ArcelorMittal : pourquoi la nationalisation exigée par LFI est la seule solution viable

ArcelorMittal. Depuis plusieurs années, on entend répéter à tue-tête que “l’industrie française décline”, y compris par les tenants du macronisme et de l’extrême droite, tous convertis au néolibéralisme, qui depuis 20 ans ravage l’économie française. L’industrie lourde française subit sa pire crise depuis 2009, et derrière les grands discours sur la “réindustrialisation”, c’est la même […]

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ArcelorMittal. Depuis plusieurs années, on entend répéter à tue-tête que “l’industrie française décline”, y compris par les tenants du macronisme et de l’extrême droite, tous convertis au néolibéralisme, qui depuis 20 ans ravage l’économie française. L’industrie lourde française subit sa pire crise depuis 2009, et derrière les grands discours sur la “réindustrialisation”, c’est la même saignée austéritaire qui est administrée, sous Sarkozy, sous Hollande, et évidemment depuis 2017. 

Oh, dans l’absolu, les fleurons industriels français ne se portent pas si mal, surtout quand on voit leurs actionnaires s’engraisser de dividendes, leurs PDG se payer à coups de millions d’euros. Pourtant le constat est là : la production d’acier en Europe a baissé de 30% depuis 2008, supprimant 100 000 emplois en 15 ans. Le contraste est vertigineux : un chiffre d’affaires et des actionnaires en forme, et des vies brisées par le chômage, la précarité. Le capitalisme financier a cela de magique : sa valeur financière n’a rien à voir avec sa production réelle. Un cas d’école est celui d’ArcelorMittal. 

Le n°2 mondial de l’acier emploie 15 000 personnes en France, mais leur situation est menacée depuis plusieurs années, au gré des plans sociaux et des délocalisations. S’il est vrai que l’entreprise connaît de réelles difficultés en Europe, ArcelorMittal ne s’en gave pas moins d’argent public, tout en se préparant à abandonner ses sites en France. Alors que les salariés s’inquiètent, les actionnaires et le PDG, l’héritier Aditya Mittal, se frottent les mains. Pour protéger ces emplois, mais aussi l’environnement, la nationalisation d’ArcelorMittal est la seule solution. Notre article. 

“Et dans le pire des cas si je ne travaille pas, je récupèrerais la boîte de Papa”

On ne pouvait pas s’attendre à grand-chose de la part d’Aditya Mittal, PDG d’ArcelorMittal, héritier de son père depuis 2021, mais auparavant directeur général de la boîte familiale. Il est évidemment arrivé là grâce à son seul mérite, à sa seule force de travail : quoi de plus normal alors de se rémunérer, en pleine crise COVID, de pas moins de 10 millions de dollars. Un énième profiteur de crise, et son palmarès ne s’arrête pas là. 

En 2022, l’entreprise enregistrait un bénéfice de 10 milliards de dollars. Mais une large part de ces bénéfices n’a pas été investie dans l’entreprise, pour la développer. Elle a encore moins profité aux salariés d’ArcelorMittal, dont 15 000 travaillent en France. Au lieu de cela, ce sont toujours les mêmes qui se sont gavés en pleine crise : les actionnaires. Rien de surprenant à ce qu’une entreprise privée, dans une économie capitaliste, favorise ceux qui possèdent la richesse à ceux qui la génèrent. 

Pourtant l’entreprise est souvent pointée du doigt pour mettre en danger ses employés, notamment les ouvriers des usines sidérurgiques : de 2012 à 2023, 251 d’entre eux ont perdu la vie. Et quand les travailleurs ont le mauvais goût de hausser le ton, d’exiger de meilleures conditions de travail, ceux-ci sont discriminés pour leur engagement syndical.

Détruire les corps et leur environnement

Le capitalisme est incompatible avec l’harmonie des humains entre eux et avec la nature. Non-contente d’être l’entreprise la plus émettrice de CO2 en France, ArcelorMittal participe au saccage de la planète au niveau global, mais aussi localement. Ainsi à Fos-sur-mer, les rejets de particules fines illégaux sont sources de cancers, diabètes, ou autres maladies graves. De plus, l’explosion d’un haut-fourneau à Dunkerque a failli coûter la vie à 30 employés, en plus de provoquer une catastrophe écologique, qui aurait été accompagnée de son cortège de maladies graves. 

La direction n’a rien fait à Dunkerque, malgré les avertissements. En urgence, l’Etat a engagé pas moins de 850 millions d’euros (130 ont déjà été injectés) pour décarboner l’usine de Dunkerque…et rien ne s’est passé. Non seulement les activités d’ArcelorMittal nuisent à l’environnement et aux Hommes qui y habitent, non seulement l’Etat leur sert sur un plateau d’argent les moyens de rénover leurs infrastructures, mais en plus Mittal prend l’argent, et le garde pour lui et ses actionnaires ! 

Et pourtant l’entreprise a le culot, face aux difficultés, de demander aux Etats européens d’inciter à la production “d’acier vert”, de baisser les coûts de l’énergie. Alors que de fait, Mittal a déjà fait une croix sur l’Europe : il prend l’argent qu’il reste à y prendre, mais investit son argent ailleurs.

Le double jeu d’ArcelorMittal

De fait, l’industrie de l’acier connaît une crise de surproduction : trop d’acier est produit dans le monde, les prix baissent, les conditions de production (lieux…) sont bouleversées. Dans l’UE, la production d’acier a diminué de 30% en 15 ans, détruisant 100 000 emplois ! Une crise de plus pour le capitalisme et la mondialisation qui en découle, et ce sont toujours les mêmes qui trinquent. 

