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Femme En Chemise Bleue Couchée Sur Un Lit D'hôpital, Pexels.

Psychiatrie : ces révélations chocs sur le centre hospitalier de Cadillac

Psychiatrie. La santé mentale est-elle en danger en France ? Oui : près d’un établissement psychiatrique sur quatre a fermé plus de 10% de ses capacités. Cadillac, en Gironde, ne fait pas exception. Manque de 50 à 60 postes, soit près de 10% du corps soignant, plusieurs services fermés depuis 2019, 25 arrêts maladies liés aux conditions de travail qui se dégradent, fermeture de la Polyclinique Médico-Psychologique de Bazas, fermeture de 19 lits de l’Unité pour Malade Difficile de l’unité « Moreau » : voilà une partie des nouvelles qui ont mis le feu aux poudres du personnel de santé.

Mardi 5 septembre 2023, les soignants en grève de l’hôpital psychiatrique de Cadillac se sont réunis dans une salle municipale pour lancer un cri d’alerte. Accompagnés par des syndicalistes de la CGT et FO, et en présence du député LFI-NUPES de Gironde Loïc Prud’homme, les soignants ont rappelé le danger : leur hôpital se détruit petit à petit depuis quatre ans. Notre article.

Une tendance nationale doublée d’une maltraitance locale

Dans le local syndical de la CGT CH Cadillac, Jocelyne Gout, la Secrétaire Générale du syndicat accueille avec quelques soignants Loïc Prud’homme et une poignée de militants de la France Insoumise Gironde venus prendre le pouls sur la situation de l’hôpital. Postes vacants, manque de tout, fermeture de lits et services, le tableau peint est sombre. « On a affaire à soit de l’incompétence, soit une volonté de destruction » indique Jocelyne.

Ce manque de personnels et de lits est un combat qui se fait sentir depuis plusieurs années. Déjà en 2017 et 2018, le secteur de la psychiatrie avait connu un grand mouvement de mobilisations avec le campement du collectif Pinel en Luttes devant l’hôpital psychiatrique d’Amiens et la lutte victorieuse des blouses noires du Rouvray à Rouen. Depuis 2013, le nombre de lits au niveau national est en baisse constante alors que la population ne cesse d’augmenter. Le secteur de la psychiatrie est abandonné.

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Sur l’unité Moreau, concernée par l’annonce de la fermeture de 19 lits, l’une des infirmières nous explique : « Le médecin est parti pour burn-out, le cadre de santé est parti pour burn-out, les collègues sont partis en burn-out ». La direction, principale mise en cause par les infirmiers, use en effet d’un paquet de stratagèmes pour épuiser les personnels et faire régner un climat de terreur.

« Ce sont plein de petites choses, mais par exemple ça fait 17 mois qu’ils ne nous ont pas payé le 1er mai », raconte l’une des soignantes. Des petites choses pouvant vite évoluer en menaces directes, comme l’a expliqué un autre soignant : « Un cadre de santé m’a dit : « Si vous sortez avec votre blouse pour faire la grève, c’est un abandon de poste » .

Privatiser la psychiatrie

Si l’hostilité de la direction est bien visible, il y a également l’absence de l’Agence Régionale de Santé qui interroge. En effet, plutôt que de s’inquiéter de la réduction de l’offre de soins psychiatriques sur l’ensemble d’un territoire, l’ARS de la Nouvelle-Aquitaine prône un « travail en réseau sur les différents hôpitaux psychiatriques (à Bordeaux et à Libourne) du territoire ». Une logique difficilement entendable lorsque certaines communes du plus grand département métropolitain seront à plus d’une heure de route du premier hôpital psychiatrique.

Cette vision managériale perd l’un des infirmiers : « Sur l’hôpital public, on a plus de vrais cadres de santé qui connaissent le métier. On a des managers, formés pour manager avec des tableurs Excel, et qui sont là pour nous dire « Je t’interdis de penser, nous réfléchissons à ce qu’il y a de mieux à mettre en place », c’est l’un de nos plus gros problèmes aujourd’hui ». Un autre, ébahit devant les choix de la direction, réfléchit à haute voix : « Je ne comprends pas, on ampute les membres sains de l’hôpital pour aller perfuser les unités malades ».

Mais ce qui inquiète le plus Jocelyne et les infirmiers de l’hôpital, c’est la privatisation de la psychiatrie. Tout comme pour l’hôpital public, des cliniques privées spécialisées en psychiatrie font leurs apparitions sur le territoire, comme les cliniques CLINEA, une filiale du groupe ORPEA.

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Une lutte qui paie

C’est donc contre cette destruction de l’hôpital de Cadillac que les infirmiers ont organisé le 5 septembre dernier une réunion publique où de nombreux élus ont été présents. Parmi ces derniers, le député LFI-NUPES de Gironde n’a pas hésité à rappeler son soutien à cette lutte et ses combats contre la fermeture d’un autre hôpital public girondin, l’hôpital Robert Picqué.

Plus de 60 personnes étaient rassemblées salle Ducros à Cadillac pour découvrir en détail la situation de l’hôpital girondin. De cette réunion, des propositions de mobilisations devant l’ARS ont été posées sur la table pour entériner définitivement ce projet de fermeture. Une mobilisation qui a aussi porté ses fruits puisque le conseil de surveillance a voté jeudi 7 Septembre le « gel de tous les projets de restructuration en cours dans l’établissement de santé ». La revendication portée par la CGT d’un moratoire sur l’état de l’hôpital a également été repris par le conseil. « C’est une satisfaction d’avoir été entendu mais pas encore une victoire », commente la déléguée CGT Jocelyne Goût, interrogée par Sud-Ouest.

Par Sacha André

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