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La surinformation, une paralysie contemporaine

À l’heure des défis et de l’ultra-modernité, il convient de savoir identifier les principaux problèmes auxquels sont confrontés les élus aussi bien que les simples citoyens. Au-delà des luttes démocratiques, sociales et environnementales, l’un des enjeux majeurs de notre époque est le rapport que nous avons avec l’information, dans sa production, sa diffusion et son traitement.

Assez peu évoquée, la surinformation est bel et bien une vérité, annoncée il y a déjà des décennies, et qui connaît une accélération depuis le début des années 2000. Il existe aujourd’hui une profusion d’informations, diffusées et relayées par les chaînes télévisées, les publications numériques et les réseaux sociaux, qui tend à devenir aussi bien continue qu’incontrôlable. Une abondance, qui loin d’éclairer les dirigeants et acteurs de la vie publique, provoque davantage l’indécision, la confusion et mène à des comportements parfois aberrants, aussi bien sur le plan individuel que celui, plus grave, du collectif. Une situation qui pèse sur les nécessaires prises de décisions politiques et qui de ce fait, freine considérablement le progrès social, en France comme dans l’ensemble des pays industrialisés. Notre article.

Un court historique de l’abondance d’informations

Si pendant très longtemps, le savoir a circulé de manière confidentielle, puis modérée, l’arrivée des nouveaux moyens de communication comme la radio ou la télévision, puis plus tard Internet, ont fait exploser la quantité de données accessibles.

Dès 1981, le célèbre sociologue Edgar Morin, s’inquiétait des conséquences futures d’un accès à l’information devenu trop excessif. Cette tendance s’est développée au fil des années 1990, mais ce n’est que vers 2010 qu’elle s’est imposée en France, avec le passage de 5 chaînes en clair à la multitude de chaînes TNT dont plusieurs présentent de l’information en continu, laquelle représente la forme la plus absolue de surinformation télévisuelle. Le pire étant peut-être lorsque des émissions de plateaux télévisés prennent à l’ordre du jour des commentaires des réseaux sociaux relatifs à leur précédente émission, ce qui permet de meubler aisément des dizaines de minutes d’antenne et de livrer au public des informations en masse sans la moindre hiérarchisation par importance. Beaucoup d’émissions d’aujourd’hui invitent également à « réagir sur les réseaux sociaux », avec cette impression que la télévision inspire une grande partie du contenu Web, et qu’elle-même s’en nourrit en retour.

Le journaliste américain David Schenk, dans son live paru en 1997 Survivre au smog de données estime que le volume d’information a augmenté à un tel point dans la deuxième moitié du XXe siècle qu’il est devenu progressivement impossible à traiter dans son intégralité, ce qui constitue pour lui une grande première dans l’histoire de l’Humanité (David Schenk, Data Smog, Harper Collins, 1997).

Les médias ont toujours présenté des faits divers sans grand intérêt, qui « font diversion », selon la formule de Pierre Bourdieu, qui ont pu par le passé désinformer ou avancer des faits erronés, de manière volontaire ou non. Mais jamais encore ils n’ont pu à ce point inonder le grand public d’informations répétées, un flot continu qui se répand bien au-delà des salons, puisque l’utilisation du smartphone s’est généralisée en une grosse décennie, et que désormais même des établissements recevant du public, comme des gares ou des hôpitaux, possèdent un voire plusieurs écrans diffusant BFM TV en quasipermanence. David Schenk se plaignait déjà d’une situation similaire aux Etats-Unis à la fin des années 1990, pourtant bien avant les smartphones modernes et leur foule d’applications. Il semble que la lutte contre la monopolisation de l’information l’ait emporté sur la question de savoir si ce n’est pas finalement la quantité de l’information en général qui pose d’abord souci aujourd’hui.

Dans le monde de l’entreprise, une étude de 2019 montre que les cadres et décideurs des sociétés reçoivent en moyenne dix fois plus d’informations qu’en 2009. Des témoignages font état de cadres complètement dépassés et devenus presque incapables de mener à bien leur travail. Des employés consacrent de nos jours près de 30 % de leur temps de travail à gérer et classer des mails, toujours plus massifs. Certains sociologues ont fait de ce trop plein de données un facteur de faillite des entreprises dès les années 60, et une des causes principales d’épuisement professionnel, qui touche également aujourd’hui près d’un étudiant sur deux en général, et les deux tiers des étudiants en Médecine.

