En 2024, L’Humanité révélait le plan tentaculaire du Projet Périclès, piloté et financé par le milliardaire Pierre-Edouard Stérin. À travers plusieurs structures, financements, aides plus ou moins cachées, cet homme d’affaires, catho-tradi à la Bolloré œuvre à une victoire de l’extrême droite aux prochaines élections locales et nationales (par la formation d’élus par exemple), mais aussi en influant sur la bataille des idées.
De tels financements en faveur de l’extrême droite posent question, sur la dangerosité mais aussi la légalité du procédé. C’est pourquoi le député insoumis Antoine Léaument est à l’initiative d’une commission parlementaire sur le financement de la vie publique, notamment par Pierre-Edouard Stérin. Convoqué devant la représentation nationale, ce dernier a, par deux fois, refusé de se rendre devant les députés. Mais Antoine Léaument ne compte pas abandonner le bras de fer si vite. Notre article.
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Pierre-Edouard Stérin : un homme discret
C’est que cet homme d’affaires n’aime pas trop se mettre en avant, par modestie sans doute. Ou bien parce que sa proximité trop affichée avec l’extrême droite serait mauvaise pour les affaires. Et il n’aime pas qu’on mette le nez dans ses affaires.
C’est pour cela qu’il a déjà menacé de poursuites, en 2024, le journaliste de L’Humanité qui a révélé au public les sombres manœuvres du milliardaire et de ses fondations. C’est probablement pour la même raison qu’il a refusé, malgré l’interdiction, de se rendre devant la commission d’enquête parlementaire sur l’organisation des élections, initiée par Antoine Léaument. Ce dernier a dénoncé les atermoiements du milliardaire d’extrême droite dans un communiqué.
Cette convocation avait pourtant pour but de mettre en lumière les nombreux liens qu’entretient Stérin dans toutes les chapelles de la droite médiatique, culturelle et politique : les trois « piliers » visés par le projet Périclès. Le fonctionnement très opaque de ces structures pose aussi des questions sur la légalité ou non des financements des divers rejetons de Périclès.
Il est évident que Pierre-Edouard Stérin est au centre des décisions de Périclès, agrégat de sociétés, associations et structures diverses. Et pourtant, il s’efforce d’effacer toute trace de son passage : son aide apportée à l’extrême droite menace de tuer la République, et Stérin ne veut surtout pas laisser d’empreintes sur l’arme du crime.
Et pourtant le milliardaire cultive ses réseaux (il a même pour habitude de « noter » sur 10 chaque personne qu’il rencontre), dans son but d’union des droites, grâce à un empire d’influence à ses pieds.
Une organisation tentaculaire
On se croirait dans un film d’espionnage, avec ses organisations secrètes tentaculaires. Au total, Stérin prévoit d’injecter 150 millions d’euros pour financer des instituts de sondages à son service, des médias, des élus partageant son idéologie réactionnaire… On voit par exemple que nombre de « journalistes » de Frontières ont été formés et sont liés à Périclès. De la même manière, le bras droit de Stérin a reconnu devant les députés avoir financé une campagne d’affichage de Frontières en décembre dernier.
Problème : aucune campagne d’affichage du média n’a eu lieu fin 2024. Peut-être pensait-il aux dernières affiches de Frontières, qui ont participé à traîner LFI dans la boue médiatique… Le même bras droit de Stérin a par ailleurs reconnu publiquement que c’était bien Stérin qui était au centre du projet Périclès, de ses holdings, la source de ses financements.
Car en juillet 2024, au moment où L’Humanité a révélé l’affaire, le milliardaire ne savait pas sur quel pied danser : aux uns, il assumait l’existence de Périclès, aux autres, il nie toute implication. Aujourd’hui, Stérin assume davantage, mais fuit tout de même les questions un peu trop embarrassantes.
Les élections municipales de 2026, pourraient être une démonstration de force pour Stérin et sa stratégie, qui ambitionne de faire gagner pas moins de 300 mairies par le Rassemblement National ! Quant aux conséquences de la non-venue de Stérin devant les députés, Antoine Léaument le convoque une ultime fois pour mardi 20 mai. S’il ne vient pas, l’homme d’affaires risque jusqu’à deux ans de prison et 7 500 euros d’amende.
Par Alexis Poyard