Ils avaient tonné, tempêté, grondé, fulminé… Pour finalement ne rien faire. Le gouvernement Bayrou est totalement déconnecté et perd pied, heureusement, il a ses deux béquilles. À sa gauche (centrisée), le Parti socialiste, à son extrême droite, le Rassemblement National. Pourtant, les dirigeants d’extrême droite n’ont pas manqué de mots assez durs envers Bayrou et son équipe : « menteur », « macroniste de la première heure »… Tout laisse à penser que le RN est un parti d’opposition, et on y croirait presque. Mais ses députés ont refusé de renverser le gouvernement, en dépit de leurs critiques. Notre brève.
Le RN, une opposition de façade
Tout avait pourtant bien commencé. Le 14 janvier dernier, le député d’extrême droite Jean-Philippe Tanguy a dénoncé à la tribune de l’Assemblée Nationale un gouvernement « mort-né », un macronisme qui « tond les classes moyennes et populaires », une gestion calamiteuse de l’immigration, bla bla bla… Dès le début du gouvernement Bayrou, Jordan Bardella avait annoncé la couleur : « pas de censure a priori ».
Pourquoi ne pas censurer ? Le député Tanguy répond de lui-même : la famille politique de Bayrou « a les valeurs nécessaires au sursaut ». Oui : des valeurs communes cimentent de plus en plus le centre extrémisé et l’extrême droite. Après avoir dénoncé la mainmise des oligarques sur la Macronie, le député du Nord loue Bayrou et le MoDem, qui ont su « dénoncer les oligarques », pas très cohérent pour un « macroniste de la première heure » !
Pour aller plus loin : Décryptage – Censure : comment François Bayrou a enfumé le Parti Socialiste

Ainsi les espoirs du parti lepéniste sont « rachitiques » au sujet Bayrou, mais ils existent ! Le parti d’extrême droite dicte, comme du temps de Michel Barnier, ses conditions au gouvernement, sous peine de censure, une menace encore brandie par Bardella suite aux propos du ministre Rebsamen sur le Rassemblement National. Encore aujourd’hui, les représentants lepénistes font le tour des plateaux TV pour dicter leurs conditions, notamment sur le budget.
Ô surprise ! Ces conditions n’ont rien de très éloigné du programme macroniste : baisse des « charges » sur les entreprises, xénophobie d’État toujours plus assumée, mesures sécuritaires et répressives, inefficaces, en plus de faire un peu plus basculer le pays dans un régime autoritaire, etc. C’est pourquoi le discours du député Tanguy ressemble plus à une déclaration d’amour qu’à un discours d’opposition : « les mots de M.Retailleau sont les nôtres », a-t-il martelé. Cela semblait évident depuis des mois, c’est maintenant confirmé par les principaux intéressés.
Par Alexis Poyard