Les effets reconnus de la surinformation

Aux Etats-Unis, souvent en avance d’un point de vue des outils de communication comme des études sociologiques, des spécialistes tentent d’alerter sur les méfaits du trop plein d’informations depuis déjà plus de vingt ans. La page Wikipédia consacrée à la surinformation dresse une liste pertinente des effets provoqués par elle, la confusion, le stress mais aussi un sentiment d’impuissance arrivent enpremier.

La surinformation apparaît comme un puissant facteur d’indécision et d’incertitude, face à une quantité de données devenue ingérable pour l’esprit humain. Il peut en résulter soit une absence de décision, soit un conformisme vis-à-vis des versions les plus diffusées par les médias. Pour en revenir à l’enquête de David Schenk, ce dernier affirme que l’accès à l’information, du fait d’un trop grand volume, a commencé à ne plus être déterminant dans la lutte pour les droits sociaux dès les années 1960 en Amérique. En d’autres termes, que le trop plein d’infos est peu à peu devenu un frein à la libération des individus, surtout au niveau social et sociétal.

Les spécialistes de la question relèvent globalement qu’il existe une image attrayante de l’information, qui est perçue par notre société comme quelque chose de positif, avec l’idée qu’elle serait bénéfique, mais cette perception se révèle dans les faits erronée et contre-productive. Ce n’est pas lorsque l’on est le mieux informé que l’on prend les meilleures décisions, ni même que l’on acquiert une forme de sagesse. À partir d’un certain volume d’informations, la prise de décision devient au contraire plus difficile, et plus hasardeuse également.

Il n’y a qu’à constater, sur des sujets d’intérêt public, au-delà de la puissance des lobbies, qui peuvent produire de fausses expertises, la quantité de rapports et d’études qu’il est désormais nécessaire de présenter pour espérer faire changer les choses au niveau politique. Là où quelques décennies plus tôt encore, une seule grosse erreur judiciaire ou policière suffisait parfois à faire promulguer une loi qui vienne soutenir les droits humains dans notre pays ou l’une des nations voisines. Un scandale national comme l’Affaire des fiches, révélée en Suisse fin 1989, a suffi à provoquer des manifestations massives et un changement institutionnel dans le domaine policier, ainsi que la création d’un poste civil de préposé spécial à la protection des données, aux archives fédérales helvétiques. Pour rappel, en 1989, ce qui devait au départ être une simple affaire fiscale a révélé le fichage politique de près de 900 000 citoyens Helvétiques depuis plus d’un siècle, par la police fédérale. Ce fichage ciblait entre autres des groupes communistes, progressistes mais aussi des syndicalistes.

Cette surabondance moderne d’informations peut entraîner de graves erreurs de gestion, en entreprise comme en politique, ou tout simplement constituer un prétexte à l’inaction. Mais aussi au niveau individuel, il peut exister une véritable dépendance à l’information elle-même, laquelle s’apparente à une forme de drogue, l’individu privé d’informations devenant agité au bout de seulement quelques heures. La dépression provoquée par la surinformation est reconnue au Japon depuis une bonne décennie, et même traitée, comme c’est le cas en Suisse. Au Japon, il est question de jeunes individus, en grande majorité des hommes, appelés « Hikikomoris » du savoir, de par leur vie d’ermite et leur addiction à l’information et aux documentaires de toutes sortes. Il s’agit d’une tendance encore récente dans le pays, et qui se démarque du Hikikomori traditionnel, quant à lui dû à une culture et une société basée sur le succès professionnel. Le canton de Berne a organisé fin 2011 des expositions pour alerter les citoyens sur les conséquences médicales de la surexposition aux médias classiques ou numériques.

Même si l’on déplore un manque d’études consacrées à l’effet de la surinformation sur la jeunesse, il convient de noter que la génération des 18-35 ans est justement la plus exposée aux médias, aux écrans, celle dont la vie est la plus virtualisée, numérisée. C’est également la tranche d’âge qui vote le moins, malgré un souci du social et de l’écologie marqué, partagé par une grande partie de cette classe d’âge. En Corée du Sud, pays ultra-moderne, les experts de santé constatent déjà depuis des années que l’omniprésence des écrans et des sollicitations associées fait que 20 % des moins de 20 ans ont développé un déficit d’attention.