Alors Mittal chouine : la Chine exerce une concurrence déloyale, les prix de l’énergie ont trop augmenté en Europe…tout est bon pour prétexter de ne pas rénover le site de Dunkerque, où la France a pourtant investi déjà 130 millions d’euros. Ajouté aux fameux “permis à polluer”, une autre aberration de la commission européenne, Mittal se gave d’argent public, et les Etats n’y trouvent rien à redire.

C’est la logique néolibérale : l’Etat est une tirelire, qui donne des millions aux entreprises qui le sifflent, et l’Etat, trop content de faire une politique “d’incitation aux entreprises”, paye avec l’argent public des entreprises qui délocalisent hors de France. C’est la logique qui a présidé sous Sarkozy après la crise de 2008, sous Hollande avec le CICE, puis sous Macron avec le gavage d’entreprises, pour un résultat médiocre.

Pour aller plus loin : 200 milliards : le coût exorbitant des aides publiques aux entreprises

Pourtant, ArcelorMittal dispose de beaucoup de sites en France : 5 hauts-fourneaux, des sites sur tout le territoire, et 15 000 emplois. Or Mittal prend prétexte des difficultés (réelles pour certaines) de l’entreprise pour abandonner la France et l’Europe. Le 23 avril, l’entreprise a annoncé supprimer 600 emplois en France, malgré les 392 millions d’euros d’aides publiques.

Les syndicats estiment que des sites sont menacés sur tout le pays : dans les Hauts-de-France, en PACA, en Bourgogne Franche-Comté… Le report de la décarbonation de Dunkerque fait craindre d’autres destructions d’emplois. Les syndicats CGT d’ArcelorMittal à Dunkerque estiment que la fermeture de leurs sites détruirait en cascade 60 000 emplois, en comptant les employés de Mittal, de ses sous-traitants, et des emplois indirectement créés par le site. Une famille de Dunkerque sur cinq vit grâce aux emplois du site d’ArcelorMittal. 

Et pourtant Mittal se désintéresse de la France : les 5 fameux hauts-fourneaux tournent à 50% de leurs capacités, et le pays est jugé “peu fiable” pour les investissements. Non pas que les infrastructures manquent, ni la main-d’œuvre qualifiée, ou que la productivité soit trop faible : le pays ne garantit juste pas des dividendes assez élevés pour les actionnaires.

En conséquence, Mittal se rabat sur ses sites aux Etats-Unis et surtout au Brésil, qu’il développe grâce à l’argent reçu de la part…des États européens. Vous avez bien lu : les pays d’Europe injectent leur argent public dans une entreprise, qui investit ces sommes dans des sites en Amérique (ou les reverse à ses actionnaires), dont la production va inonder les marchés européens d’ici quelques années, accélérant la décrépitude de l’industrie européenne. 

aides publiques arcelormittal

Rompre un cycle destructeur, montrer un autre chemin

Les députés LFI sont allés à la rencontre des syndicats d’ArcelorMittal à Dunkerque. Des discussions riches en propositions en ont résulté. Les délégués syndicaux, issus notamment de la CGT, ont fait savoir leurs revendications aux parlementaires : instaurer de nouvelles règles pour protéger les salariés, leurs emplois mais aussi leurs personnes. Des formations dans les métiers de la métallurgie devraient être subventionnées. 

Concernant les aides publiques, il est temps que les riches et leurs entreprises cessent de se servir dans le pot de confiture : ces aides doivent être conditionnées, voire remboursées si elles ne sont pas utilisées. Enfin, les syndicats mettent dans la balance la solution à la crise de l’industrie en France : la gestion en coopérative voire la nationalisation d’ArcelorMittal.

Au-delà de cette seule entreprise, cette question de la nationalisation doit se poser, notamment dans les secteurs stratégiques : les autoroutes, l’énergie, le transport ferroviaire… Les actionnaires de Mittal jugent que la France n’est pas assez rentable ? Tant pis pour eux. Que l’Etat prenne les manettes, on se débrouillera. 

Bien sûr, cette nationalisation doit s’accompagner de mesures permettant aux travailleurs d’ArcelorMittal de peser dans la prise de décision. Pour ne pas tomber dans un capitalisme d’Etat, la nationalisation d’une entreprise ne doit pas être la seule étape dans la reprise en main de l’appareil productif.

C’est le sens des propositions de LFI face aux syndicalistes : protéger les travailleurs sur le sol français, par la hausse des salaires et la conquête de nouveaux droits sociaux, mais aussi des relocalisations d’industries et le protectionnisme solidaire, le tout dans le cadre d’une grande planification écologique.

Cette revendication a été portée par le député insoumis Laurent Alexandre à l’Assemblée Nationale. L’occasion de rappeler les mensonges et l’hypocrisie de la direction d’ArcelorMittal.

Le capitalisme mute, s’adapte aux crises qu’il provoque. Il vampirise les Etats européens, et déplace ses sites de production hors du vieux continent : c’est le récit néolibéral, qui maintient des entreprises sous perfusion d’argent public pour tenter de garder les entreprises en France, qui vole en éclat.

On nous répète à longueur de journée sur les plateaux de la bonne société que “les entreprises créent des emplois”. C’est faux : les entreprises détruisent les emplois, les vies, saccagent l’environnement, nos services publics, elles s’ensauvagent. A ce que Jean-Luc Mélenchon nomme “capitalisme tributaire”, il faut opposer un autre modèle, de production des richesses, de propriété collective.


Pour aller plus loin : Quelle riposte efficace contre Trump ?

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