Retraites

Retraites : pourquoi les petits payeraient pour les gros ?

Imposer un âge minimal de départ à la retraite à 64 ans reviendrait à cibler directement les ouvriers, les employés et les petites classes moyennes. Pourquoi ? Car les classes populaires commencent à travailler bien plus tôt que la bourgeoisie. La retraite à 64 ans ne va par exemple rien changer pour les titulaires d’un Master. Pourquoi ? Car quand on a commencé à bosser à 23 ans (après 5 ans d’études) on devait déjà partir à 65 ans dans le système actuel (pour atteindre les 42 annuités et bénéficier de la retraite à taux plein). La réforme proposée ne change donc rien pour les personnes qui ont la chance de faire, ou d’avoir fait, des études supérieures.

En revanche, elle change tout pour les ouvrières et les ouvriers, les employés et les petites classes moyennes. Cette réforme fait entièrement peser l’effort sur les classes populaires. Sur toutes celles et tous ceux qui ont commencé à bosser avant 23 ans et qui pouvaient prétendre partir avant 64 ans dans le système actuel. Tous ceux là reprennent 2 ans en dessert. Pourquoi ? Pour financer les cadeaux aux assistés d’en haut. Les petits payeraient pour les gros cadeaux aux plus riches. Prendre au travail pour donner au capital, telle est la devise de ce gouvernement. La retraite à 64 ans, une injustice de classe. Notre article.

La retraite à 64 ans : un effort exclusivement demandé aux classes populaires

Faire travailler plus longtemps celles et ceux qui ont commencé à travailler plus tôt, ne rien changer pour les privilégiés. Cette contre-réforme des retraites à 64 ans est injuste. Profondément injuste. Prenons deux exemples concrets.

Un cadre titulaire d’un Master (bac +5). Ce dernier commence à bosser dans le meilleur des cas à 23 ans (après ses 5 années d’études). Dans le système actuel (retraite à 62 ans avec 42 annuités), il ne pouvait déjà pas partir avant 65 ans pour bénéficier de l’intégralité de sa retraite. Cette réforme ne le concerne donc pas. Elle ne change strictement rien pour lui.

Un ouvrier qui a commencé à bosser à 20 ans. Dans le système actuel (retraite à 62 ans avec 42 annuités), il pouvait partir à 62 ans. Après la contre-réforme d’Emmanuel Macron, il ne pourra partir qu’à 64 ans. Deux années de plus obligatoires. L’effort est donc entièrement demandé aux classes populaires. Pourquoi ?

Une taxe de 2% sur la fortune des milliardaires français suffirait à financer le déficit des retraites

Un autre choix aurait été beaucoup plus juste et évident. La richesse des très riches est tellement importante qu’en prendre une (toute) petite partie résoudrait de nombreux problèmes. Notamment le financement des retraites. Le nouveau rapport de l’ONG Oxfam, intitulé « la loi du plus riche », sorti ce 16 janvier 2022, révèle un chiffre à marteler dans le débat public : une taxe de 2% sur la fortune des milliardaires français suffirait à financer le déficit des retraites (10 à 12 milliards par an selon le rapport du Conseil d’orientation des retraites, le COR).

Pourquoi les plus pauvres payeraient pour les plus riches ? Comment 10 milliardaires ont-ils accumulé 189 milliards d’euros depuis 2020 ? En profitant du travail des autres. La richesse des milliardaires ne se bâtit jamais par magie : elle repose sur l’exploitation du sur-travail des autres. On ne gagne jamais seul. Quand on gagne, c’est en équipe. On n’a encore jamais vu une usine se construire et tourner toute seule. Donc quand on gagne, on partage avec ceux qui ont créé la richesse.

Lutte des classes

Pourquoi faire porter l’effort toujours sur les mêmes ? Pourquoi demander aux classes populaires de travailler encore plus longtemps, aux invisibles de mourir encore plus nombreux avant d’atteindre la retraite ? Qu’est-ce qui nous empêche de taxer une infime partie de l’immense richesse créée par l’ensemble de la population française, moins de 2% de la fortune des 42 milliardaires, pour l’utiliser pour une fois pour l’intérêt général ? Petit rappel salutaire : le gouvernement n’a aucun problème pour lever 157 milliards d’euros chaque année pour arroser les groupes du CAC 40 sans aucune contrepartie. Trouver 12 milliards d’euros pour le peuple serait impossible ?

80% des Français sont contre cette réforme. Ce qui va se jouer dès ce jeudi dans la rue est un bras de fer : entre l’intérêt d’une infime minorité, le capital, et l’intérêt de l’immense majorité, le travail. C’est la question fondamentale du partage de la richesse créée par le plus grand nombre. Est-ce que l’effort va être une fois de plus demandé au travail, ou est-ce que le capital pour une fois pourrait être taxé d’une infime partie de son immense fortune… créée par le travail ?

Le rapport de force capital / travail s’annonce électrique, alors que l’explosion des prix fracasse les Français, 7% d’inflation attendue par l’INSEE en janvier et en février, mais que les salaires ne suivent pas, que les prix ne sont toujours pas bloqués, et que les super-profits continuent d’exploser. La bataille commence ce jeudi et ce samedi dans la rue. Pour défendre l’intérêt du plus grand nombre. Face à une injustice pour l’immense majorité des Français, la lutte des classes ?

Par Pierre Joigneaux.