Ce mercredi 26 mars, le lobby ELNET France, porte voix européen de la propagande du gouvernement d’extrême droite israélien, organisait un meeting à Paris. Grand-messe de l’islamophobie et de l’apologie de crimes contre l’humanité, émaillé par d’innombrables déclarations négationnistes de l’Histoire et de l’horreur en cours à Gaza, financé par le milliardaire d’extrême droite Pierre-Edouard Stérin, ce meeting comptait parmi les plus zélés soutiens de Benjamin Nethayahu et de son génocide.
À leurs côté, deux ministres de la République, Manuel Valls et Bruno Retailleau, invités d’honneur du rassemblement, y ont pris la parole avec et devant ceux pour qui “il manquait [aux Palestiniens] un génocide”, pour qui “tous les humanitaires, tous les fonctionnaires des organisations internationales qui vivent à Gaza sont des agents du Hamas”.
Alors que les révélations de la presse montrent combien le lobby ELNET pèse de tout son poids sur des centaines de parlementaires, ministres et anciens ministres français, alors que depuis le 18 mars les massacres reprennent à Gaza et que Netanyahu attaque aujourd’hui le Liban, la France insoumise appelle à la création d’une commission d’enquête sur les ingérences politiques de cette organisation. Notre article.
“Il leur manquait quelque chose pour être à égalité avec les Juifs, il leur manquait un génocide” : Valls et Retailleau prennent la parole aux côtés des pires génocidaires
Créée en 2010, la branche française d’ELNET – qui dispose également d’antennes en Belgique, au Royaume-Uni, en Allemagne ou en Italie – est installée rue Saint-Dominique, à proximité immédiate de l’Assemblée nationale. ELNET – pour “The European Leadership Network” – se définit comme une organisation non-gouvernementale “pour le renforcement des relations Europe-Israël”. Il s’agit en fait d’un organe de propagande et de lobbying de l’extrême droite israélienne, de Benjamin Netanyahu et de son génocide.
C’est donc en cette qualité que ce 26 mars à Paris, ELNET, par le biais de son satellite “Agir Ensemble”, a organisé un meeting intitulé “Pour la République, la France contre l’islamisme”. Notamment financé par des structures gravitant dans la sphère du milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin, l’événement a rassemblé parmi le pire des islamophobes et négationnistes soutiens de Benjamin Netanyahu.
Ainsi par exemple de Fadila Maaroufi, pestiférée des médias belges, qui déclarait lors d’un colloque organisé par ELNET France l’année dernière que “la seule chose que les musulmans regrettent, c’est qu’Hitler n’ait pas terminé ce qu’il a commencé” et qui est associée de l’homme d’affaires Laurent Minguet qui pense “le QI des Noirs […] inférieur au QI des Blancs”. Ainsi également de Florence Bergeaud-Blackler, proche d’Éric Zemmour, complotiste notoire et relai en France des thèses de Robert Spencer, inspirateur du terroriste néonazi Anders Breivik, qui massacra 77 personnes en Norvège en 2011.
Par ailleurs, le directeur exécutif d’ELNET France, évidemment présent ce 26 mars, déclarait le 7 décembre 2023 au micro de la radio communautaire Radio J que “tous les journalistes, tous les humanitaires, tous les fonctionnaires des organisations internationales qui vivent à Gaza sont des agents du Hamas, tous !”. Il évoquait aussi, en complète violation du droit international, la “responsabilité collective” du peuple palestinien à Gaza, et s’évertue à contester les chiffres de l’UNICEF sur le nombre d’enfants tués à Gaza.
Mais soudain, alors que se succèdent les insultes contre les musulmans et la France insoumise, voilà que les applaudissements résonnent pour deux invités d’honneur du rassemblement : les ministres Bruno Retailleau et Manuel Valls.
Aux côtés de Jean-Michel Blanquer, Christian Estrosi, François-Xavier Bellamy et autres éditorialistes ultra-réactionnaires du Figaro, ils seront donc là pour croiser, et peut-être même pour applaudir Éric Danon, ancien ambassadeur de France en Israël lorsque ce dernier déclare : “il n’y a pas de génocide mais il y a une nécessité absolue, pour les islamistes et les pro-Palestiniens, de dire qu’il y a génocide parce qu’ils en ont besoin pour parachever une identité palestinienne mimétique de celle des Juifs. L’identité palestinienne jusqu’à la création d’Israël, c’est une adversité à ceux qui arrivent. […] Mais il leur manquait quelque chose pour être à égalité avec les Juifs, il leur manquait un génocide.”
