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Assurance-chômage : ce que contient la dernière réforme sanglante de Macron

Voilà déjà la 5ᵉ réforme de l’assurance-chômage concoctée par le camp présidentiel depuis 2017. Baisse de la durée et du montant d’indemnisation, durcissement des conditions d’éligibilité, un gouvernement souhaitant faire des économies sur le dos des chômeurs, en anticipant une ponction des excédents de l’Unédic. Tout un programme ! Une réforme qui frappera notamment les jeunes de moins de 25 ans et les personnes gagnant moins de 1400 euros, d’après… la propre analyse de l’Unédic.

Pour rappel, il n’existe aucune étude qui laisse penser que les atteintes constantes aux droits des demandeurs d’emplois aient, fût-ce marginalement, dopé leur volonté ou leur capacité à trouver un emploi. Pire, le taux de retour à l’emploi des allocataires soumis à la dégressivité de l’allocation, à la suite de la réforme de 2019, est plus faible que celui des autres allocataires. D’autant que… 57% des chômeurs ne sont pas indemnisés.

L’élément principal de la réforme : le passage à 8 ou 9 mois le temps travaillé ouvrant droit à indemnisation, tout en réduisant à 20 mois la période de référence sur laquelle est fait ce calcul. Actuellement, il faut avoir travaillé 6 mois sur une période de 24 mois pour être indemnisé. Une réforme « inefficace, injustifiée et injuste », a résumé Manon Aubry, tête de liste de LFI pour les élections européennes du 9 juin. Notre article.

Assurance-chômage : jusqu’où s’arrêtera cette traque aux chômeurs menée par le camp présidentiel ?

Reprenons les bases. La réforme voulue par Macron et Attal est la 5ᵉ réforme touchant à l’assurance-chômage. En 2018, Emmanuel Macron fait le choix radical de supprimer purement et simplement le caractère assurantiel de l’assurance-chômage. Dès lors, l’assurance-chômage s’est transformée en un octroi d’État, plutôt qu’en une assurance due grâce aux cotisations de chacun.

Dans sa Loi du 21 décembre 2022 portant sur les « mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi », le gouvernement a mis en place le principe de « contracyclité ». Un principe de racket d’un nouveau genre, dépendant d’un arrêté ministériel : à conjoncture plus favorable, moins d’indemnisation, à conjoncture plus favorable, davantage d’indemnisation. Depuis le 1ᵉʳ février 2023, celle-ci est diminuée de 25% lorsque le taux de chômage est inférieur à 9% ou qu’il ne progresse pas de plus de 0,8 point sur un trimestre.

Dans le même temps, le Gouvernement a durci les conditions d’indemnisation du chômage, comme le rappelle l’économiste Michaël Zemmour. Si en 2021, 4 mois travaillés sur 28 suffisaient à être indemnisés, ce n’était plus que 6 mois d’emploi sur les 24 derniers mois à la fin de la même année. Avec la dernière réforme voulue par l’exécutif, il faudra avoir travaillé au moins 8 mois les 20 derniers mois pour avoir droit à l’allocation-chômage. Pire qu’avant, si le taux de chômage est inférieur à 6,5%, la durée d’indemnisation baisse d’au moins 25% de plus.

D’ailleurs, à l’automne, deux services clés du ministère du Travail mettaient en garde contre un durcissement des règles de l’assurance-chômage. « La conjoncture incertaine du marché du travail n’appelle pas un durcissement immédiat des conditions d’indemnisation […] Il paraît dès lors complexe de justifier un tel durcissement dans un contexte de chômage stagnant ou en légère hausse », insistait la note, alertant sur « une faible acceptabilité politique et sociale ».

Avec cette réforme, les seniors seront encore plus pauvres, comme le démontre le député LFI et sociologue Hadrien Clouet. En effet, la durée d’indemnisation au chômage dépend de l’âge. Aujourd’hui, c’est 18 mois si on a moins de 53 ans, 22,5 mois si on a plus de 53 ans et 27 mois si on a plus de 55 ans. Avec la réforme, les moins de 53 ans seront indemnisés moins de 18 mois, les plus de 55 ans, 22,5 mois et les plus de 57 ans, 27 mois.

L’Unédic a anticipé les annonces gouvernementales en produisant une analyse, dans une étude d’impact présentée le 17 mai à ses administrateurs et détaillée dans différents médias. Les différents scénarios, comme la baisse de la durée d’indemnisation si 8 mois sur 20 sont travaillés, pénaliseront davantage les jeunes de moins de 25 ans, les personnes gagnant moins de 1 400 euros brut par mois et les personnes sortant de contrats précaires (CDD, intérim).

Macron et Attal font raquer les plus pauvres pour satisfaire les exigences de Bruxelles

Faire raquer les plus pauvres pour satisfaire Bruxelles et ses exigences d’austérité, voilà le projet du camp présidentiel. Casser les droits des chômeurs, pour augmenter les recettes de l’Unédic, pour après piocher dans les comptes de l’Unédic déjà dans le vert, parce que le gouvernement a fait un nombre inconsidéré de cadeaux aux ultra-riches. Sacré programmé, n’est-ce pas ?

Le pire, c’est que le Premier ministre Attal est fier de porter une telle réforme. Même le JDD, désormais propriété du milliardaire d’extrême droite Vincent Bolloré, l’avait interrogé ainsi : a-t-il conscience de prendre le risque de « réveiller la colère sociale » en menant une telle réforme. « Oui, et ? », répond avec aplomb le Premier ministre. Gabriel Attal est fier de mener une énième offensive sanglante contre le salariat.

Pour aller plus loin : « Oui, et ? » : Attal fier de s’attaquer à l’assurance-chômage une nouvelle fois

Pour satisfaire les exigences de Bruxelles en matière d’austérité, hors de question de faire payer les plus riches. Par contre, des économies sur le dos des chômeurs, c’est tout de suite plus acceptable pour le pouvoir. Protéger les ultra-riches, accabler les plus précaires : le macronisme économique est fidèle à lui-même.

Manon Aubry, candidate de LFI aux élections du 9 juin, a conspué cette réforme sanglante pas plus tard qu’hier soir sur le plateau de CNEWS. « Inefficace », « injustifiée » et « injuste », résume-t-elle. « Il y a un tiers des chômeurs qui risquent, en plus de ce qu’il y avait avant, de ne plus être indemnisés, d’être pénalisés. Sachant, qu’aujourd’hui, 40% des chômeurs sont indemnisés, c’était 70% en 2008. Je le dis au président de la République […], ce n’est pas en rendant plus pauvres et en précarisant encore plus les chômeurs que vous allez créer de l’emploi dans notre pays ! », a souligné la tête de liste insoumise.

Plus largement, lors d’une audition avec la CFDT, elle a fustigé le « grand retour en Europe » de l’austérité : « Pour la France, c’est au moins 20 milliards d’euros par an de coupes budgétaires et des réformes injustes comme celle de l’assurance-chômage. Une opposition à l’austérité, sur laquelle les insoumis ne comptent rien lâcher, tandis qu’Emmanuel Macron et Gabriel Attal préfèrent faire raquer les plus précaires plutôt que ceux qui se gavent. Plutôt que de s’en prendre aux pauvres, taxons les riches et les super-profits ! », a déclaré Manon Aubry. Le 9 juin, chacun aura l’occasion de voter et de faire front contre un macronisme, à la fois attalisé et lepénisé.

Par Nadim Février

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