La déclaration est passée inaperçue. Et pourtant, Philippe Olivier, conseiller spécial de Marine Le Pen, a lâché une véritable bombe médiatique dans les colonnes du Monde : « L’islam est incompatible avec la République, blablabla… Et alors, on pourchasse les musulmans ? On fait la Saint-Barthélémy ? Les bonnes idées se heurtent à la réalité et à la loi ». Rien que ça.
Une Saint-Barthélémy des musulmans, une « bonne idée ». Voilà où on en est en France en 2021. Voilà le résultat de la zemmourisation médiatique, de l’extrême droitisation du champ politique : un conseiller politique de la candidate en tête des sondages se sent autorisé à lâcher une telle énormité. Pour rappel, le massacre de la Saint-Barthélémy, perpétré le 24 août 1572, a tué entre 10 000 et 30 000 protestants dans notre pays.
Cette déclaration est à inscrire dans un contexte de zemmourisation du champ médiatique et politique que dénonce l’insoumission depuis de longs mois. Éric Zemmour, condamné à trois reprises pour incitation à la haine par la justice, et à deux reprises pour incitation à la haine envers les musulmans, continue de déverser sa haine tours les jours en direct entre 19h et 20h sur Cnews devant près d’un million de spectateurs.
La gravité de cette déclaration d’un des très proches de Marine Le Pen, qui devrait entraîner d’immédiates poursuites judiciaires, est bien le résultat d’un sentiment d’impunité qui s’est développé ces derniers mois dans la fachosphère. La parole se libère. L’extrême droite est en roue libre.
Et quand l’intégralité des associations, syndicats et collectifs antiracistes défilent dans plus de 130 villes du pays à l’appel de La France insoumise (LFI) pour dénoncer l’explosion des idées d’extrême droite en France, la grande majorité des médias regardent ailleurs. La bête immonde est belle et bien réveillée, et sort de terre de partout. Il serait temps d’ouvrir les yeux.
Pendant de longs mois la quasi intégralité du champ politique et médiatique a préféré s’attaquer à un « islamogauchisme » imaginaire. Peu importe que le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et la Conférence des présidents d’université (CPU) aient démontré que l’« islamogauchisme » n’a aucun fondement scientifique. Les différents ministres (Vidal, Blanquer, Darmanin, Schiappa…) ont repris le vocabulaire de l’extrême droite et ont préféré s’attaquer à Jean-Luc Mélenchon plutôt qu’à Marine Le Pen, nombre d’éditorialistes leur emboitant le pas.
Il serait donc grand temps de se réveiller et de ne plus se tromper de cible. L’extrême droite menace la République.
Par Pierre Joigneaux.