La surinformation comme faiseuse de tendances

Les élites économiques ont très rapidement utilisé les moyens de communication pour se mettre en valeur et vanter leur mode de vie, propager des idées qui leur sont favorables. Rien de nouveau a priori. Mais avec l’avènement de l’information en continu et la concentration des médias français entre les mains d’une poignée de neuf milliardaires, les chaînes télévisées ont pu diffuser plus massivement que jamais ces « valeurs », dans un contexte de consanguinité idéologique. Parmi ces éléments de vie « bourgeoise », figure notamment une manière de parler très jargonisée, anglicisée, mais aussi bourrée de mots-clefs plus ou moins savants et de néologismes, qui rappellent un élitisme coupé de la réalité du peuple. Avec sa foule de faux concepts et de faux courants, de mots empruntés à la finance ou au monde de l’entreprise des anglo-saxons, mais aussi de mots et manières de parler à la « mode », jamais le langage n’a semblé aussi artificiel sur nos plateaux télévisés, dans les émissions de toutes sortes. Et les hommes politiques qui veulent que rien ne change semblent s’en inspirer allègrement.

Faire monter un candidat semble nettement plus facile dans ce contexte qu’il y a dix ans. L’information en continu permet aussi de monter d’immenses campagnes pour accuser, calomnier sans relâche, pendant des jours sinon des semaines, des candidats dont le programme menace la richesse des propriétaires de ces mêmes médias. Récemment, la recherche incessante du spectacle et la logique de l’affrontement entre tel ou tel candidat, journaliste, éditocrate, participe à la surinformation cette fois en tant que « peopolisation de la politique », et provoque de ce fait un appauvrissement du journalisme tel qu’on le connaissait encore au début de ce siècle. Cette logique très commerciale sert une fois encore à faire diversion vis-à-vis de ce qui compte le plus, c’est-à-dire les programmes présentés aux électeurs.

Depuis plusieurs années, la surinformation est même devenue une manière de gouverner, très inspirée des médias, et relayée par eux. Il en résulte une surcommunication, quitte à multiplier les contradictions, les erreurs, de façon à s’assurer une omniprésence médiatique, dans laquelle les tonnes d’informations successives peuvent faire oublier plus rapidement des scandales politiques pourtant majeurs. Le public croule sous les milliers de déclarations et semble ne plus se souvenir avec la même précision qu’avant des éléments décisifs des grandes affaires. La confusion qui en résulte est dans ce contexte clairement recherchée, comme le rapportait l’un des maîtres de cette stratégie aux Etats-Unis, Steve Bannon, l’ancien conseiller de la Maison Blanche sous Donald Trump. Il définissait la stratégie du Gouvernement d’alors en ces termes, à savoir « d’inonder la zone de merde ». Cette omniprésence permet aussi de fabriquer une sorte de culte de la personnalité, comme c’est le cas en France, dans lequel les partisans de l’actuel chef de l’État acceptent sans jamais critiquer toutes les déclarations et prises de décision de leur représentant, et nient l’existence d’une réelle alternative.

Au conspirationnisme s’oppose ainsi une tendance toute aussi dangereuse, voire davantage, « un officialisme » dans lequel seule la parole du Gouvernement est crue par une partie de la population. Ces deux tendances, poussées par les médias, poussent à fabriquer deux camps qui se renforcent l’un l’autre (« Le complotisme et l’officialisme : deux fléaux qu’il faut combattre », Maxime Chaix) et viennent souvent retarder la recherche de la vérité, qui elle se moque des camps et des opinions. Le conspirationnisme, qui doit d’ailleurs une partie de ses succès aux médias qui en font indirectement la promotion, peut être également alimenté par un conformisme vis-à-vis d’un Gouvernement qui multiplie les déclarations sur des prétendus « ennemis de la nation » qui se cacheraient parmi les citoyens ou dans une catégorie sociale précise. Ainsi, entre les blasés abstentionnistes, les indécis en plein doute, les terrorisés en attente d’une réponse forte et les supporters fanatisés, la surinformation permet à des politiciens sans scrupules de régner. Ce, grâce à un électorat à qui l’on empêche de prendre le recul nécessaire et à qui l’on impose une sorte d’amnésie collective.

