Marine le pen députés RN retraite
Marine LE PEN Assemblée nationale, 8 octobre 2019.

« C’est un fiasco total » – Le RN se fissure après sa fausse proposition d’abrogation de la réforme des retraites

RN. Déjà affaibli par son vote contre la destitution d’Emmanuel Macron et contre la censure de Michel Barnier, le parti d’extrême droite affronte une série de turbulences à l’Assemblée nationale. Ce jeudi, jour de leur niche parlementaire, censée être l’une des journées les plus capitales du parti dans l’hémicycle, a viré au désastre. De 9h à 17, les députés lepénistes ont défendu 24 amendements qui n’étaient autre que…des demandes de rapport ! Comprendre : des amendements paillettes pour demander au Gouvernement de présenter des rapports au Parlement. « C’est un fiasco total », observe un commentateur en sortie d’hémicycle.

Poussé dans ses retranchements, Marine Le Pen s’est dit favorable à un âge de départ à 66 ans… durant le propre examen du texte du Rassemblement national censé abroger la réforme des retraites à 64 ans. Sur les bancs, Eric Ciotti, recroquevillé, faisait grise mine. Et pour cause, cet allié du parti d’extrême droite défend la retraite à 67 ans. Autant de contradictions pointées par les escouades de députés LFI présents en nombre. « Le RN défendait la retraite à 65 ans en 2007, à 60 ans en 2012, à 62 ans en 2022, à 64 ans pendant les législatives de 2024 et désormais 66 ans ! Que les électeurs s’en souviennent ! » a taclé Manuel Bompard.

Après avoir voté contre l’abrogation de la réforme des retraites à 64 ans, à trois reprises la semaine dernière, le parti de Marine Le Pen a donc finalement lâché prise en avouant son véritable projet libéral. Au programme : retraite à 66 ans, et retraite à capitalisation ! Et bien sûr, refus de l’ISF et de tout principe de taxation des riches et des multinationales.

Le rapporteur du parti, Thomas Ménagé, a en effet donné un avis favorable à un amendement des LR qui proposait d’étudier la retraite par capitalisation, celle-là même qui a aboutit à la disparition de 2000 milliards de dollars du système de retraites nord-américain en 2007. Et pour cause, le principe étant d’une cotisation à une cagnotte gérée par des fonds d’investissement, les retraités sont vite balayés par les boursicoteurs agités. Notre brève.

RN : l’arnaque sociale de l’extrême droite a été dévoilée à l’Assemblée nationale une nouvelle fois

Pour aller plus loin : Abrogation de la réforme des retraites : Marine Le Pen et ses députés votent contre pour la troisième fois

https://twitter.com/L_insoumission/status/1851908859306131632

L’arnaque sociale du RN sur la retraite, toute une histoire

La proposition du RN devait être « un piège » qui créerait un « embarras » aux dires de
certains commentateurs politiques et médiatiques L’élément de langage de « l’embarras pour la gauche » a saturé toutes les salles de rédaction reprenant, comme à l’habitude, le même réflexe de classe les ayant amené à gonfler à l’hélium le RN lors des précédentes campagnes électorales. Alors, il y a t-il eu embarras ? Bien au contraire. Par un travail d’archéologie préventive, de veille sur les votes du RN, et de fouille méticuleuse sur la proposition du RN, les députés insoumis auront réussi à faire toute la lumière sur l’arnaque en bande organisée de Marine Le Pen et Jordan Bardella.

Dès le mardi 22 octobre, la veille de l’examen de leur proposition en commission des affaires sociales, les turbulences ont commencé pour les troupes de Marine Le Pen et Jordan Bardella. Leurs députés ont voté en cadence contre…l’abrogation de la réforme des retraites . Première clarification. Le lendemain, jour de l’examen de leur propre texte, ces mêmes députés ont réussi à l’exploit à… votre contre la proposition d’abrogation de la réforme en commission des finances, et ce, à la même heure ! Deuxième clarification.

Les raisons ? Il existe deux clés de compréhensions principales. La première est que le RN n’a jamais eu l’intention d’abroger réellement la réforme des retraites conformément à son programme économique libérale. Ce dernier n’a jamais été un secret. Le 3 mars 2017, lors d’une « conférence présidentielle », Marine Le Pen déclarait ainsi : « Le marché, la concurrence, l’entreprise, le capital, l’impôt même, peuvent être les moyens du bonheur français s’ils sont au service de l’intérêt national« .

