AESH. La France insoumise (LFI) va présenter 12 textes de loi ce jeudi 24 novembre 2022 à l’Assemblée nationale. C’est le jour de sa « niche parlementaire », le seul jour de l’année où un groupe d’opposition parlementaire peut défendre ses propositions de loi et choisir l’ordre du jour de l’hémicycle de l’Assemblée. Parmi les 12 sujets retenus, la création d’un corps de fonctionnaires pour les accompant.e.s d’élèves en situation de handicap (AESH).
Une proposition de loi portée par la députée LFI Nadège Abomangoli. Les AESH sont le plus souvent des femmes. Bien qu’essentiel, ce métier est très mal reconnu. Conditions de travail indignes, maigres salaires, pas de statut : voilà leur réalité. Il est temps de les sortir de la précarité en leur créant un statut qui les protège. Notre article.
Journée spéciale sur l’insoumission : retrouvez la présentation de chacune des 12 propositions de loi insoumises tout au long de la journée.
« En ce matin de rentrée scolaire, mon garçon ne s’est pas levé pour prendre le petit déjeuner avec son frère et sa sœur ! Non, lui il n’a pas école, car il n’a pas d’AESH (…) ».
Témoignage issu du rapport de la Défenseure des droits L’accompagnement humain des élèves en situation de handicap publié en 2022
Des enfants privés d’école
Dix-sept ans après la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées qui garantit l’accès des enfants et des adolescents handicapés à l’école, des enfants en situation de handicap sont encore privés d’école et déscolarisés, totalement ou partiellement, faute d’une aide humaine pour les accompagner.
Le 26 août 2022, la Défenseure des droits alerte à nouveau sur l’accès à l’éducation des enfants en situation de handicap. En 2021, près de 20 % des saisines relatives aux droits de l’enfant qui lui sont adressées concernent des difficultés d’accès à l’éducation d’enfants en situation de handicap. Selon une enquête publiée le 13 septembre 2022 du SNPDEN UNSA, syndicat des chefs d’établissements, 44 % des personnels de direction du second degré manquaient d’au moins un.e AESH pour accompagner leurs élèves au moment de la rentrée.
Face à ce scandale, un marché privé se développe
Certains parents choisissent alors de salarier eux-mêmes un.e AESH. Des associations proposent par exemple pour 1 141 euros par mois un accompagnement psycho éducatif de 16 heures par semaine. Face aux carences du service public de l’éducation, un marché de l’accompagnement privé prend de l’ampleur et génère une rupture d’égalité de fait entre les élèves en situation de handicap, en fonction des revenus de leurs parents.
Le manque d’AESH est directement lié à la misère dans laquelle ils et elles sont confiné.e.s
Les AESH sont à plus de 90 % des femmes. Cet emploi est sous-rémunéré car, à l’instar de nombreux métiers du soin, il est considéré comme « féminin ». De plus, les AESH subissent un temps partiel imposé car il est impossible d’effectuer un temps de travail hebdomadaire de 39h sur le temps scolaire. Ce calcul du temps de travail comptabilisant uniquement le temps avec l’élève invisibilise tout le travail pourtant indispensable des accompagnantes : formation, concertation avec l’équipe pédagogique et l’ensemble des intervenants et intervenantes, adaptation des supports pédagogiques…
Comme dans d’autres secteurs dits féminins, les AESH sont contraint.e.s de multiplier les emplois pour augmenter leurs revenus. Les accompagnant.e.s effectuent des heures de garderie le matin, puis le midi lors du repas des élèves et enfin le soir à nouveau. Ils et elles peuvent travailler 12 heures de suite, quasiment sans aucune pause, pour un salaire qui n’atteint pas le SMIC.
La Défenseur des droits fait le même constat : « L’une des premières raisons de la précarité de l’emploi d’AESH est celle de la rémunération et du temps de travail hebdomadaire. Dans les faits, la grande majorité des AESH se voient proposer un contrat de 24 heures/semaine, correspondant à la durée de la scolarisation d’un élève en maternelle et primaire. Ce temps de travail équivaut à 60 % d’un temps plein et, dès lors, à une rémunération proportionnelle, soit l’équivalent d’à peu près 800 €/mois ». Comment vivre avec ce montant, qui ne garantit même pas aux travailleur.euse.s des revenus au dessus du seuil de pauvreté ?
Mettre fin à la précarité des AESH
Les députés.e.s insoumis.e.s, rejoints par l’ensemble des député.e.s NUPES, proposent d’en finir avec la situation scandaleuse dans laquelle sont plongé.e.s les AESH. Actuellement, les accompagnant.e.s sont contraint.e.s d’effectuer deux CDD de trois ans, soit six ans de contrat précaire, avant d’obtenir éventuellement un CDI. Pourquoi ces personnels sont-ils contractuels alors qu’ils effectuent des missions pérennes au sein de l’Éducation nationale ? Les parlementaires proposent donc de créer un nouveau corps de fonctionnaires de catégorie B et de titulariser les personnels aujourd’hui en poste.
D’autre part, le temps partiel subi est un des éléments clés dans cette précarité. Ce texte propose qu’un temps plein corresponde à un service de 24 heures, soit la durée hebdomadaire pendant laquelle un élève de primaire est scolarisé. Le temps de travail invisible pourra ainsi être pris en compte.