Le recours accru aux écrans a parallèlement permis l’explosion de la publicité, mais aussi des panneaux d’affichage numériques dans les centre-villes. Ces derniers peuvent être considérés comme une forme de surinformation, en tant qu’incitation à la consommation. Il s’agit aussi bien d’une forme de communication capitaliste à but commercial, que de pollution environnementale, contre laquelle nous devons désormais lutter, un combat qui progresse dans certaines grandes villes, en France comme ailleurs en Europe.

Une cause de dépression avérée

Dans un contexte d’accès immédiat à l’information, les faits divers tragiques, le dérèglement climatique ou les troubles géopolitiques n’ont jamais été autant visibles sur nos écrans. Des sociologues relevaient il y a déjà plus de dix ans que cette surexposition à des catastrophes fait artificiellement monter un sentiment de nostalgie, où des gens en viennent à regretter une époque où les citoyens n’avaient pas autant de droits, voire presque aucun.

En effet, à une époque où l’on travaille nettement moins qu’il y a un siècle, où des progrès sociaux majeurs ont été remportés, on constate que la tendance des Français à la déprime, la sinistrose, a augmenté depuis deux décennies. Quand bien même la violence réelle s’est effondrée, que le souci du respect de l’environnement a remporté des victoires culturelles, que la transition écologique et énergétique est dans presque toutes les têtes, et quand bien même la gentillesse et la bienveillance deviennent des valeurs montantes face à l’égoïsme capitaliste.

Au vu de ces faits, nous aurions du voir de plus en plus de citoyens s’engager en politique pour conquérir encore plus de droits, pour les travailleurs, la nature, la démocratie. Mais c’est bien le contraire que l’on a observé, avec une démobilisation générale, l’abstention électorale en forte hausse, ainsi que des taux de syndiqués en France parmi les plus faibles au monde. Il a fallu attendre les Gilets Jaunes pour qu’enfin un mouvement collectif de lutte sociale se mette de nouveau en place dans notre pays.

La mise en scène de la catastrophe et le pessimisme ambiant sur une variété importante de sujets n’a en réalité pas pour conséquence de faire réagir les citoyens. Bien au contraire, il semble que plus le monde présenté par les médias semble obscur, plus les réactions égoïstes, court-termistes paraissent se multiplier. Il est possible d’affirmer qu’un temps précieux pour régler les problèmes environnementaux a probablement été perdu à cause de la démoralisation qu’engendre le catastrophisme. Une biologiste et militante pour les océans comme Nancy Knowlton s’est à plusieurs reprises prononcée pour la mise en lumière des succès permis par la lutte écologique, comme un facteur d’engouement et d’engagement auprès des jeunes, plutôt que des annonces dramatiques, même si celles-ci font références à des problèmes graves et bien réels.

La surinformation conduit souvent à des actions absurdes ou incohérentes. Le Monde relève ainsi dès 2011 « un baby-boom sur fond de sinistrose ». La France a alors en effet le taux de natalité le plus élevé de l’Ouest, tandis que sa jeunesse est considérée comme la plus malheureuse d’Europe. L’article relève la pensée de ces jeunes Français.es, qui font des enfants tout en étant persuadés qu’une grande catastrophe est devant nous, que l’avenir est sombre, et qu’il faut vivre maintenant sans se soucier du lendemain. Un carpe diem négatif qui transparaît comme une « incompréhensible fuite en avant », et qui ne fait que renforcer les problèmes auxquels nous sommes tous confrontés. Ce comportement est simplement le résultat d’une génération rendue en partie sans espoir par les publications anxiogènes et pessimistes des grands journaux, des principales chaînes d’information.

Cette déprime contemporaine n’est en aucun cas une « rançon du progrès », mais résulte au contraire d’un changement de perception que les gens ont du monde. Cette modification étant elle-même provoquée par une quantité toujours plus grande d’informations négatives, voire d’informations tout court, qui nous parviennent chaque jour, chaque heure. Et qui ne nous laissent parfois plus d’instants de répit pour respirer, observer, réfléchir et ainsi prendre le recul nécessaire à une confiance retrouvée, nécessaire à toute action militante, sociale ou politique.