L’autre preuve de taille dans l’absence d’intentionnalité d’abroger la réforme des retraites sort de la bouche même de Jordan Bardella. En juin 2024, se sentant pousser des ailes par les sondages et s’imaginant déjà franchir le seuil de Matignon, le chef du parti lepéniste a fait machine arrière toute sur un ensemble de mesures sociales destinées à convaincre des bases populaires de voter pour eux.

Aux portes du pouvoir, le RN n’en a alors plus besoin et se concentre à donner des gages à ses amis détenteurs de capitaux. Ainsi, en juin 2024, interrogé par le Parisien quant à l’abrogation de la réforme des retraites, Jordan Bardella répondait un « Nous verrons ». La messe est dite. Plus flagrant encore, quelques semaines plus tôt, il n’hésitait pas à défendre la retraite à 66 ans lors d’un débat entre têtes de listes pour les élections européennes. Marine Le Pen l’a par ailleurs confirmé ce jour dans les débats au sein de l’hémicycle de l’Assemblée nationale.

https://twitter.com/L_insoumission/status/1851957328884453382

Le revirement de juin 2024 ne date pas d’hier. Ils sont fréquents chez les lepénistes redoublant de toujours plus de mensonges et d’hypocrisie pour parvenir à leurs fins. En 2007, Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen se prononçaient pour la retraite à 65 ans avant de passer à leur fausse proposition de retraite à 60 ans, « en entretenant, tant sur le nombre d’annuités que sur l’âge réel de départ, un flou artistique » avait précisé la députée LFI Gabrielle Cathala qui intervenait mercredi dernier pour répondre au RN en commission des affaires sociales. Le RN n’en est pas à sa première improvisation, finissant en catastrophe s’agissant des retraites.

Déjà, le vernis social du parti s’était craquelé lors de la dernière campagne présidentielle. Marine Le Pen avait alors abandonné sa promesse de retour à la retraite à 60 ans pour tous pour la réserver à ceux qui ont commencé à travailler tôt, entre 17 et 20 ans. Pour tous les autres, la retraite à taux plein ne serait accessible qu’entre 62 et 67 ans, au bout de 42 ou 43 annuités.

Lors des mobilisations contre la réforme des retraites à 64 ans et le vol de deux ans de vie décidé par Emmanuel Macron, là aussi, le mensonge du RN sur le volet soi-disant « social » de son programme avait volé en éclats. Alors que la plus grande mobilisation depuis mai 68 enflammait les rues de France, avec 93 % des actifs opposés à la réforme, que faisait Marine Le Pen ? Elle donnait instruction à ses troupes de tenir une ligne précise visant à fustiger les syndicats. Et bien sûr, les lepénistes se gardaient bien de descendre dans la rue.

Ainsi, le 17 janvier 2023, le porte-parole du RN déclarait : « Tous les syndicats, quels qu’ils soient, sont rouges devant et Macron derrière. Ils ont tous participé à l’élection d’Emmanuel Macron en faisant barrage à Marine Le Pen. ». Emmanuel Macron met le feu au pays en volant deux ans de vie aux Français, et le RN montre au grand jour son arnaque, brillant par son absence lors des grandes mobilisations populaires visant à faire plier le forcené de l’Élysée.

L’alliance de Macron / Le Pen contre les retraités

Pour comprendre la séquence actuelle, il importe de remonter à son point d’origine. Le 7 juillet, le soleil se lève à 20 heures par la victoire du Nouveau Front Populaire aux élections législatives. Pour le RN, l’heure à la gueule de bois après s’être saoulée de communiqués de victoires, dopées par la propre propagande médiatique à leur égard. Pour Emmanuel Macron, la défaite est cuisante. Reste une option : s’allier au RN pour nommer un Premier ministre qui soit tout sauf Lucie Castets, la candidate désignée par toutes les formations du NFP.

Jeudi 5 septembre, le nom de Thierry Solère apparait sur le téléphone de Marine Le Pen. Il est l’agent de liaison qui fait asseoir Marine Le Pen, Jordan Bardella, Édouard Philippe et Sébastien Lecornu autour d’une même table. D’après les propres révélations du torchon JDD, Macron et Le Pen ont ainsi « orchestré la nomination de Michel Barnier à Matignon ». Le deal est simple. Marine Le Pen utilisera Barnier comme un pantin, en l’usant jusqu’à la corde, pour faire passer ses propositions racistes au Gouvernement.

