Depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, plus de 11 millions de véhicules sont bannis des routes. En cause ? Les Zones à Faibles Émissions (ZFE), imposées aux villes de plus de 150 000 habitants, qui interdisent la circulation des diesels et essences d’avant 2011. Résultat, un gros 4×4 flambant neuf peut continuer de rouler alors qu’un ménage modeste perd son seul moyen de transport. Derrière cette mesure portée par le gouvernement avec la complicité passive de la droite et du RN, se cache donc un nouveau moyen de cibler les plus précaires. Or l’écologie punitive n’a rien d’une solution. C’est un modèle radicalement différent qu’il faut viser, celui d’une écologie populaire, juste et efficace, portée par les insoumis. Notre article.
Les ZFE, la fausse solution à un problème de santé publique majeur
En France, respirer tue. Ainsi, sur la période 2016-2019, Santé publique France estime que près de 40 000 décès seraient attribuables chaque année à une exposition des personnes âgées de 30 ans et plus aux particules fines. Cette pollution de l’air frappe surtout les grandes villes françaises, le secteur des transports étant l’un de ses principaux responsables. À lui seul, il est responsable de 53 % des émissions d’oxydes d’azote et de 15 % des particules fines en France en 2021.
Développement de cancers, maladies cardiovasculaires et respiratoires, mais aussi de troubles neurologiques ou du développement, l’exposition chronique à la pollution de l’air nous place donc aujourd’hui face à un drame sanitaire. Ce constat, que les insoumis ne cessent de rappeler, est si alarmant qu’il est partagé par un gouvernement pourtant coutumier de la politique du déni.
C’est dans ce contexte de réduction des émissions de polluants qu’ont été pensées les zones à faibles émissions mobilité (ZFE) poursuivant l’objectif d’exclure les véhicules les plus polluants afin de préserver la qualité de l’air. Pour cela, elles ont recours aux fameuses vignettes Crit’Air qui classent les véhicules en fonction de leur niveau d’émission de polluants atmosphériques dans le but d’interdire, à terme, la circulation des véhicules diesel puis essence. Elles ont été définies une première fois en 2019 pour les 11 plus grandes villes de France, puis étendues à 31 agglomérations ne respectant pas les seuils de qualité de l’air dans la loi « climat et résilience » de 2021.
On distingue deux types de ZFE. La première est les « territoires ZFE » qui concernent les villes dont les seuils de qualité de l’air sont régulièrement dépassés, notamment Paris et Lyon qui doivent interdire, au 1er janvier 2025, tous les Crit’Air 3. Pour ces deux métropoles, cela concerne 22,5 % de l’ensemble des 3,2 millions de véhicules répertoriés, soit 720 000 véhicules.
La seconde, nommée « territoires de vigilance » concerne l’ensemble des autres agglomérations devant mettre en place une ZFE, mais dont la qualité de l’air est en deçà des seuils recommandés par l’OMS. Seuls les véhicules non classés, ainsi que les poids lourds d’avant 2001, sont concernés par cette restriction plus souple. Toutefois, toutes les agglomérations peuvent décider d’augmenter arbitrairement ces restrictions et d’anticiper sur les réglementations nationales. Dans le seul cas de Montpellier, qui a déjà d’interdit la circulation des Crit’Air 3, 60 000 personnes sont d’ores et déjà visées par cette mesure.
Mais la mise en place d’un tel dispositif, censé lutter contre la pollution de l’air dont les insoumis connaissent les ravages, n’est qu’une solution de demi-habile. En excluant les plus pauvres et en mettant en œuvre une mesure relevant de l’écologie punitive, le gouvernement est une nouvelle fois aux antipodes des propositions permettant la bifurcation écologique en profondeur que défend la France insoumise.
Une mesure d’arnaque sociale permettant au gouvernement de s’acheter une conscience écologiste à moindre frais
Cette mesure frappe d’abord celles et ceux qui n’ont d’autre choix que d’utiliser leur voiture pour aller travailler, et en premier lieu les plus précaires. En 2024, 15 millions de personnes en France sont déjà en situation de précarité mobilité, un chiffre qui ne cesse d’augmenter. Et plutôt que d’y remédier, les ZFE ne feront qu’aggraver le problème.
Si le législateur a pensé un « droit à la mobilité », il reste aujourd’hui un vœu pieux. L’enquête menée à ce sujet par l’association Wimoov est sans appel : près d’un tiers des Français n’a pas la liberté de choisir son mode de déplacement. À cette contrainte s’ajoutent d’autres inégalités : faibles revenus, explosion des prix des carburants, longues distances à parcourir, absence d’alternatives à la voiture, de transports en commun adaptés… Et cette précarité touche tous les âges et tous les territoires, des villes aux campagnes, en passant par les banlieues. Pourtant, elle épargne toujours les mêmes.
Car pendant qu’un gros SUV neuf continuera de circuler sans entrave, ce sont les trajets du quotidien qui deviendront impossibles pour des millions de Français. Ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter un véhicule neuf seront les premiers frappés. Or, près de 40 % des ménages les plus modestes possèdent une voiture Crit’Air 4 ou 5. Ils sont la cible directe de cette mesure injuste, alors que les 10 % des ménages les plus riches passent entre les mailles du filet.
Une nouvelle fois, le gouvernement a donc trouvé un moyen de faire les poches des classes populaires en épargnant les riches. Et avec le soutien du Rassemblement national, cette mesure ne s’arrêtera pas là, dès 2026, des radars de contrôle viendront sanctionner les contrevenants.
Le contre-projet d’une écologie populaire
Face à cette injustice, les insoumis restent en première ligne, malgré la répression qu’ils subissent sur le terrain. Les députés du groupe tiennent aussi la tranchée. Sylvain Carrière, avec l’ensemble du groupe LFI, a ainsi déposé une proposition de loi à l’Assemblée nationale.
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Ses objectifs sont clairs : les ZFE ne doivent pas s’appliquer tant que des alternatives crédibles ne sont pas mises en place. Restreindre la circulation sans garantir des transports en commun suffisants est inacceptable. Les ZFE doivent donc être suspendues partout où les alternatives ne sont pas garanties : bus, métro, tram, pistes cyclables… Un véritable plan de mobilité décarbonée doit voir le jour pour relier les villes aux périphéries. Il est également urgent de revoir le système Crit’Air. Aujourd’hui, un SUV neuf, plus polluant par son poids et son freinage, circule librement tandis qu’une petite voiture ancienne, mais moins polluante, est interdite.
Si cela semble relever du bon sens, cette nouvelle aberration illustre une fois de plus les véritables priorités du gouvernement : préserver les profits de l’industrie automobile, plutôt que l’environnement et la justice sociale. Face à cela, les objectifs de la France Insoumise sont clairs. La transition écologique est une nécessité. Mais elle ne doit pas se faire sur le dos des classes populaires. Cela passe par le fait de taxer les véritables pollueurs, n’en déplaise aux partisans d’une écologie de classe, où seuls les plus riches ont les moyens d’être en règle.
Par Mazarine Albert
