Dimanche 26 février, 62 personnes, dont 14 enfants, ont trouvé la mort dans un naufrage en Méditerranée près de Crotone en Calabre, en Italie du sud. Qui porte la responsabilité de ces morts ? Le vent ? Les vagues ? L’implacable arithmétique qui va de l’un aux autres et fracasse les embarcations trop fragiles ? Non. Ces morts sont le résultat d’un choix politique. Celui de l’extrême droite qui veut dresser des murs. Celui de l’Union européenne de la compétition, trop lâche pour s’opposer aux racistes, trop lâche pour respecter son devoir d’humanité. L’Europe meurt en méditerranée. Notre article
Dimanche 26 février, une grande barque de bois remplie d’humains fuyant la guerre, la misère et le désespoir s’est fracassée sur les rochers non loin de Crotone, en Calabre, dans le sud de l’Italie. Bilan provisoire du massacre : 62 morts dont 14 enfants et un nouveau-né. Les pompiers et garde-côtes découvrent chaque heure de nouveaux corps sans vie, dispersés le long de la côte.
Mare Nostrum est devenue une mare de sang
Il restera pour toujours impossible de connaître le nombre exact de morts puisque personne ne sait combien il y avait d’humains à bord de l’embarcation partie de Turquie quatre jours plus tôt. La mer Méditerranée est pire qu’un cimetière. Pas de plaque, pas de commémoration. Aucune trace des victimes. C’est pour exprimer cette sombre réalité que François Thomas, président de SOS Méditerranée parle d’une « fosse commune ».
Une fosse commune de plus en plus pleine chaque jour. Selon le décompte de l’Organisation internationale pour les migrations, plus de 26 000 migrants ont disparu depuis 2014 en mer Méditarranée. Une chiffre qui n’est qu’une borne basse. La vérité a été engloutie par les poissons et les crustacés. Personne ne sait combien d’humains ont perdu la vie dans ce qui fut le berceau de la civilisation occidentale. La Mare Nostrum est devenue une Mare de sang.
Si personne ne peut dire combien de victimes, est-il possible de trouver les coupables de ces crimes ?
Est-ce le vent qui porte la responsabilité ? Les tempêtes terriblement imprévisibles de la Mer intérieure ? Est-ce la faute à l’implacable équation mathématiques qui change les bourrasques en puissantes vagues qui fracassent les frêles esquifs sur lesquels s’entassent un trop grand nombre d’exilés désespérés ?
Non. Le vent et la mer ne sont pour rien dans ce crime. Inexorables, ils suivent leur cours. L’humanité a depuis des millénaires les capacités techniques de naviguer sur la Méditerranée. Ce qui sème la mort, c’est un système politique. Les coupables sont ceux qui mettent en place ce système.
Augmenter le nombre de morts par noyade, le programme de l’extrême droite
Giorgia Meloni, leader du parti d’extrême droite, postfasciste et raciste Fratelli d’italia, cheffe du gouvernement italien a promis de réduire le nombre de migrants. Elle n’a aucun impact sur le nombre de départs, elle ne propose aucune solution contre la misère qui pousse ces gens à partir. Elle le sait très bien. L’extrême droite est une arnaque sociale.
Puisqu’elle ne peut rien faire pour réduire le nombre de gens qui partent et qu’elle veut réduire le nombre de gens qui arrivent, il ne reste plus qu’une solution : les supprimer en cours de route. Donc augmenter le nombre de morts par noyade lors de la traversée. Telle est l’unique réalité de la politique anti-immigration.
L’extrême droite pousse pour accroître la dangerosité de la traversée. Mais qui lui résiste ? Certainement pas les néolibéraux. Emmanuel Macron, Ursula Von der Leyen, de Bruxelles à l’Élysée, ces lâches se paient de mots ou de silence coupable quand les corps s’amoncellent sur les rivages méridionaux.
« Il faut reboubler d’efforts ? » Deux fois zéro, c’est toujours rien. Il faut au contraire revoir le système de fond en comble. Depuis des années, l’Union européenne se défausse de sa responsabilité, de son devoir d’humanité afin de ne pas se fâcher avec les racistes qui ont pris le pouvoir en Hongrie, en Pologne et maintenant en Italie. Aucun budget supplémentaire pour le sauvetage des vies humaines et le respect des conventions internationales sur le droit d’Asile.
Du côté de l’Élysée, aucune mention. Pas un message de compassion pour les victimes du 26 février. Jamais Emmanuel Macron n’a repris une seule mesure proposée par la France insoumise. Une mesure comme la création d’un corps européen civil de secours et de sauvetage en mer aurait pourtant peut-être permis de sauver ces 62 personnes. Non, rien. Uniquement la continuation de ce système mortifère.
Comment nommer les responsables de ces tragédies ? Il faut être capable de mettre des noms sur les choses, sur les actes. Tel est l’enseignement de Georges Orwell, si l’on ne peut les nommer, alors les crimes disparaissent.
Mais comme la tâche de sang sur la clef du comte de Barbe Bleue, celle des exilés ne cessent de grandir à chaque fois que les racistes tentent d’effacer leur trace.
Combien d’autres corps repêchés avant que les dirigeants des États européens ne prennent leur responsabilité, accomplissent ce devoir moral : permettre le sauvetage et l’accueil digne de tous les exilés ?
Chaque jour de perdu ensanglante un peu plus la Mer Méditerranée.
Par Ulysse Kummer