virilité

La virilité coûte 95 milliards d’euros chaque année, autant que le budget de l’éducation et de la sécurité réunis

Combien coûte la virilité ? C’est la question que s’est posée la chercheuse Lucile Peytavin. Les hommes représentent 96,3% de la population carcérale et 90% des personnes condamnées par la justice. Ils sont responsables de 99% des viols, 97% des violences sexuelles, 95% des vols de véhicules, mais aussi 99% des incendies volontaires ou encore 89,5% des destructions et dégradations. 

Ces infractions ont un coût pour l’Etat notamment dans le budget de la justice et de la sécurité. Elles ont aussi des conséquences désastreuses sur les conditions de vie de toutes et tous. Le travail de Lucile Peytavin a permis de démontrer que la France économiserait 95 milliards d’euros chaque année si les hommes se comportaient comme les femmes. Cette somme permettrait de doubler le budget consacré à la sécurité et de l’éducation ou de réduire à 0 le déficit public de l’Etat. Un pognon de dingue. Notre article. 

Quel est le coût de la virilité ? Autant que le budget de la sécurité et de l’éducation, presque autant que le déficit public. 

L’étude du genre au travers du prisme économique n’est pas nouvelle. C’est principalement les inégalités salariales qui sont étudiées. Les femmes touchent en moyenne 25% de salaire en moins que les hommes, 15,6% par heure de travail. Résultat, les retraites des femmes sont en moyenne de 1000 euros contre 1600 euros pour les hommes. L’autre angle déjà étudié est la différence dans le travail gratuit, le travail domestique par exemple est assuré à 80% par des femmes. 

En revanche, le coût économique n’avait jamais été chiffré. Cette enquête est difficile. En effet, les variables de genre sont invisibilisées dans les études sur les comportements violents du quotidien comme le harcèlement, ou les insultes. Lucile Peytavin s’est donc concentrée sur les infractions sanctionnées par la Justice. Les statistiques sont accablantes : aujourd’hui, les hommes représentent 96,3% de la population carcérale et 90% des personnes condamnées par la justice. Ils sont responsables de 86% des homicides, 99% des viols, 97% des violences sexuelles, 95% des vols avec violence, 99% des incendies volontaires, 89,5% des destructions et dégradations, 84 % des accidents mortels sur la route. 

L’administration pénitentiaire est dotée d’un budget de 4 milliards d’euros, un budget donc pratiquement entièrement consacré à gérer les comportements asociaux des hommes. Cela n’est pourtant que le sommet de l’iceberg. Le budget consacré à la sécurité est au total de 22 milliards d’euros. 22 milliards pratiquement entièrement consacrés à protéger les citoyennes et les citoyens contre la violence de certains hommes. 

A cette violence contre autrui s’ajoutent les risques pris par les hommes pour eux-mêmes. Les hommes représentent 75% des morts sur la route, 80% des cancers dus au tabac et à l’alcool. Au total, les hommes ont trois fois plus de risques de mourir avant 65 ans d’une mort évitable (donc dus à un comportement à risques). Les hommes sont donc également bien plus responsables que les femmes du déficit de la Sécurité sociale. 

A ce coût pour les politiques publiques s’ajoute encore le coût humain et matériel supportés par la société : la souffrance physique et psychologique des victimes, la perte de productivité, la destruction de biens. Pour cela, Lucile Peytavin s’appuie notamment sur cet outil utilisé par le gouvernement pour le pilotage des politiques publiques.

Bilan, si les hommes se comportaient comme les femmes, la France économiserait 95,2 milliards d’euros par an. Pratiquement autant que le déficit public. Oui, si les hommes se comportaient comme les femmes, la France aurait un budget à l’équilibre. 95,2 milliards d’euros par an, c’est également les budgets combinés de la sécurité et de l’éducation. On pourrait donc doubler les moyens des personnes chargées d’éveiller l’esprit humain et d’assurer la tranquillité publique. Ça motive pour changer un peu les choses non ? 

Screenshot 2022 11 04 at 12 00 21 Depenses de lEtat La finance pour tous

Attention toutefois, ce chiffre est sujet à caution. On vous voit venir les boomers, non non pas à la baisse, tout ce qui est compté est solide et s’appuie intégralement sur des données déjà disponibles. Non, d’après la chercheuse, ce chiffre est largement sous-estimé car certaines statistiques d’infraction ne fournissent pas les données en fonction du genre et surtout, une grande partie des violences et comportements asociaux ne font pas l’objet d’une décision de justice et ne sont donc pas chiffrables à ce stade.  

La virilité n’a rien de naturelle, elle est le résultat d’une socialisation qui encourage les garçons à adopter des comportements violents

La biologie démontre qu’il n’y a rien de physiologique chez les hommes qui les pousserait à adopter des comportements violents. Non, le niveau de testostérone n’entraîne pas la violence. C’est même le contraire, « L’administration d’une simple dose de testostérone chez les femmes provoque une amélioration de la sociabilité dans la négociation, réduit les conflits et augmente l’efficacité des interactions sociales ».

L’agressivité et les comportements asociaux des hommes n’ont donc rien de naturel. En revanche, la différence vient de loin, dès l’enfance par l’éducation à la virilité. 

Dès les premiers jours de la vie, les adultes ont des rapports plus toniques avec les garçons, le seul sentiment qui est plus valorisé pour les garçons que pour les filles est celui de la colère, par exemple lorsqu’ils lisent des histoires aux garçons, les adultes sur-joue la colère, les adultes sanctionnent beaucoup moins les comportements perturbants des garçons. Également, la culture, les livres, les jouets, les films représentent la violence comme un attribut masculin dans une proportion gigantesque. 90% des armes sont tenues par des garçons dans les catalogues de jouets. 

Résultat de cette socialisation différenciée : Au collège, les garçons représentent entre 75,7% et 84,2% des enfants ayant reçu une punition ou une sanction disciplinaire. Ils sont aussi 97,6% des élèves sanctionnés pour “violence sur autrui”. A 14 ans, les hommes ont déjà 70% de plus de risques de mourir dans un accident que les femmes. 

Remettre en cause l’éducation à la virilité va prendre du temps, nous en sommes toutes et tous imprégnés. Cependant, des solutions existent. 

Déjà en prendre conscience, l’enquête de Lucile Peytavin est à ce titre là fondamentale et mérite d’être connue, partagée. 

Au niveau individuel, nous pouvons toutes et tous réfléchir à comment éduquer les garçons comme une fille : permettre de pleurer, d’être triste, respecter les règles, développer le goût pour le soin des autres dans les jeux que leur propose. 

Au niveau collectif, c’est une bataille culturelle qu’il faut mener pour diffuser cette idée dans toutes les strates de la société : les comportements virilistes sont totalement ruineux, il est grand temps que les hommes acceptent de se comporter comme les femmes.