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Scandale – Bolloré et Bardella veulent faire leur pub à la SNCF

Scandale à la SNCF, tombée dans le panneau « Bardella ». Vincent Bolloré, par le biais du groupe d’édition Hachette Livre dont il est propriétaire, a négocié avec la régie publicitaire de la SNCF pour la promotion dans ses gares du livre à paraître de Jordan Bardella. Au total, près de 600 panneaux dans plus de 100 gares partout en France doivent être concernés.

En réaction, syndicats et députés de la France insoumise appellent à l’annulation d’une décision scandaleuse. Promouvoir dans les gares le livre du président d’un parti fondé par des Waffen SS constituerait une insulte à l’Histoire des cheminots qui ont payé de leur vie leur engagement contre l’extrême droite et le fascisme.

Une telle décision, manifestement contraire à l’obligation de neutralité et à l’Histoire toute entière du groupe, déshonorerait la présidence de la SNCF. Notre article.

Bolloré réserve près de 600 panneaux partout en France pour faire la publicité de Bardella

Après avoir échoué à faire élire son poulain Éric Zemmour, Bolloré se lance maintenant aux côtés du Rassemblement National (RN).

Ce mardi 15 octobre, Fayard, maison d’édition phare du groupe Hachette Livre détenu depuis près d’un an par le milliardaire d’extrême droite Vincent Bolloré – auquel l’Insoumission consacrera bientôt un article sur l’influence médiatique – annonce la parution du premier livre de Jordan Bardella pour le mois de novembre. Intitulé Ce que je cherche (le Parlement européen peut-être ?), ce livre, écrit avec la complicité de l’ex-journaliste de France Info Jean-François Achilli, fera sans nul doute office de programme politique pour le président du RN, si tant est qu’il en ait un.

Mais le lendemain, sur la base de documents internes à Fayard, le journal Libération révèle que la maison d’édition a négocié avec la régie publicitaire de la SNCF un vaste plan de promotion du livre à paraître de Jordan Bardella. Consultés par plusieurs journaux, ces documents font état d’une « campagne nationale » à la « visibilité massive sur les quais de gare » pour un total de 581 panneaux répartis dans plus de 110 gares partout en France. Cet affichage promotionnel est prévu pour durer plusieurs semaines entre les mois de novembre et de décembre 2024.

Dans l’« embarras », le deux poids, deux mesures de la direction de la SNCF

Dans la foulée, la SNCF exprime son « embarras » auprès de Libération et affirme qu’elle ignorait qui était l’auteur concerné. Mais dans le même temps, la régie publicitaire du groupe indique à L’Humanité que l’annulation de cette campagne de promotion ne pourra se faire qu’une fois que le visuel des affiches leur sera transmis, et si ce dernier contrevient notamment à la neutralité des services publics. Cela signifie donc que la régie publicitaire de la SNCF ne considère pas de facto que le livre d’un député européen président d’un parti politique est un livre contrevenant à la neutralité des services publics.

Cette même SNCF s’était pourtant montrée beaucoup plus réactive en janvier dernier lorsqu’il s’était agi d’interdire les affiches de promotion du spectacle de l’humoriste Waly Dia parce qu’elles auraient présenté « un caractère politique incompatible avec le devoir de neutralité qui s’impose dans les transports publics ». Récapitulons donc : pour la SNCF, les affiches de promotion du spectacle d’un humoriste sont politiques, mais pas forcément celles du livre du président d’un parti politique. Deux poids, deux mesures.

« Au moment où les cheminots lançaient la grève insurrectionnelle pour libérer Paris, les fondateurs du Rassemblement National participaient à la collaboration »

Fidèles à la tradition de lutte contre l’extrême droite par les cheminots, les syndicats Sud Rail et la CGT appellent la présidence de la SNCF à refuser cette campagne d’affichage. « Avec force et gravité », Sud Rail interpelle ainsi le président du groupe et « exige que Gares et Connexion via sa régie publicitaire refuse cette campagne d’affichage au service d’un parti politique d’extrême droite ». De son côté, la fédération CGT des cheminots évoque « l’injure » que constituerait une telle campagne, rappelant son « histoire vis à vis de l’extrême droite [et] du fascisme » que les cheminots ont combattus, notamment durant la Seconde Guerre mondiale.

Prolongeant l’appel des syndicats, les députés de la France insoumise Thomas Portes et Bérenger Cernon, cheminots, rappellent que « 2220 cheminots sont morts en prison, déportés, exécutés sous le régime de Vichy et que plus de 7 500 sont morts sous les balles du régime nazi », et « qu’au moment où les cheminots lançaient la grève insurrectionnelle pour libérer Paris, les fondateurs du Rassemblement National participaient à la collaboration ».

Ayant à l’esprit l’Histoire et pour reprendre les mots du député insoumis Thomas Portes, il est évident que « Quel que soit le visuel, une publicité pour le président d’un parti fondé par des SS n’a rien à faire dans le hall des gares ».

Un épisode symptomatique du pouvoir idéologique des milliardaires qui monopolisent les médias

S’il n’est pas encore acté que la campagne publicitaire Bardella-Bolloré sera effectivement déployée, cet épisode démontre la diversité des formes que peut prendre le pouvoir des milliardaires sur l’agenda politico-médiatique. Outre la détention de titres de presse, de chaînes de télévision ou de radio, l’édition et la publicité constituent un levier important de l’imposition du narratif idéologique ultralibéral, réactionnaire et identitaire des milliardaires. Il y a quelques jours, l’Insoumission évoquait notamment l’importance de considérer l’influence publicitaire de Bernard Arnault comme vecteur de son combat idéologique et économique.

Pour aller plus loin : L’empire médiatique de Bernard Arnault

En attendant, il reste à espérer que la direction de la SNCF entende les indignations syndicales et politiques et respecte l’Histoire de son propre groupe. L’Insoumission restera attentive à l’évolution de la situation. L’extrême droite n’a sa place nulle part, elle ne l’a surtout pas auprès de celles et ceux dont les aînés l’ont combattu au prix de leur vie.

Par Eliot