Désarroi au PS, au PCF et chez EELV après la manifestation des policiers

La participation d’Olivier Faure, Fabien Roussel et Yannick Jadot à la manifestation des policiers ce mercredi 19 mai, et les propos qui y ont été tenus, suscitent le désarroi à gauche. Notre article.

« La justice doit rendre des comptes » : la séparation des pouvoirs piétinée devant l’Assemblée nationale

« Un droit de regard de la police sur l’exécution des peines ». Une demande d’un syndicat policier d’extrême droite ? Non, ces mots sont ceux du premier secrétaire du Parti socialiste. La séparation des pouvoirs ? Aux oubliettes. Mais qu’Olivier Faure se rassure, il n’était visiblement pas le seul à l’avoir oubliée ce mercredi. Le secrétaire général du syndicat Alliance Police nationale allant jusqu’à déclarer : « Le problème de la police, c’est la justice. La justice doit rendre des comptes ».

Des propos tenus… devant l’Assemblée nationale. En présence du ministre de l’Intérieur. Le symbole est fort. La séparation entre le pouvoir exécutif, législatif et judiciaire piétinée. Montesquieu peut se retourner dans sa tombe s’il le veut, en 2021 c’est un syndicat policier d’extrême droite qui dicte à la justice la marche à suivre. Et l’exécutif et le législatif ont intérêt à marcher au pas. La menace n’est même plus dissimulée : « si cette mobilisation s’avère très forte, les digues cèderont, c’est-à-dire les contraintes de la Constitution et de la loi » déclare tranquillement un représentant d’Unité-SGP Police présent à la manifestation.

Désarroi chez les militants communistes, verts et socialistes après la participation de leurs représentants à la « manif de la honte »

Des syndicats de police qui menacent la République soutenue par l’extrême droite, présente en force à la manifestation, d’Éric Zemmour à Jordan Bardella, en passant par Jean Messiah et Philippe de Villiers, ne nous surprend même plus. La participation des représentants du Parti communiste français (PCF), du parti socialiste (PS) et d’Europe Écologie les Verts (EELV) a par contre indigné beaucoup de militants et de sympathisants de gauche, comme en témoignent les très nombreux commentaires sur les réseaux sociaux avec le hashtag #ManifDeLaHonte. Ces participations témoignent aussi des fractures internes au sein de ces trois partis.

Si Yannick Jadot, figure la plus médiatique des verts, s’est rendu à la manifestation, ce n’est pas le cas d’Éric Piolle et Sandrine Rousseau, les deux autres candidats à la primaire d’EELV. Fracture aussi du côté des communistes, chez qui la députée Elsa Faucillon a qualifié la participation du candidat communiste à cette manifestation aux côtés de l’extrême droite et du ministre de l’Intérieur de « lourde erreur politique ». Du côté du Parti socialiste, les propos d’Olivier Faure, sur le droit de regard de la police sur la justice et le rétablissement des tribunaux d’exception supprimés par François Mitterrand, ont suscité l’indignation jusqu’à la Présidente du PS à l’Assemblée nationale, Valérie Rabault rappelant à l’ordre son premier secrétaire : « Non à la confusion qui résulterait d’un droit de regard de la police sur les décisions de justice ». Ambiance.

Dans la tempête, il n’y aura eu que Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise (LFI) pour tenir bon et refuser de se rendre à la manifestation. Un courage salué y compris par des personnalités comme Edwy Plenel pour qui LFI a « sauvé l’honneur », ou comme le journaliste Jean Quatremer, qu’on peut difficilement soupçonner de sympathies insoumises : « totalement d’accord avec Jean-Luc Mélenchon. Que deux ministres y participent en dit long sur la déliquescence de la démocratie française sous Emmanuel Macron ». Les insoumis organisent ce 12 juin une marche pour les libertés et contre les idées d’extrême droite avec de nombreux syndicats et associations. Le leader des insoumis s’était déjà retrouvé bien seul dans le champ politique à alerter suite à la tribune des militaires factieux soutenue par l’extrême droite. La République, c’est lui ?


Par Pierre Joigneaux.