Aide aux jeunes diplômés : attention, arnaque du Gouvernement

Elisabeth Borne vient d’annoncer une nouvelle aide de quatre mois pour les jeunes diplômés. En réalité, la ministre a simplement proposé une version très édulcorée de l’ARPE, une aide financière que le Gouvernement a supprimé en 2019.

Macron ressuscite 70 % de l’Aide à la recherche du premier emploi (ARPE)

« Je voudrais dire à tous les jeunes diplômés qui sont en recherche d’emploi et qui étaient boursiers au titre de l’année universitaire 2019-2020 qu’ils ont droit à une aide de quatre mois […] ils toucheront 70 % du montant de leur bourse et 100 € s’ils n’habitent plus chez leurs parents » a expliqué Elisabeth Borne au micro de France Bleu Paris.

Cette annonce a l’air neuve, mais c’est du vieux. Pire, ce n’est que le rétablissement très partiel de ce que le Gouvernement a supprimé : l’Aide à la Recherche du Premier Emploi. L’ARPE, c’était le fruit de la négociation entre l’ex-Premier ministre Manuel Valls et les organisations étudiantes durant la contestation contre la loi Travail de 2016. Imparfaite, elle permettait aux ex-étudiants boursiers de percevoir la totalité de leurs bourses quatre mois après la fin de leurs études.

Sa suppression a été tellement discrète que même la Conférence des présidents d’Université n’était pas au courant, et a demandé en 2020 son allongement à huit mois. C’est durant l’étude du Projet de loi de Finances 2019 que les macronistes ont décidé de sa suppression, sans aucun bruit. La fin de ce dispositif a mis les jeunes de moins de 25 ans… à poil. C’était la dernière aide dont ils pouvaient bénéficier. Depuis, plus rien.

Entre 72 et 397 € d’aide : une pluie de miettes sur une jeunesse qui souffre

Que le gouvernement rétablisse un dispostif qu’il avait lui même supprimé pourrait prêter à sourire. Seulement, la détresse dans laquelle se retrouvent les jeunes ne peut être compensée par des dizaines d’euros. Avec cette version allégée de l’ARPE, les fraichement diplômés toucheront donc 70 % de leur bourse, dans la limite de 500 € maximum.

Les bourses s’étendent de 103,20 à 567,90 €. Ainsi, le plus précaire des néo-diplômés pourra percevoir au maximum 397,53 € ! Alors, un jeune diplômé devrait vivre avec cette somme, en sachant que dans beaucoup de villes, les loyers après la déduction de l’APL, ne passent que très rarement sous les 250-300 € mensuels. Elisabeth Borne estime donc que l’on peut vivre avec 97 €.

« La moitié des bénéficiaires a moins de 25 ans » P. Blanc, président des restos du cœur

97 €, c’est en temps normal. Mais nous ne sommes pas en temps normal. Les files d’attentes devant les services d’aides alimentaires pour jeunes s’allongent.

Les jeunes ont été les plus touchés par la crise sanitaire. Selon le Conseil d’analyse économique rattaché à Matignon, ils ont perdu entre 5 et 10% de leurs revenus contre 0,5% pour le reste de la société1. Cela se traduit par des privations importantes, comme a pu le relever une enquête d’Elabe2 : 50 % des jeunes ont réduit leurs dépenses alimentaires ou déjà sauté des repas pour des raisons financières. 42 % d’entre eux déclarent avoir du mal à finir le mois.

Enfin, cette crise semble s’inscrire dans la durée. La date limite de quatre mois est donc complètement déconnectée de la réalité de la situation économique. Alors que les diplômés Bac+5 sont environ 75% a trouvé du travail dans les six mois suivant la fin de leurs études, cette année presque 50 % sont encore au chômage3 !

Ainsi, personne ne peut sérieusement croire que 397 € suffiront à aider les jeunes en difficulté, tout comme personne ne croît que d’ici quatre mois la crise économique sera passée. Personne, sauf Emmanuel Macron et Elisabeth Borne.

Il faut penser sur le temps long et ouvrir le RSA aux moins de 25 ans

« A 18 ans ce qu’on veut c’est trouver un travail. » dixit Bruno Le Maire, étudiant jusqu’à ses 29 ans. Au-delà des petites phrases et des polémiques, il est temps de mettre fin à cette politique d’exception contre la jeunesse. Si a 18 ans on a la majorité pénale et la majorité électorale, c’est un non-sens que de ne pas avoir accès à la majorité sociale, et donc, aux minimas sociaux.

Le RSA n’est un idéal pour personne. Cependant, cela sera déjà bien au-dessus de tout ce qu’ont pu proposer les membres du Gouvernement, et permettra sans doute à des milliers de jeunes de sortir au moins le nez de l’eau.

A l’image de ce qu’a proposé la France insoumise en avril dernier, le Gouvernement doit penser un autre projet pour la jeunesse, que ce soit par la création d’emplois ayant du sens, comme la création d’une allocation d’autonomie et d’indépendance.

Par Damien Maudet.