En cas de refus d’obtempérer, c’est la censure. Les preuves du deal sont légion. Certaines sont particulièrement éloquentes. Le 24 septembre, en bon berger allemand, Michel Barnier appelait Marine Le Pen pour s’excuser après le refus de son ministre de l’Économie, Antoine Armand, de recevoir des élus RN pour établir le budget 2025.

Refus de la destitution d’Emmanuel Macron – Le RN valide la retraite à 64 ans

Pour la même raison, liée à ce deal, Marine Le Pen a sauvé Emmanuel Macron de la
destitution, pourtant inventeur de la réforme des retraites. Le
8 octobre, à l’Assemblée nationale, Marine Le Pen s’est donc abstenue à l’Assemblée
nationale au sujet de l’examen de la motion de destitution de Macron défendue par
LFI. La motion n’a donc pas été examinée, et la décision du RN a sauvé in extremis
Emmanuel Macron tout en donnant de sérieux et durables vertiges aux 70 % des
électeurs du RN se déclarant favorables à la destitution d’un Président minoritaire et illégitime.

Pour aller plus loin : Censure, destitution, budget – Comment le RN multiplie les opérations de sauvetage de Macron

Refus de la censure de Barnier – Le RN valide le gel des pensions des retraités

Quant à Barnier, le topo est similaire. Le RN a refusé de voter la censure, prétextant un risque de « chaos » pour préférer soutenir un Gouvernement et les mesures qu’il porte : la retraite à 64 ans, la hausse des factures d’électricité et de gaz, les 150 euros de pensions en moins pour les retraités par le gel de l’indexation des pensions sur l’inflation.

En refusant de censurer le Gouvernement de Michel Barnier, le RN a acté cet ensemble de mesures qui pèseront sur l’ensemble des Français, et notamment les deux millions de retraités vivant sous le seuil de pauvreté en ce qui concerne le gel des pensions. Intervient alors les plans de com’ en série pour faire semblant de s’opposer à Michel Barnier et Emmanuel Macron dans l’objectif d’équilibriste, pour le RN, de faire tenir sa barque. Un numéro qui, dans la durée, est intenable et finira par une explosion en bonne et due forme.

Les votes du RN systématiquement contre l’abrogation de la réforme des retraites : la brèche est devenue un canyon

Affaibli par son pacte révélé au grand jour avec Emmanuel Macron, le RN a cherché
désespérément à donner une nouvelle couche à son vernis social craquelé de toutes
parts. Car, comme le rappelle Jean-Luc Mélenchon dans une note de blog appelant à
ne pas prendre part à l’arnaque du RN : « Pour la première fois depuis longtemps, il y
a une brèche ouverte où le parti d’extrême droite est en difficulté sur ses bases
populaires
 ».

La proposition d’abrogation de la réforme des retraites répondait à cet objectif
politique. Mais lorsqu’il s’agit de faire cotiser les plus riches, le RN ne peut s’empêcher
de venir à leur rescousse et fait ainsi tomber ses propres masques. Ainsi, la veille de
l’examen de leur proposition en commission des affaires sociales, les députés du RN
votaient en cadence contre un amendement insoumis visant à abroger la réforme des
retraites.

Pire, le jour même de l’examen de leur texte, les députés de Marine Le Pen
votaient aussi contre cette abrogation, en commission des finances. Deux salles, deux
ambiances, deux mensonges. Le lendemain, belote et rebelote : le RN vote contre un
amendement d’abrogation de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale. Le
constat est sans appel. Le RN n’a jamais eu l’intention d’abroger la réforme des
retraites.

Un texte d’abrogation calamiteux digne du programme économique du RN

Pour comprendre l’arnaque du RN sur les retraites, rien n’est plus efficace que fouiller de fond en comble le texte en lui-même. Dans l’exposé des motifs de la proposition RN, on lit ainsi : « Ces choix politiques pourront être effectués lorsque le Rassemblement National accédera au pouvoir et sera en mesure de mettre en place la réforme globale qu’il propose depuis plusieurs années ».

