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Rentrée : la vague de démission de profs dont on ne parle pas

Juste avant les vacances scolaires, le 9 Juillet 2021, l’Insoumission publiait un article « Covid : les profs et chefs d’établissements au bout du rouleau » soulignant la détérioration des conditions de travail dans l’éducation nationale avec la crise Covid. En cette rentrée, ce ras-le-bol se traduit par une alarmante vague de démissions d’enseignants qui passe sous les radars médiatiques. Notre article.


« Les premiers résultats d’une étude publiée en juin 2021 révèlent que les chefs d’établissements sont au bout du rouleau. Cette enquête, commandée par le syndicat des chefs d’établissements SNPDEN-Unsa à l’ancien inspecteur de l’Éducation nationale Georges Fotinos et à José Mario Horenstein, médecin psychiatre, a porté sur 4 423 chefs d’établissements. Le constat est sans appel : 3 chefs d’établissement sur 4 ont admis ressentir « une baisse de leur moral », 80 % d’entre eux ont exprimé un «abattement» ou un sentiment de «dépression». 12,6 % ont reconnu avoir eu des «pensées suicidaires ou d’automutilation» au cours de l’année écoulée. La situation est grave ». L’alerte sur l’état des chefs d’établissements dans notre pays date du 9 juillet.

Les démissions de profs, une « hécatombe »


Cours en distanciel, décrochage scolaire, rythmes alternés, paperasse… La crise sanitaire a aggravé ce malaise qui pousse les chefs d’établissements mais également les enseignants à jeter l’éponge. « Avec la pandémie, les démissions ont sans nul doute augmenté », selon Rémi Boyer, fondateur et président d‘Aide Aux Profs, une association de soutien aux enseignants créée il y a quinze ans.

Du primaires au secondaire, aucun niveau n’est épargné. Dans les Pyrénées-Orientales, les démissions d’instituteurs explosent, passant de 2 en 2018-2019 à 19 l’année scolaire dernière (soit +850 % entre 2019 et 2021), selon le syndicat SNUipp-FSU. « C’est une hécatombe », selon le co-secrétaire départemental de l’organisation. Une fois acceptée, la démission est irrévocable et entraîne « la radiation des cadres et la perte de la qualité de fonctionnaire », précise le site du ministère. La marge de manœuvre est très réduite : les demandes de ruptures conventionnelles sont rejetées à 76%.

D’après les statistiques du ministère de l’éducation pour la décennie 2007/2017, les demandes de démission ont été multipliées par 4. Ils étaient 1517 enseignants a avoir démissionné en 2017 contre 367 en 2007. Des chiffres faussés, les démissions étant souvent maquillées en demande de mise à disposition. Depuis 2017, aucune mise à jour de ces chiffres n’a été publiée. Sollicité, le ministère de Jean-Michel Blanquer n’a pas répondu. Selon Rémi Boyer, le nombre de démissions se chiffrerait cette année entre « 40 000 et 60 000 ». Un nombre de départs qui, si ces chiffres sont confirmés, aurait donc explosé.

On demande toujours plus aux enseignants, avec toujours moins de moyen

Ces démissions traduisent la précarisation du métier : « depuis les années 1990, les réformes successives élargissent le périmètre de la mission des profs, incluant de l’administratif et de la bureautique, tout en diminuant leurs moyens, explique Sandrine Garcia, sociologue et auteur de l’essai Quand les profs claquent la porte (2021).

Selon cette maître de conférences en sociologie à l’université de Paris-Dauphine, « on demande toujours plus aux enseignants, avec toujours moins de moyen. Or, quand les objectifs sont inatteignables, les souffrances sont immenses et la désillusion brutale, surtout pour des métiers à vocation comme l’enseignement ».

68% des parents n’ont pas confiance dans l’éducation nationale pour endiguer le mal-être des enseignants

Selon un sondage IFOP publié ce 2 septembre 2021 et intitulé « Quand les parents notent l’école », 68% des parents n’auraient pas confiance en l’institution pour endiguer le mal-être des enseignants. Même constat quant au contenu des cours pour leurs enfants : 69 % estiment que le niveau scolaire s’est détérioré (+ 6 points par rapport à 2019).

Les coupes sèches dans les budget de l’Éducation nationale sont responsables de la dégradation de la qualité de l’Enseignement public Français. Mais les manques de budget ne sont pas seuls responsables, les lacunes de la formation initiale sont également au cœur des critiques.

Des profs jetés dans le grand bain face aux élèves sans avoir été préparés. En 2018, seuls 25 % des profs français se sentaient ainsi bien ou très bien préparés pour « le suivi de l’apprentissage et de la progression des élèves » contre 56 % de leurs homologues anglais, d’après une note du ministère parue en juin 2019.

1 prof sur 2 a déjà été en situation de burn-out

Les conséquence de cette gestion managériale à la start-up nation de l’enseignement national sont catastrophiques. Près d’un prof sur deux (46%) dit avoir déjà été en situation de burn-out au cours de sa carrière, selon un sondage PSOS publié en février dernier.

Les Chefs d’établissements ne sont pas épargnés : 80% des chefs d’établissement sont en « dépression ou ont le sentiment de déprimer » et près de 13% ont des « pensées suicidaires » d’après une enquête commandée par le syndicat des chefs d’établissements SNPDEN-Unsa publiée en Juin 2020 et relayée par notre article du 9 Juillet 2020.

7 000 suppressions de postes d’enseignants depuis le début du quinquennat

Dans ce contexte, se sont plus de 400 écoles rurales qui ont disparu à la rentrée 2019.
Les suppressions de poste dans l’éducation nationale se poursuivent : 1 800 suppressions de postes en cette rentrée, 7 000 depuis le début du quinquennat !

Face à la destruction méthodique de l’éducation nationale par plus de 30 ans de politiques néolibérales, la France insoumise propose depuis de longues années un plan de recrutement de plusieurs dizaines de milliers d’enseignants, le dégel du point d’indice et l’augmentation des salaires. Il y a urgence.