Nouveau coup dur pour Laetitia Avia. Après avoir été accusée par ses anciens assistants parlementaires d’avoir tenu des propos racistes, sexistes et homophobes en mai dernier, elle a ensuite vu sa loi « contre la cyber-haine » largement retoquée par le Conseil Constitutionnel. La députée LREM de Paris est de nouveau sous le feu des critiques après la publication d’un article de Mediapart l’accusant, avec preuves, d’avoir illégalement utilisé ses ressources parlementaires pour faire campagne aux élections municipales.
Sa permanence parlementaire utilisée plusieurs fois pour des réunions sur les élections municipales
Tous les députés le savent, il est interdit d’utiliser ses ressources parlementaires pour mener une campagne électorale. Cette règle inclut l’interdiction d’utiliser sa permanence parlementaire comme local pour organiser des réunions de campagne, et l’interdiction de faire travailler ses assistants parlementaires pour des tâches qui ne concernent pas le mandat du député. D’après les documents publiés par Mediapart, Laetitia Avia était au courant de ces règles, mais les aurait outrepassées pour la campagne des élections municipales à Paris.
Depuis septembre, Laetitia Avia aurait ainsi utilisé illégalement sa permanence et au moins deux de ses assistants parlementaires. Mediapart a recueilli plusieurs témoignages de militants LREM indiquant que plusieurs réunions concernant les municipales ont été organisée dans le local que Laetitia Avia partage avec un autre député LREM de Paris : Pacôme Rupin. Tout laisse penser que la députée était au courant de l’illégalité de sa pratique, comme en témoigne un militant : « la consigne était de ne surtout pas prendre de photo pour tenir cela discrètement. Il ne fallait pas que cela puisse être exploité par l’opposition ou la commission des comptes de campagne ».
Ses assistants parlementaires payés par l’Assemblée nationale mais travaillant sur la campagne électorale
Mais Laetitia Avia aurait aussi mobilisé au moins deux de ses assistants parlementaires sur leur temps de travail pour la campagne municipale de LREM. En septembre par exemple, elle envoie un message à Christine Mounau, qu’elle soutient pour être tête de liste LREM dans sonarrondissement : « [Ma collaboratrice] va se mettre à ta disposition pour t’aider à préparer ton dossier. Elle va aussi t’envoyer les notes de préparation de mes RDV circo ». Plus tard, en octobre, Laetitia Avia charge alors son assistante parlementaire d’écrire à sa place une lettre de motivation à envoyer à LREM pour se présenter sur la liste du XIIème arrondissement. Ensuite, son assistante doit lui préparer un mail à envoyer aux militants. Là encore, Laetitia Avia semble consciente que sa demande est illégale car elle lui précise de lui envoyer son brouillon sur son adresse mail d’En Marche et non sur celle de l’Assemblée nationale. Pour sa collaboratrice, « Elle savait qu’elle ne pouvait pas envoyer de mail [concernant la] campagne depuis l’adresse Assemblée, car cela constituait une preuve qu’elle ne respectait pas la loi ».
Encore un peu plus tard, le 6 novembe, alors que Benjamin Griveaux est toujours le candidat à la mairie de paris, Laetitia Avia oblige deux de ses assistants à venir à un meeting en leur faisant croire que c’est un événement de circonscription. Arrivés sur place, les collaborateurs s’aperçoivent qu’ils vont en réalité travailler pour la campagne électorale et gèrent la communication du meeting, en prenant notamment des photos de Benjamin Griveaux. D’après Mediapart, sur l’une des photos postée sur les réseaux sociaux à l’époque on aperçoit les deux assistants parlementaires de Laetitia Avia. Plusieurs assistants prennent une capture d’écran et pointent l’illégalité que cela représente. L’un d’eux envoie même « Tu vas finir en prison » à une assistante de Laetitia Avia qui répond « J’en peux plus. Je n’ai jamais donné mon accord ».
Aucune poursuite actuellement engagée
Il est peu probable que la direction du mouvement politique d’Emmanuel Macron ou que la présidence du groupe parlementaire LREM n’ait pas été au courant des pratiques de Laetitia Avia, d’après le témoignage de cette assistante parlementaire : « À partir de janvier, j’ai du mal à distinguer campagne et travail parlementaire. Je passais beaucoup de temps à organiser les déplacements ou à faire des notes. J’ai alerté plusieurs collaborateurs et des militants, mais Avia ne m’écoutait pas. Mes collègues et moi avions vraiment peur, d’autres collaborateurs nous disaient que le procureur pouvait nous convoquer et qu’on pouvait nous considérer comme complices ».
Contactée par Mediapart, la commission nationale des comptes de campagne juge que toutes ces pratiques sont, si elles « sont avérées après investigation », assimilables à « des infractions à la loi ». Les Républicains à Paris ont décidé de saisir la justice sur cette question.
Par Flore Cathala.