Applaudit, Bruno Retailleau l’a en tout cas été à l’issue d’une intervention où, déclarant voulant mettre “à bas le voile”, il a poussé encore davantage la revendication de son islamophobie. Mais quoi d’étonnant à cette ovation lorsque l’on sait que le ministre de l’intérieur apparaissait tout sourire en 2022 aux côtés de représentants d’ELNET, et lorsque l’on sait que plusieurs dizaines de parlementaires de son camp ont participé à des voyages en Israël tous frais payés par l’organisation, divers cadeaux et privilèges inclus ?
Entre 2017 et 2024, au moins 91 séjours tous frais payés pour des parlementaires français : de l’influence d’ELNET sur le parlement et le gouvernement
En décembre 2024, Mediapart révélait que près d’une centaine de parlementaires français, en majorité issus des bancs de la Macronie et des Républicains et pour certains anciens ou futurs ministres, ont été envoyés en Israël pour des séjours entièrement financés par ELNET, pour un coût de 4 000 euros par participant. En tout, ces initiatives ont représenté 101 des 666 déplacements déclarés par les parlementaires français sur la période, soit plus de 15 % d’entre eux.
Ces déplacements visant à influencer les prises de positions des élus en faveur du gouvernement d’extrême droite israélien ont impliqué diverses rencontres avec des officiers de l’armée israélienne, des visites de la Knesset (le Parlement israélien) ou de bases militaires israéliennes.
Manuel Valls actuel ministre des outre-mers, Annie Genevard actuelle ministre de l’Agriculture, Yaël Braun-Pivet présidente de l’Assemblée nationale, Françoise Gatel actuelle ministre chargée de la Ruralité, Benjamin Haddad actuel ministre chargé de l’Europe, Aurore Bergé, Caroline Yadan et des dizaines d’autres députés macronistes ou des Républicains : toutes et tous ont participé à ces voyages, parfois à plusieurs reprises, parfois même pour se prendre en photo aux côtés de Benjamin Netanyahu.
ELNET a aussi conduit un lobbying intense auprès de la présidente de l’Assemblée nationale en lui demandant de sanctionner le député apparenté à la France insoumise Aymeric Caron en raison de son engagement pour dénoncer le génocide en cour à Gaza.
Pour lutter contre son ingérence, la France insoumise a déposé une proposition de résolution pour une commission d’enquête sur le lobby ELNET
Fort de tout ce travail d’influence, c’est donc tout logiquement que le directeur d’ELNET France a récemment déclaré : “je reste relativement optimiste sur la capacité de changer les paramètres du discours diplomatique. (…) Je rappelle que l’immense majorité du parlement [français] soutient Israël. (…) et c’est le résultat de décennies de travail.”
L’influence croissante exercée par ELNET au sein du Parlement français reflète une montée en puissance des pratiques de lobbying en faveur de l’extrême droite israélienne dans les sphères politiques nationales. Cette situation soulève des interrogations majeures quant à l’indépendance de certains parlementaires français et appelle à une évaluation approfondie.
En ce sens et alors qu’il aura fallu 8 ans à ELNET France pour se conformer à l’exigence de son inscription au répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique, la présidente du groupe de la France insoumise à l’Assemblée nationale Mathilde Panot, le député LFI Thomas Portes et le député Aymeric Caron ont déposé le mois dernier une proposition de résolution demandant une commission d’enquête sur le lobby ELNET.
“Face à ces dérives inquiétantes et à l’impact manifeste des pratiques de lobbying, il devient impératif d’identifier précisément les mécanismes d’ingérence exercés par ELNET et, le cas échéant, de les limiter” notent les trois député·es.
Alors que le gouvernement d”extrême droite israélien bombarde aujourd’hui le Liban, alors que la journée la plus meurtrière du génocide à Gaza à eu lieu la semaine dernière en dépit du cessez-le-feu et que les Gazaouis sont sans aide humanitaire depuis 3 semaines, le criminel de guerre Netanyahu doit être arrêté et sa folie meurtrière avec lui.
En France pourtant, voilà des mois que les soutiens inconditionnels à Israël redoublent d’effort pour nier les massacres. Voilà des mois qu’au gouvernement comme au parlement, on se rend complice des pires atrocités. Pour comprendre cette situation, nul doute qu’une attention particulière doit être accordée au lobbying d’ELNET France sur des responsables politiques français, à la présence de ministres de la République au grand gala des génocidaires, et en définitive, au sacrifice de dizaines de milliers de vies palestiniennes pour des voyages all inclusive à Tel-Aviv.
Par Eliot Martello Hillmeyer