés des entreprises possédées par les groupes LVMH (Sephora, Labeyrie) et Mulliez (Decathlon, Auchan, Leroy Merlin) demandent des augmentations de salaires et une amélioration des conditions de travail en dénonçant les milliards engrangés en pleine crise par leurs groupes. L’inflation sonne le retour de la lutte des classes ? LeroyMerlin et Labeyrie ont obtenu des augmentations des salaires, signe que la lutte paye. L’augmentation du SMIC à 1400 euros net, portée par Jean-Luc Mélenchon, est plébiscitée par 80% des citoyens. Loin de la diversion identitaire, le pouvoir d’achat est la priorité absolue des Français pour 2022. Notre article.
Augmentation des salaires : mouvement de grève en cours dans toute la France
« L’inflation a ranimé la lutte des classes ». Ces mots sont ceux de Jean-Luc Mélenchon ce 3 décembre sur le plateau de Jean-Jacques Bourdin. Un constat quand on prend la peine de se pencher sur l’actualité sociale du pays. Un mouvement social est en effet en train de naître sur la question des bas salaires en France.
Voyez plutôt : Leroy Merlin, Bergams, Sanofi, Auchan, Decathlon, Labeyrie, Sephora, Alstom, Constellium, Ferropem, Conforama, Boulanger, Lidl, Carrefour, Flunch, Dassault Aviation, la liste des salariés se mettant en grève pour exiger l’augmentation de leur salaire ne cesse de s’allonger dans le pays. Et pour cause, les prix explosent. Alors que Noël approche à grand pas, les comptes en banques sont vides. Dès le 10 du mois, il ne reste en moyenne que 55 euros pour survivre pour les 38 millions de Français gagnant moins de 2000 euros par mois.
Après des négociations salariales annuelles décevantes, les salariés de ces différents groupes, souvent pour la première fois de leur vie, ont décidé de débrayer. Les revendications sont simples : un partage plus riche des richesses entre le capital et le travail, alors que ces groupes ont profité de la crise pour engranger des milliards quand leurs salariés survivent avec des miettes.
« On assiste ici à la naissance d’un mouvement interprofessionnel, intersyndical, sur la question des bas salaires » : l’exemple victorieux des Leroy Merlin
À Leroy Merlin les syndicats ont été étonnés par l’ampleur et la dureté de la grève. « Je ne sais pas à partir de quand on peut considérer qu’un mouvement social naît, mais à mon avis on assiste ici à la naissance d’un mouvement interprofessionnel, intersyndical, sur la question des bas salaires, analyse Romain Coussin, délégué syndical CGT central de Leroy Merlin. On a eu une couverture médiatique large, notre sort a été discuté par des élus politiques, on peut donner de nombreux exemples d’autres entreprises où des grèves ont éclaté pour les mêmes raisons ». À Leroy Merlin, les salariés ont obtenu 65 euros d’augmentation de salaires, signe que la lutte paye.
« Le modèle néolibéral de l’entreprise est à bout de souffle, analyse Sophie Béroud, professeure de science politique à l’université Lumière-Lyon 2 dans un article de Mediapart sur le sujet. Les mobilisations qu’on vit actuellement sont assez inédites par leur ampleur et par le fait qu’elles aient lieu dans des entreprises qui se mobilisent peu habituellement. Le modèle construit sur l’individualisation, la part variable des salaires, ne tient plus et le décrochage entre les salaires des ouvriers et ceux des cadres, notamment de direction, qui perçoivent des actions, des stocks options, est de moins en moins accepté. »
Des écarts de salaires qui ne passent plus. Les profiteurs de crises se sont gavés pendant que 4 millions de Français basculaient dans la pauvreté au cours de ces deux années de crise sanitaire. 51 milliards de dividendes. La fortune des 500 familles a bondi pour atteindre 1000 milliards d’euros. Et « en même temps », 8 millions de Français à l’aide alimentaire pour pouvoir bouffer. Le rêve de ronds points à nouveau occupés traverse le pays et l’ensemble de ces salariés en lutte. Et pour cause.
80% des Français en faveur de l’augmentation du SMIC à 1400 euros net, le pouvoir d’achat priorité absolue du vote en 2022
Ce quinquennat a réalisé l’exploit d’abriter les deux plus longs mouvements sociaux depuis mai 1968 : les Gilets jaunes et les retraites. Chaque samedi durant des mois des citoyens sont descendus dans la rue pour réclamer enfin plus de justice sociale et une répartition des richesses plus juste. Résultat ? Le néolibéralisme s’est radicalisé sous ce quinquennat : l’État s’est plus que jamais mis au service de l’enrichissement du capital et à l’appauvrissement du travail. Suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) et instauration du prélèvement forfaitaire unique (PFU) sur le capital et « en même temps » hausse de la CSG et des APL.
Les revendications de justice sociale des gilets jaunes étaient soutenues par une immense majorité de la population. Elles se retrouvent aujourd’hui en grande partie dans le programme de l’Union populaire, plébiscité par une (très) large majorité de Français. Augmentation du SMIC à 1400 euros net, garantie d’emploi, blocage des prix sur les produits de première nécessité, extension du RSA pour les moins de 25 ans, limitation de l’écart des salaires de 1 à 20 dans les entreprises, retraite à 60 ans, allocation d’autonomie pour que personne ne vive sous le seuil de pauvreté, année blanche sur les profits du CAC40, taxe sur les profiteurs de crise, rétablissement de l’ISF, instauration de contreparties aux aides publiques pour que plus aucune entreprise puisse se gaver d’argent public, reverser des milliards de dividendes et en même temps licencier, etc.
Bonne nouvelle : toutes ces mesures figurent dans l’Avenir en commun, le programme des insoumis. Et elles sont toutes soutenues par 60 à 90% de Français selon une étude de l’institut Harris Interactive. Meilleure nouvelle encore : le candidat qui porte ce programme, Jean-Luc Mélenchon, fait office de grand favori à gauche pour 2022, et se trouve même aux portes du second tour selon plusieurs récents sondages. Les insoumis viennent en effet d’attirer à eux plus de 200 nouveaux visages figures de la lutte dans le champ associatif, syndical, artistique, intellectuel et politique. Et cerise sur le gâteau, le pouvoir d’achat sera la priorité absolue des Français pour déterminer leur vote en 2022 selon une récente étude Odoxa, loin, très loin devant l’obsession identitaire de la droite et de l’extrême-droite.
Loin de la diversion identitaire, un mouvement de grève pour l’augmentation des salaires est en cours dans tout le pays. Loin de la zemmourisation médiatique, la priorité absolue des Français est le pouvoir d’achat. L’inflation a ravivé la lutte des classes ? Réponse en 2022. Les mesures radicales en faveur du partage des richesses, de la bifurcation écologique et de la 6ème République sont en tout cas ultra majoritaires dans le pays. La dynamique de l’Union populaire se fait ressentir dans les sondages et le seuil du second tour avec les divisions des voix de la droite et de l’extrême-droite, semble plus que jamais à portée de main pour le favori de la gauche. Il reste 4 mois pour convaincre. Nous n’avons plus 5 ans à perdre.
Par Pierre Joigneaux.