Bart De Wever (prononcé « de ouéveur ») est le chef de gouvernement le plus à droite que la Belgique ait connu. Ses intentions sont claires : casse sociale, désastre écologique, massacre des conquis sociaux des Belges les plus vulnérables. L’Insoumission se penche aujourd’hui sur la composition de son gouvernement et les intentions de ce dernier pour les cinq années à venir. Notre article.
Bart de Winner ?
C’est officiel. Depuis le 3 février 2025, Bart De Wever, figure de la droite flamande et partisane d’un nationalisme flamand des plus ardents, est Premier ministre de la Belgique. Un revers pour les travailleurs, les étudiants, les retraités et les plus vulnérables. Après huit mois de longues négociations, la responsabilité de former un gouvernement a été donnée à Bart De Wever, chef de file du parti N-VA (Nieuw-Vlaamse Alliantie ou Nouvelle Alliance Flamande) pour les élections législatives fédérales de juin 2024.
La Belgique en miroir politique de la France
De l’autre côté de la frontière, que penser de la prise de fonction d’un tel homme ? Revenons aux fondamentaux. La Belgique, on l’entend tout le temps, est un pays de coalitions. Le 9 juin dernier, le parti N-VA arrive pour la troisième fois consécutive en tête au niveau national aux élections législatives fédérales belges. Pourtant, ni en 2014, ni en 2019, la responsabilité de former un gouvernement ne lui avait été confiée.
Ce parti est souvent jugé très radical sur les questions de société, et même séparatiste sur les relations entre les Flandres et la Wallonie. Après cinq ans de coalition dite « Vivaldi », en référence aux quatre saisons que représentent les quatre couleurs des forces politiques alliées en son sein (le rouge des socialistes, le vert des écologistes, le bleu des libéraux, le orange des chrétiens-démocrates), la Belgique ouvre une page nouvelle de son histoire politique.
Le chic de la droite : du nouveau avec le vieux monde
Mais la nouveauté ne fait pas tout. Après huit mois de négociations, une nouvelle coalition, dite « Arizona », en référence aux couleurs du drapeau de cet État américain qui sont aussi celles des partis ici réunis (le jaune des nationalistes flamands, le bleu des libéraux, le orange des chrétiens démocrates et le rouge du parti socialiste flamand), s’est formée. Elle ouvre une période de saignée austéritaire inédite pour les travailleurs belges, les étudiants, les retraités, les personnes en situation de handicap et les malades.
Une bloeden (saignée) signée de Wever.
En somme, la coalition Arizona exige vingt-deux milliards d’euros d’économies dans le prochain budget de la Belgique. Un sacrifice qui, comme toutes les cures d’austérité dans le monde, va peser sur les plus vulnérables. Déjà, des économies ont été exigées sur les pensions des retraités et les allocations handicap. On ne cherche donc pas l’argent au bon endroit. Les chefs de file des partis qui composent la coalition Arizona ne semblent pas en phase avec la réalité sociale du pays.
Maxime Prévot, chef de file des Engagés (centristes libéraux) aux élections du 9 juin et nouveau vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, affirmait lors du débat télévisé du 16 mars 2024 qu’il fallait combattre un soi-disant « assistanat » (mais pas celui des plus riches). De son côté, Didier Reynders, ancien ministre de la Défense, et membre du Mouvement Réformateur (MR, droite libérale) est accusé d’avoir blanchi plusieurs millions d’euros durant ses prises de fonction successives.
Quant à Benoît Piedboeuf, député fédéral du MR, celui-ci affirmait le 8 février 2025 devant la chambre des représentants rencontrer « plein de gens qui sont heureux de travailler », alors que le nombre d’accidents du travail dans le secteur public belge stagne à 40 000 par an depuis 2021 et implique parfois des séquelles physiques graves. Bref, un gouvernement dont la politique ne compte pas s’attaquer aux plus riches, et n’envisage pas de répartir plus équitablement les richesses et le temps de travail.
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Une lueur dans ce désert de l’Arizona
Tout n’est pas noir. Il faut d’abord souligner la bonne progression du Parti du Travail de Belgique (PTB), alliés des insoumis dans le groupe de La Gauche co-présidé par Manon Aubry. Le PTB a, le 9 juin, obtenu 15 députés sur 150 à la Chambre des Représentants (contre 12 en 2019 et 2 en 2014). La figure la plus médiatique du parti, son président Raoul Hedebouw, gagne sans cesse en popularité depuis ses prises de fonction au Parlement fédéral le 19 juin 2014.
Le PTB, c’est 18 députés ouvriers, tous parlements confondus (fédéral, européen, régional), et aucun élu ne vivant au-dessus du salaire moyen belge, à savoir 2300 euros par mois. Ce, alors que la rémunération d’un député fédéral est de 8 000 euros nets par mois, et celle d’un ministre de 11.000 euros nets par mois.
L’union populaire sur le terrain et dans les urnes
Le PTB a gagné du terrain sur une plateforme progressiste de taxation des plus riches, de ponction fiscale sur les profits vertigineux des grandes entreprises, et d’augmentation des salaires les plus bas et des minima sociaux. Un programme proche des préoccupations principales de la majeure partie de la population. Et une progression de 100 000 voix entre les élections de 2019 et celles de 2024. Une formule qui permet au PTB d’être le premier parti à gauche à l’échelle nationale en Belgique, devant le PS wallon d’un côté et le Vooruit (parti socialiste flamand) de l’autre.
Le PTB est devenu le quatrième parti du Plat Pays, talonnant la droite libérale du MR. Par ailleurs, le mouvement a répondu présent à l’appel des syndicats pour une journée nationale de mobilisation le jeudi 13 février. Le mot d’ordre : mobilisation contre l’annonce les coupes budgétaires et sociales massives du gouvernement Arizona annoncées dès son investiture. Un succès avec 100.000 manifestants dans tout le pays, et le mot d’ordre « on n’est pas des citrons ».
Si le peuple reste uni et mobilisé contre la casse de ses conquis sociaux, alors Bart De Wever peut plier et la donne peut changer. L’avenir de la Belgique est donc entre les mains d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire du pays. Mais si tout était joué d’avance, cela se saurait. Alors dans la rue comme dans les urnes, les Belges peuvent démontrer la force du nombre et refuser la pire cure d’austérité de leur histoire.
Par Bastien
Crédits photo : « Bart De Wever, Vlaams politicus en partijvoorzitter van de Nieuw-Vlaamse Alliantie.hier tijdens openingscollege politicologie (bij Prof. Carl Devos) aan UGent. », Michiel Hendryckx, CC BY-SA 3.0, Wikimedias Commons, pas de modifications apportées.