La dangerosité de rendre les tests payants, de refuser de lever les brevets sur les vaccins, l’absurdité du pass sanitaire (ou de son absence) dans les différents transports, le scandale du licenciement sanitaire, l’avertissement de la 4ème vague face aux ricanements des LREM : Jean-Luc Mélenchon et les insoumis étaient sur tous les fronts cette nuit dans l’hémicycle. L’Assemblée nationale vient en effet d’adopter avec 117 voix pour et et 86 contre, le polémique texte de loi pass sanitaire. L’occasion pour le leader des insoumis de soulever plusieurs lièvres et de dénoncer un texte dangereux. Notre article.
Il est 5h38 du matin. 117 voix pour, 86 voix contre, l’élargissement du pass sanitaire vient d’être adopté. Les débats ont été houleux. Une voix s’est particulièrement faite entendre, s’élevant des anciens sièges des montagnards, celle de Jean-Luc Mélenchon. Le leader des insoumis, de retour du Burkina après avoir marché sur les traces de Thomas Sankara, était visiblement en grande forme.
Un pass sanitaire pour le TGV mais pas pour le RER, bienvenue dans un roman de Kafka
Bienvenue en absurdie, dans un roman de Kafka. Le texte de loi pass sanitaire, outre sa dangerosité, contient en effet bien des absurdités. Alors que les Françaises et les Français s’apprêtent à prendre le chemin des grandes vacances, pour ceux qui en ont la chance, un sacré mal de crâne s’annonce face aux règles dans les transports. Depuis le début de la crise sanitaire, y compris pendant les confinements, les transports bondés comme le métro ou le RER sont toujours restés ouverts sans aucune restriction. Pourtant pour les trajets en TGV, pour certaines distances, le pass sanitaire va être exigé. Allez comprendre.
« Nous devrions étudier la possibilité de fournir au virus un marquage qui lui permet, lorsqu’il monte dans un RER, de rester hors contrôle. Mais lorsque le RER lui-même se transforme en TER, comme c’est le cas dans la direction du Loiret, à ce moment-là le pass navigo, qui normalement indique une zone du RER, se transforme en une exigence de pass sanitaire ». Vous avez compris la logique ? Exiger un pass sanitaire dans les TGV mais pas les RER ? Absurde. Le leader des insoumis a dénoncé la « pagaille » et le « chienlit » que vont ajouter ces mesures incompréhensibles qui risquent d’ajouter au désordre et aux conflits déjà exacerbés dans la période.
Rendre les tests payants : une mesure dangereuse qui risque de provoquer une hausse des contaminations
Jean-Luc Mélenchon s’est ensuite attaqué, dans une seconde intervention, à la mesure de déremboursement du test PCR. Aujourd’hui gratuit, le gouvernement prévoit, avec ce texte de loi, de le rendre payant, à hauteur de 50 euros à partir de la rentrée. Une folie pour le Président du groupe LFI à l’Assemblée, qui risque de faire repartir les contaminations à la hausse.
« Être vacciné n’exempte pas d’être contaminé. Si vous êtes vacciné et que vous avez la certitude qu’à partir de là vous ne pouvez pas contaminer les autres, vous devenez dangereux parce que vous pouvez contaminer les autres ». Plusieurs scientifiques ont effet alerté ces derniers jours sur ce sentiment d’impunité et de non respect des gestes barrières de la part des vaccinés. Le leader des insoumis a cité l’exemple de jeunes ayant participé à une soirée et qui, bien que vaccinés, ont été contaminés.
« Pour ma part, j’applique le principe de morale, de la responsabilité individuelle absolue. Dès lors, puisque je suis vacciné, je pense que je me ferai tester dans un certain nombre de circonstances. J’en ai le moyen financier, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Je vous mets en garde : dire qu’être vacciné annule la nécessité des tests et qu’ils seront payants, fait que par ce moyen nous pouvons développer la contamination de masse et mettre en danger ceux qui ne peuvent pas être vaccinés ». L’alerte est lancée.