Le rôle joué par la surinformation dans la crise du Covid-19

Certains experts tendent à démontrer depuis 20 ans que la façon même dont l’information arrive, et la forme qu’elle prend, la rend en réalité souvent inexploitable. Son abondance renforce le sentiment d’urgence et pousse à prendre des décisions irraisonnées. Dans le cadre de l’émergence du Covid-19, la multiplicité des articles, au-delà même de leur ton catastrophiste, a clairement pesé sur les décisions qui ont été prises par la majeure partie des dirigeants mondiaux.

C’est ce qui ressort d’un article publié par une revue scientifique canadienne en janvier 2022, après 20 mois de crise sanitaire, économique et sociale. L’article ne traite pas de la corruption qui peut toucher certains gouvernements, ni de la propagande que ces derniers peuvent mettre en place, mais relève que la surinformation pose à elle seule un immense problème de politique publique, y compris dans le domaine de la Santé. L’une des idées les plus intéressantes à être avancées est que la surabondance de données, devenue ingérable, tend à provoquer chez les décideurs une « série de réactions en mode panique » face à ce type de crise.

Il faudrait ajouter qu’en plus de cet effet sur les élus et « experts », la multiplication des informations de ce type provoque l’adhésion d’une partie de la population à ces mesures insensées, d’autant plus lorsque des journaux comme Le Point, affirmaient avant même le premier confinement en Europe qu’ « il est rationnel de paniquer » et même que ceux qui paniquent sont historiquement « les survivants de l’espèce humaine ». Une version d’un monde à l’envers dans laquelle les décisions les plus absurdes peuvent dès lors prospérer.

L’article va un peu plus loin que ce seul constat de crise de panique, et ajoute que s’il on n’est pas capables de faire le tri dans les informations qui nous parviennent, notamment grâce à des outils informatiques adaptés, et que l’on ne prend pas en compte la diversité des opinions, ce genre de décisions erronées se reproduira dans un domaine ou un autre. Le directeur de publication de la revue ajoute en personne que les crises auxquelles nous sommes confrontés ne sont pas pires que celles du passé, mais qu’elles « semblent artificiellement gonflées par un flux d’informations anxiogènes ».

Ainsi, cette expertise rejoint la thèse évoquée précédemment, à savoir que ce n’est pas le monde qui est plus sombre, bien au contraire, c’est l’idée que le grand public s’en fait qui est plus sombre. Et qu’indépendamment des données les plus pertinentes et objectives, parfois même très positives, disponibles de nos jours, la perception du futur à venir était mieux avant.

Face au tout écran, une prise de distance salutaire

Dans un monde et une société composés d’autant d’éléments, il est évident que la surinformation n’explique pas tout. Mais elle est une cause majeure de l’indécision, de confusion, d’erreurs et même de capitulation, aussi bien pour les individus que pour des décideurs, des simples citoyens aux élus nationaux. Elle est une cause d’errements politiques et collectifs, et contribue à produire une époque où l’on constate une volonté très faible de changer le monde, du moins de la part des décideurs, alors que jamais nous n’avons disposé d’autant d’outils et de connaissances pour pouvoir le faire.

Pour aller plus loin : Bolloré, Arnault, Drahi, Niel… Vers la fin des 9 oligarques détenant 90% des médias ? Le projet de LFI

Mais quel que soit le problème et son ampleur, il existe des solutions. Pour la jeunesse, un léger retour au réel, avec une prise de distance avec les écrans, peut suffire à donner un élan et concrétiser les espoirs aussi bien que les potentiels, ou tout simplement retrouver une plus grande sérénité qui permet de mieux agir. La défiance de plus en plus grande vis-à-vis des médias de masse doit s’allier avec un refus de la surcharge informationnelle, et l’utilisation de quelques données pertinentes comme base de mobilisation et de travail. Le retour au réel signifie avant tout aller davantage sur le terrain, près des gens et de leur quotidien, des moments partagés sans le filtre de BFMTV, CNews ou autres clones, pour se poser les vraies questions, identifier les véritables problématiques, et continuer de renforcer un mouvement qui saura bouleverser l’ « ordre des choses », plus fragile qu’il n’y paraît. C’est aussi, peut-être dans un avenir proche, militer pour qu’il soit interdit d’avoir plus de 3 heures d’information à l’antenne, par jour et par chaîne d’information, tout en poursuivant la lutte contre la concentration néfaste des médias par quelques milliardaires.

Par Victor Gueretti

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