Ce vendredi 3 décembre 2021, Jean-Luc Mélenchon était l’invité de Jean-Jacques Bourdin sur RMC et BMTV. En forme olympique, le favori de la gauche pour 2022, qui vient d’enregistrer deux renforts deux poids ce vendredi matin, Aurélie Troué, à la tête de l’association Attac pendant 11 ans et figure des mouvements sociaux, et Thomas Portes, ex-porte parole de la campagne de Sandrine Rousseau et président de l’Observatoire de l’extrême-droite, a lancé un appel à l’union populaire.
Le leader des insoumis a dressé un constat : l’inflation a ranimé la lutte des classes dans le pays. La lutte des classes ?! On imagine les éditorialistes s’évanouir sur les chaînes d’information en continu. Les chars russes aux portes de Paris. Pourtant, on ne peut pas enlever un mérite à Jean-Luc Mélenchon : celui de ramener, à chacune de ses interventions, la réalité de la crise sociale qui fracasse le pays sur le devant de la scène.
La question sociale a en effet été réduite à peau de chagrin dans le champ médiatique. Et c’est un euphémisme. Le temps d’antenne consacré aux questions sociales a en effet été divisé par deux en un an, passant de 20% en 2019, à seulement 10% en 2020. Pourtant, c’est peu de dire que la question sociale n’a pas disparue : 4 millions de personnes ont basculé dans la pauvreté en 2 ans de crise sanitaire, 8 millions de personnes ont besoin de l’aide alimentaire pour bouffer, nos étudiants font des files d’attentes interminables pour se nourrir, 1 Français sur 3 n’est pas partie en vacances ni même un seul weekend cette année, 38 millions de Français survivent avec 55 euros dès le 10 du mois…
Le pouvoir d’achat est la priorité absolue des Français pour 2022, selon un sondage odoxa publié ce lundi, mais passé étrangement sous les radars médiatiques. Ce sondage révèle que pour 45% des Français ce sera la question du pouvoir d’achat qui déterminera leur vote à la présidentielle. La santé arrive ensuite à 30%. L’identité nationale, qui obsède tant Éric Zemmour et Vincent Bolloré qui l’impose comme thème central de cette campagne présidentielle, n’est cité comme priorité que par… 10% des Français.
Face à l’inflation, l’explosion du prix de l’essence, de l’énergie, des produits de première nécessité, c’est bien le pouvoir d’achat, la survie quotidienne qui préoccupe les Français. Et face à ces conditions matérielles d’existences de plus en plus insoutenables, la lutte des classes reprend un peu partout dans le pays : la Guadeloupe et la Martinique sont en grève générale, les salariés de Leroy Merlin viennent d’obtenir l’augmentation de leurs salaires, après avoir bloqué plus de 70 magasins à travers le pays, les salariés de la fonderie de la SAM occupent actuellement leur usine…
Mais pourquoi les classes populaires se sont-elles éloignés de la gauche, demande Jean-Jacques Bourdin au favori de la gauche pour cette présidentielle ? « La gauche, ce qu’on a appelé la gauche, s’est terminée en eau de boudin avec du Hollande. C’était plus rien, ça ne voulait plus rien dire, ça n’apportait plus rien à la condition ouvrière ». Puis le Parti socialiste (PS), a enfanté un certain Emmanuel Macron, ministre de l’économie de François Hollande, qui a radicalisé encore un peu le néolibéralisme durant ce quinquennat, mettant l’État encore un peu plus au service du capital dans sa démolition du travail.
Face à la crise sociale étranglant les classes populaires, Jean-Luc Mélenchon a rappelé qu’il portait des mesures d’urgences sociales : SMIC à 1400 euros net, RSA étendu aux moins de 25 ans, blocage des prix sur les produits de premières nécessités, retraite à 60 ans, garantie d’emploi, allocation d’autonomie de 1063 euros pour que personne ne vive sous le seuil de pauvreté… Des mesures majoritaires dans le pays !
Des mesures de justice sociales exigées pendant de longs mois par le mouvement des gilets jaunes et celui des retraites, les deux plus longs mouvements sociaux en France depuis mai 1968. Et Jean-Luc Mélenchon a souligné ce qui est en train de se passer dans le pays, loin des radars médiatiques : des secteurs où on pensait qu’il n’y aurait jamais grève, la grande distribution, le commerce, et des entreprises qui se mettent en mouvement pour la première fois comme la fonderie de la SAM dans l’Aveyron où les salariés occupent l’usine et déversent du métal sur la route. Loin des médias, après de longs mois de confinements, la lutte reprend aux quatre coins du pays.
« L’inflation a ranimé la lutte des classes. Les gens se sont dit : « ah non, on n’avait déjà pas les moyens d’avoir une paye correcte, et en plus, maintenant, l’inflation vient nous manger ce qui nous permettait de tenir la tête hors de l’eau ? Vous n’avez pas fini d’en voir, parce qu’avoir cru que le peuple subirait tout en fermant sa bouche, c’est une illusion. Il faut, à un moment donné, partager. C’est ce que je vais dire dimanche (à l’occasion de son meeting à la Défense NDLR) : maintenant, c’est l’heure du peuple. Il y en a qui se sont gavés pendant 20 ans. Maintenant, c’est le tour des autres de prendre un peu et de recevoir la part qu’ils méritent parce que c’est eux qui font tout tourner dans ce pays ».
Face à la crise sociale qui ravage le pays, alors que la lutte reprend, que le pouvoir d’achat est la préoccupation principale des Français pour 2022, à quand le retour du mouvement des gilets jaunes et de la question de la justice sociale et du partage des richesses, au cœur de cette campagne présidentielle ?
Par Pierre Joigneaux.