Les brevets sur les vaccins : la piqûre de rappel face à l’entêtement en marche
« Nous croyons à la conviction, nous croyons à la vertu de l’exemple et nous sommes respectueux de la liberté car si l’Organisation mondiale de la santé dit qu’il vaut mieux convaincre que contraindre, c’est parce qu’elle sait que quand on invente des pass sanitaires, des contrôles à tout bout de champ, de la paperasse sans fin, on crée une autre société que celle dans laquelle nous voulons vivre ». Jean-Luc Mélenchon a rappelé la proposition des insoumis : convaincre de se faire vacciner plutôt que de contraindre, la ligne préconisée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Jean-Luc Mélenchon a également rappelé que depuis de longs mois, les insoumis, aux côtés notamment de Lula et de nombreux dirigeants du monde entier, appellent à la levée des brevets sur les vaccins. Tant que les vaccins resteront dans les mécanismes prédateurs du marché, les pays riches continueront à les accaparer. Et, même dans une logique égoïste, le raisonnement est court-termiste : si les pays pauvres n’ont pas accès aux vaccins, le coronavirus et ses différents variants reviendront inlassablement par le sud.
Jean-Luc Mélenchon a notamment rappelé qu’en France, jusqu’en 1959, il était interdit de déposer un brevet sur un vaccin. Si l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a décidé hier de sa commercialisation, on peut bien décider aujourd’hui de retirer les vaccins de la logique du marché et de les faire basculer dans les biens communs de l’humanité face à la pandémie. Position que refuse toujours d’adopter Emmanuel Macron, ultime conservateur et protecteur des profits des laboratoires pharmaceutiques alors que le Président des États-Unis lui même s’est prononcé en faveur de la levée des brevets.
4ème vague : la réponse de Mélenchon à une députée LREM prétendant que « personne » ne pouvait prévoir « en avril ou en mai » la situation
« Personne ne pouvait dire en avril que nous serions dans cette situation ». Ces mots sont ceux de la députée de La République en Marche (LREM) de l’Isère, Émilie Chalas. Propos qui n’ont pas manqué de faire bondir le Président du groupe LFI à l’Assemblée nationale. « On vous a annoncé la deuxième vague et vous m’avez traité de tous les noms au moment où je l’ai fait. Nous vous avons annoncé la 4e vague au mois d’avril et mai, pas parce que nous étions plus intelligents que tout le monde, mais parce qu’on lisait un peu. Et vous vous êtes moqués de nous ».
Face aux ricanements des LREM, le leader des insoumis a dénoncé l’inaction du gouvernement pendant que les insoumis réclamaient un plan d’urgence pour l’Hôpital, la nationalisation pour remettre en route la seule entreprise sur le sol européen produisant des bouteilles d’oxygène (située sur le sol français, à Gerzat), la société de roulement notamment dans les transports pour éviter les foules immenses sur les quais de métro ou de RER, sujet qui depuis le début de la crise n’a pas l’air de préoccuper le moins du monde le gouvernement, de la nécessité des purificateurs d’air et d’embaucher massivement pour faire face à la crise sanitaire dans les écoles, et ainsi de suite.
Jean-Luc Mélenchon dénonce le scandale des licenciements sanitaires
Enfin, le Président du groupe LFI à l’Assemblée nationale a dénoncé un véritable scandale : l’instauration dans ce texte de loi d’un licenciement sanitaire. La ministre du travail, Élisabeth Borne l’avait annoncé la veille sur BFMTV : pas de vaccin, pas de salaire. À partir du 30 août, un employeur pourra en effet suspendre le salaire d’un salarié ne pouvant présenter un pass sanitaire. Et au bout de deux mois, celui-ci pourra décider du licenciement de son salarié pour « motif personnel ».
« Vous savez aussi bien que moi que c’est un acte totalement arbitraire qui peut découler des dispositions qui sont prises. Pourquoi ? Parce qu’il suffirait que Pierre, Paul ou Jacques n’ait pas obtenu à temps son certificat de vaccination ou qu’il ne soit pas efficace dans les délais prévus, pour qu’il perde son emploi. Collègues, est-ce que vous imaginez l’ampleur de l’angoisse, de l’anxiété, de la déstabilisation sociale, familiale, affective qu’une telle mesure entraîne dans la vie quotidienne des gens ? Comment pouvez-vous être assez cruels pour décider une chose pareille ? Sachant que si l’Organisation mondiale de la santé, à qui vous prétendez d’être supérieur en intelligence de situation, vous dit qu’il faut donner la liberté plutôt que l’obligation, vous introduisez dans le code du travail une violation de la liberté supplémentaire ».
Par Pierre Joigneaux.