Comprendre : le financement de la proposition est conditionné à l’accession du RN au pouvoir en 2027. Si le RN sèche sur la réponse du financement, personne n’est dupe sur les solutions de financement prévues par le parti lepéniste. L’un des axes de leur programme économiques est la suppression des cotisations, et donc le fait de ponctionner le salaire brut pour augmenter le salaire net. Sauf que derrière c’est le brut, il s’agit des cotisations sociales pour payer les pensions. Cette proposition n’est donc rien d’autre que la liquidation assumée et programmée de la Sécurité sociale.

https://twitter.com/L_insoumission/status/1852009065519431809

Alors comment sera financé leur réforme ? Par l’impôt ! Mais pas touche aux plus grands capitaux ! Les plus riches pourront dormir sur leurs deux oreilles. Le RN vote en effet systématiquement avec les macronistes contre le rétablissement de l’impôt sur la fortune, comme ce vendredi 25 octobre à l’Assemblée nationale. De même qu’ils votent contre la taxation des superprofits, des super-dividendes et autres mesures de justice fiscale que commande l’urgence sociale.

Autre absurdité révélée dans les débats ce jour, la faveur du RN pour la retraite par capitalisation après que le rapporteur RN ait donné un avis favorable à un amendement LR proposant d’étudier la retraite par capitalisation, celle-là même qui a aboutit à la disparition de 2000 milliards de dollars du système de retraites nord-américain en 2007. Et pour cause, le principe étant d’une cotisation à une cagnotte gérée par des fonds d’investissement, les retraités sont vite balayés par les boursicoteurs agités.

https://twitter.com/L_insoumission/status/1852008173797793873

Et si l’on fouille d’encore plus près, en scrutant le rapport rédigé en appuie de la proposition du RN, les arguments pour la démolir ne manquent pas. On lit ainsi, au rang des « réformes » prévues par le parti lepéniste pour financer la mesure, la question d’une hausse de la natalité et le rehaussement du taux d’emploi et découper en tranches de salami la sécurité sociale.

Sur la partie relative à la natalité, le RN est à deux doigts de plaider pour le « réarmement démographique » voulu par Emmanuel Macron. En commission des finances, le député Hadrien Clouet a bien noté l’absurdité de la mesure : « Vous expliquez que la proposition sera payée par la natalité. Vos amis en Pologne et en Hongrie interdisent l’IVG. Mais imaginons même que la natalité augmente, l’argent ne sera pas immédiat. Les enfants n’iront pas au travail à 5 ou 6 ans… ».

Quant au taux d’emploi, le rapport produit par le RN démontre bien la supercherie massive de leur proposition libérale. Le RN plaide pour « rehausser le taux d’emploi, en particulier des plus âgés » , et plus spécifiquement pour les personnes âgés « entre 60 et 64 ans ». La messe est dite. Tout le trucage de la proposition est révélé en ces lignes. En public, défendre l’abrogation de la réforme des retraites à 64 ans mais en coulisses, faire travailler davantage les personnes âgées jusqu’à…64 ans !

Autre absurdité écrite noir sur le blanc dans le rapport parlementaire du RN : le financement de la proposition en réduisant « le cout de gestion [de la sécurité sociale] aux alentours de 1% des prestations services ». Et derrière ces frais de gestion présentés en mammouth alors qu’ils ne représentent, du propre aveu du RN, qu’un petit pourcent, c’est le service public qui est assuré et l’ensemble des actions nécessaires pour accueillir et renseigner les citoyens, recouvrer les cotisations, les recettes, assurer le versement des allocations etc..

LFI renforcée dans sa position de seul mouvement à défendre réellement l’abrogation de la réforme des retraites

Au total, la seule proposition valide et cohérente est celle portée par les insoumis depuis des années : la retraite à 60 ans pour tous, et donc l’abrogation sans délais de la réforme des retraites à 64 ans. Les insoumis ont inscrit à l’ordre du jour de leur niche parlementaire, en top priorité, l’abrogation de cette réforme. A l’inverse du RN, les insoumis ont aussi un autre atout dans leur manche en plus de leur sincérité et de leur efficacité, celle des relais du NFP au Sénat permettant l’adoption effective de leur proposition d’abrogation de l’injuste et cruelle réforme des retraites. Rendez-vous le 28 novembre !