Guillaume Meurice
Portrait de l'humoriste Guillaume Meurice - Paris, 23 août 2016

Scandale : le livre de Guillaume Meurice censuré par Bolloré

Guillaume Meurice censuré par Vincent Bolloré. L’humoriste et chroniqueur de l’émission « C’est encore nous » sur France Inter a écrit un livre avec Nathalie Gendrot, metteuse en scène. « Le Fin Mot de l’histoire de France en 200 expressions », dictionnaire à l’humour mordant et digne de son co-auteur, n’a visiblement pas beaucoup fait rire le milliardaire. Celui-ci est personnellement visé dans certains passages du livre. L’ouvrage aurait dû être publié le 29 septembre par la maison d’édition Éditis, propriété de Vivendi… dont Vincent Bolloré est le premier actionnaire. Vincent Bolloré pratiquerait donc la « cancel culture » ?

Nous vous alertions fin janvier sur la menace que représentait l’OPA de Vincent Bolloré sur le monde de l’édition. La censure du livre de Guillaume Meurice est le résultat de cette concentration de pouvoir entre les mains d’un seul homme. Une concentration de moyens de communications dans les mains de l’homme qui a propulsé Éric Zemmour. D’un homme qui censure et licencie les humoristes contestataires. La liberté d’expression en bonne santé au pays des droits de l’homme. Notre article.

Guillaume Meurice censuré : Bolloré fait de la « cancel culture »

Bolloré manquerait-il d’humour ? Certaines blagues de l’ouvrage co-écrit par Guillaume Meurice ne lui ont pas plu du tout. Mais alors pas du tout. Voilà l’explication officielle : « sept passages » du livre seraient « susceptibles de donner lieu à contentieux », a expliqué le directeur des éditions Le Robert à Guillaume Meurice, selon Le Monde. Début août, un passage citant Bolloré posait déjà problème : « Faire long feu : Expression remplacée aujourd’hui par : révéler sur Canal+ les malversations de Vincent Bolloré ».

Puis, d’autres extraits ont été vivement critiqués par le service juridique d’Éditis. Par exemple : « Faire l’école buissonnière : À ne pas confondre avec faire le ministère buissonnier qui est le fait de laisser l’école se dégrader et les profs devenir “influenceur Lexomil.” » Un clin d’œil au ministre de l’Éducation Pap Ndiaye, et à une École publique que la macronie laisse se dégrader à petit feu. Selon la direction de la communication d’Éditis, ces nouveaux passages sont susceptibles de tomber sous le coup « de la diffamation, de l’injure et de la calomnie. » La liberté d’expression s’arrête là où commence la critique des ministres en place et l’égo de Bolloré ?

Vincent Bolloré fan de la « cancel culture » ? Le multimilliardaire mène dans le monde de l’édition les mêmes combats que dans les médias. « Je me sers de mes médias pour mener mon combat civilisationnel », a-t-il déjà reconnu en privé (L’Obs). Laisser tapis rouge sur CNEWS à Éric Zemmour, censurer un dictionnaire co-écrit par un humoriste de gauche. La liberté d’expression à deux vitesses sauce Bolloré. Mais voyons, Guillaume Meurice a osé critiquer Bolloré Ier de Vivendi ! Un problème au niveau de l’auto-dérision et du pluralisme, M. Bolloré ?

Censure d’humoristes et tapis rouge à Zemmour : les méfaits du censeur Bolloré

Ce n’est pas la première fois que Bolloré censure un humoriste. Fin novembre 2020, Sébastien Thoen a été renvoyé de Canal + (propriété de Bolloré). En cause ? Un sketch (très drôle) parodiant l’émission « L’Heure des pros », présentée par Pascal Praud, l’anti-journaliste. Stéphane Guy, journaliste sportif à Canal +, avait été sèchement licencié par le groupe Canal + pour avoir apporté son soutien public à l’affront dont était victime son ami. Ces deux journalistes étaient pourtant bien installés dans le champ médiatique. Mais peu importe l’ancienneté, on ne touche pas à CNEWS (propriété du groupe Canal+) et à Pascal Praud. À quand un Éloge de la « cancel culture » écrit par Vincent Bolloré ?

Tapis rouge pour Éric Zemmour pendant la campagne présidentielle. Vincent Bolloré, terreur médiatique au service de l’extrême-droite. Le milliardaire a défendu son poulain bec et ongles lorsque celui-ci était chroniqueur quotidien sur CNEWS. Zemmour vomit sa haine des mineurs isolés sur CNEWS en martelant qu’ « Ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c’est tout ce qu’ils sont » ? Zemmour est un homme « brillant » et qui « n’est pas d’extrême droite » répond Frank Cadoret, bras doit de Vincent Bolloré et directeur général de Canal +.

Pascal Praud et Éric Zemmour défendus, des journalistes licenciés pour une sketch parodique, un humoriste censuré pour quelques blagues dans un livre… La liberté d’expression est à géométrie dangereusement variable du côté de l’empire Bolloré. À quand un réveil démocratique face à une telle concentration des pouvoirs médiatiques ?