République

La 6ᵉ République, la victoire culturelle de la bataille des retraites

République. La bataille des retraites de 2023 est un point d’appui important pour le camp de l’émancipation. Déjà six mois de mobilisation. Six mois de rencontres, d’échanges, sur les ronds-points, dans les Assemblées générales des travailleurs et des étudiants. Six mois de réflexion collective, d’expérimentations dans les prises de décisions, dans les formes d’actions. Six mois pour élever le niveau de conscience du peuple et créer de formidables liens de solidarité entre des gens qui, autrement, ne se seraient sans doute jamais rencontrés.

Le peuple a érigé des digues solides contre les assauts d’Emmanuel Macron et de ses amis milliardaires envers nos conquêtes sociales. Il faut savoir les analyser pour les utiliser dans la poursuite de la lutte dans toutes ses dimensions. 

Dans cette période, le peuple a profondément pris conscience de l’urgence d’abolir la 5ème République et de passer à la 6ème République. Une victoire culturelle. À l’Assemblée nationale, le camp présidentiel a usé de toutes les manœuvres institutionnelles pour passer en force la retraite à 64 ans, refusée par 93% des actifs. « Vote bloqué » au Sénat, détournement de l’article 40 de la Constitution sur la recevabilité des propositions de lois, 47-1, 49.3… La 5ème République est morte. Vive la 6ème République. Notre article.

Avec les articles 40, 44.3, 47-1, 49.3, la Vème République est une machine à piétiner le débat parlementaire

Sur les six premiers mois de cette année 2023, les connaissances des Français en droit constitutionnel ont grimpé en flèche. La lutte est toujours un moment d’éducation populaire. La bataille des retraites a été marquée par un usage massif des nombreux articles de la Vème République qui permettent de museler l’opposition parlementaire. 

Ce fut d’abord l’article 47-1 qui impose un temps maximum pour l’examen du texte. Puis, le 44.3, dit du « vote bloqué » qui permet au gouvernement de choisir tout seul les amendements qui sont soumis au vote des parlementaires. Après, ce fut le tristement célèbre 49.3 qui permet d’adopter une loi sans vote. Et maintenant, contre tous les us et coutumes de l’Assemblée nationale, sa présidente Yaël Braun-Pivet détourne l’article 40 de la Constitution pour empêcher le groupe LIOT de présenter sa mesure d’abrogation de la retraite à 64 ans lors de sa niche parlementaire du 8 juin. Nous vous en parlions dans nos colonnes la semaine dernière.

Pour aller plus loin : Retraites : coup de force contre la démocratie, le Parlement humilié, l’opposition prépare la riposte dans la rue

Quel est le sens d’une démocratie représentative si les parlementaires à qui le peuple confère leur souveraineté ne peuvent plus exercer leur fonction, à savoir, parlementer ? Quelle est la légitimité d’une loi qui n’est pas votée ? Quel contre-pouvoir lorsque des députés d’opposition ne peuvent même plus déposer des propositions de loi lors de la seule et unique journée de l’année pendant laquelle ils sont maîtres de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale (jour de niche parlementaire, ndlr)?

Cet arsenal d’outils constitutionnels prévus par la 5ème République permet à un homme seul, le Président de la République, d’obliger des millions de gens à travailler ou être au chômage deux années de plus. Cette bataille sociale a permis de mettre en lumière le caractère anti-démocratique de nos institutions. La prise de conscience est massive. C’est très visible dans les cortèges. Au fil des manifestations ont fleuri partout les pancartes sur l’urgence démocratique.

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Pour aller plus loin : République : de la « mauvaise » Vᵉ à l’espoir d’une VIᵉ

Du R.I.C. à la 6ème République

Lors du mouvement des Gilets jaunes, une revendication démocratique s’est très rapidement imposée à côté, en supplément de l’exigence de justice sociale. Celle-ci s’est matérialisée dans un mot d’ordre bientôt marqué sur le dos de milliers de vestes fluo. Trois lettres, en forme d’espoir de renouveau démocratique, de pouvoir véritablement aux mains des citoyens : R.I.C. Pour référendum d’initiative citoyenne. 

Les multiples démonstrations des immenses possibilités pour un gouvernement, même dépourvu de majorité au Parlement, de passer en force une réforme aussi lourde de conséquences dans la vie de la population, malgré une opposition syndicale, parlementaire et populaire, ont augmenté en conséquence les exigences de reconstruction démocratique. Le R.I.C. ne suffira pas. Tant qu’un homme seul, élu une fois tous les cinq ans, pourra décider de tout, tout seul, le peuple ne sera pas souverain, la République ne sera pas la chose commune, mais une illusion utilisée par la caste pour que les 99% se tiennent tranquilles. 

Cette pancarte prise en photo par Jérôme Humbrecht pour Vosges Matin illustre cet élargissement significatif du mot d’ordre. Le peuple n’exige plus seulement de pouvoir écrire la loi grâce au R.I.C. Il a également pris conscience de la nécessité absolue de renouveler entièrement le cadre de nos institutions, d’en finir avec la monarchie présidentielle, pour passer à la 6ème République. 

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Par Ulysse