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Pollution radioactive : une étude révèle la présence de tritium dans l’eau potable de près de 10 millions de Français

Eau potable contaminée. Une enquête réalisée conjointement par Mediapart et la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad) a révélé la présence de tritium dans les eaux potables de certaines régions – en particulier l’Île-de-France et les Pays de la Loire – dans des proportions qui pourraient s’avérer extrêmement dangeureuses. 10 millions de Français sont concernés. Notre article.

Qu’est-ce que le tritium présent dans une partie de l’eau potable ?

Au premier abord, le tritium, ça ne parle pas à grand monde. Et pourtant, si on en croit les relevés des Agences Régionales de Santé (ARS), on en retrouve partout et particulièrement à proximité des fleuves situés en aval de centrales nucléaires. Il s’agit d’un élément résultant de la rencontre entre les neutrons produits par un réacteur en fonctionnement, et un élément chimique injecté pour contrôler la réaction nucléaire.

Si le tritium n’est pas produit volontairement lors de la réaction nucléaire, il ne s’en retrouve donc pas moins dans les bâches de rétention utilisées pour contenir l’eau usée des centrales, relâchée dans les fleuves à proximité de celles-ci.

La présence de tritium dans les eaux de surface n’est a priori pas anormale, puisqu’il existe un bruit de fond naturel pour cette substance, évalué à 2 becquerels par litre (Bq/l). Néanmoins, les seuils de potabilité sont fixés bien au-delà puisqu’en France, une enquête doit être déclenchée lorsque le taux de tritium présent dans les eaux dépasse les 100 Bq/l. De même, l’Organisme Mondial de la Santé (OMS) fixe le taux de potabilité d’une eau chargée en tritium à 10 000 Bq/l, bien que ce seuil soit contesté.

Des rejets importants laissant des traces jusque dans les urines des habitants

Si la présence de tritium n’est pas anormale en soi, l’étude en question retient néanmoins l’attention car les taux de tritium mesurés s’avèrent être bien plus élevés que le bruit de fond que l’on peut retrouver naturellement. Ainsi, des pics s’élevant jusqu’à 65 Bq/l ont pu être observés dans l’eau potable de villes s’alimentant dans les fleuves qui accueillent les rejets d’eau de centrales nucléaires. D’après l’enquête, pas moins d’un quart de la population française aurait été exposé à une pollution au tritium supérieure au bruit de fond de 2 Bq/l, donc issue de rejets industriels.

Plus inquiétant, des traces de cette pollution se sont retrouvées jusque dans les urines de certains habitants, ce qui indique qu’une consommation importante d’eau potable polluée par le tritium peut induire la présence de cet élément dans l’organisme.

Un risque sanitaire potentiellement sous-évalué

Des études récentes suggèrent que l’exposition au tritium, en particulier lorsqu’il est présent dans l’organisme, peuvent avoir des conséquences biologiques sérieuses. Si les concentrations de tritium observées en France semblent suffisamment faibles pour prévenir de risques liés aux cancers, des chercheurs alertent toutefois sur le manque de connaissance concernant l’impact qu’une exposition prolongée au tritium, même dans des proportions faibles, peut avoir sur l’organisme et tout particulièrement dans le cadre d’une grossesse.

De plus, l’Association pour le Contrôle de la Radioactivité dans l’Ouest (ACRO) alertait dans un communiqué daté de 2019 sur les risques plus larges auxquels nous expose cette pollution au tritium dans le cas d’un accident nucléaire grave. En effet, si cette pollution venait à exploser, c’est l’accès à l’eau potable de plusieurs millions de Français qui serait remis en question.

Pour aller plus loin : Se passer des énergies fossiles et du nucléaire : une révolution possible et désirable

Les insoumis sur le front de la bataille pour une sortie planifiée du nucléaire

La France Insoumise défend une fermeture planifiée des centrales nucléaires françaises depuis de longues années au travers de son programme L’Avenir En Commun. Ces cas de pollution au tritium confirment que les projets nucléaires doivent être questionnés, tout comme la supposée durabilité de cette énergie ou encore l’absence de solution de stockage pour les déchets nucléaires. C’est une lutte qu’il convient de mener à l’aune de nouveaux projets d’EPR comme celui de Flamanville qui aura coûté pas loin de 20 milliards d’euros : l’austérité budgétaire n’est pas à l’ordre du jour pour le nucléaire.

Au sein du groupe parlementaire LFI – NFP, c’est notamment le député Maxime Laisney qui a mené ce combat comme rapporteur sur le volet énergie du Projet de Loi de Finance 2025 (PLF) du gouvernement Barnier, démontrant méthodiquement le gouffre financier que représente cette industrie. Décidément, entre pollution et perfusion d’argent public, le nucléaire n’a que du mauvais.

Par Mathieu Rateau