L’UNI : ce « syndicat » étudiant truffé de nazis

UNI. De récentes révélations, dans plusieurs villes étudiantes du pays, font éclater au grand jour une tendance qui s’observait depuis déjà plusieurs années. L’Union Nationale Interuniversitaire (UNI), l’organisation étudiante ancrée à droite, a bel et bien opéré sa mue extrême droitière. Autrefois proche de la droite traditionnelle (UMP puis LR), avec qui elle partage ses […]

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UNI. De récentes révélations, dans plusieurs villes étudiantes du pays, font éclater au grand jour une tendance qui s’observait depuis déjà plusieurs années. L’Union Nationale Interuniversitaire (UNI), l’organisation étudiante ancrée à droite, a bel et bien opéré sa mue extrême droitière.

Autrefois proche de la droite traditionnelle (UMP puis LR), avec qui elle partage ses militants, l’UNI a suivi ses aînés dans leurs dérives. En 2022, beaucoup de jeunes LR (si si, ça existe !), aussi membres de l’UNI, se sont laissés tenter par l’aventure Zemmour, alors qu’en 2024, Éric Ciotti, nouveau supplétif du RN, a été suivi dans sa scission de LR par nombre de jeunes. En août 2021 déjà, de jeunes LR appelaient à la candidature d’Éric Zemmour.

Le « syndicat » étudiant historique de la droite a simplement suivi les évolutions de son camp politique, en voie de radicalisation depuis notamment les années Sarkozy (2007-2012) et la Manif pour Tous (2012-2013). Il est également challengée sur sa droite depuis 2015, date à laquelle son aile droite scissionne pour créer la Cocarde Étudiante. Cette surenchère à qui sera le plus raciste, réactionnaire, misogyne… remonte à la surface, surtout en période d’élections étudiantes, comme c’est le cas aujourd’hui. Des faits de violences, de misogynie, d’antisémitisme et d’apologie du IIIe Reich ont été dévoilés sur la place publique ces derniers jours. Plusieurs sections locales de l’UNI sont en cause, ainsi que les instances nationales du syndicat. Notre article.

Un lourd passif pour l’UNI

Évidemment, l’UNI n’en est pas à son premier scandale. Dès 2022, la section dijonnaise était mise en cause pour les mêmes faits qu’aujourd’hui. Son ancien responsable régional, qui occupait le même poste chez les jeunesses Zemouriennes, était familier des chants nazis et des saluts qui vont avec. Pourtant, ce responsable du « syndicat » d’extrême droite, Jurgens Tyll, est celui qui a déposé la liste UNI pour les élections étudiantes de… 2024. Soit 2 ans après le scandale.

À en croire sa story Instagram, Tyll a agi avec la bénédiction, voire sur la demande de Mathis Gachon, encore aujourd’hui délégué national de l’UNI. Cependant, le même Mathis Gachon et son syndicat se défendent lorsqu’on brandit devant eux, preuves à l’appui, des accusations en racisme, antisémitisme…

Pour aller plus loin : Hommage à Jean-Marie Le Pen, vivier de recrutement pour le RN, agressions… Sous les cravates, la réalité de la « Cocarde étudiante »

L’UNI Strasbourg, entre antisémitisme et misogynie

Tout commence par la publication par le collectif Golem d’un jeu de cartes interne à l’UNI Strasbourg. Misogynie, antisémitisme… tout y passe ! Puis une enquête de Mediapart et de Rue89Strasbourg enchaîne les révélations, tant sur les changements de ligne du « syndicat » que sur son ambiance interne.

Sans surprise, les femmes y sont marginalisées : le président de la section, Samy Amokrane, entretient cette ambiance viriliste, qui réduit les femmes à des « femelles », ou des « vagins ». Même chose pour les juifs et les musulmans, pointés du doigt et insultés.

Si Amokrane et ses sbires sont proches de Reconquête!, l’ancien président de la section strasbourgeoise, encarté à LR, témoigne du changement de ligne et d’ambiance après son départ. Si les anciens membres étaient plutôt tendance LR, les nouveaux arrivants, entraînés par Amokrane sont encartés à Reconquête!, voire au RN.

Sur l’une des images antisémites diffusées, on reconnaît le vice-président de la section, Vivien Boresy, également assistant de la députée européenne RN Mathilde Androuët ! Boresy y incarne « Jewvien Jacob Borevski » qui « dérobe les gains du joueur précédent et y ajoute 10 % ». Une utilisation assumée des pires clichés antisémites.

Suite à ces révélations, et celles de discussions internes du « syndicat », le national a suspendu sa section strasbourgeoise et son président. Vaine tentative de se laver de tout soupçon : les dirigeants nationaux de l’UNI étaient depuis longtemps au courant des « dérives » de sa branche alsacienne. Et on a vu comment son délégué national demande à un nazi assumé de déclarer sa liste aux élections de 2024.

Le même Mathis Gachon, tout en suspendant la section strasbourgeoise, minimise ses faits… Vu qu’il est lui-même mis en cause. Un signe suprémaciste blanc ? « Mon geste voulait simplement dire qu’on est bien ». Le jeu de cartes misogyne et antisémite ? « Pour nous, il est impossible que des membres de l’UNI Strasbourg en soient les auteurs », poursuit-il.

Autre stratégie pour faire oublier l’ensauvagement de ses sections, le « syndicat » pointe des « violences » et « menaces » subies par ses militants, dénonçant par une expression floue (donc bien pratique) les « antifas ». À Strasbourg, l’Université a démenti ces accusations, tandis que les députés Sandra Regol (Écologistes) et Emmanuel Fernandes (LFI) ont fait un signalement au parquet de Strasbourg.

Toulouse : LR collabore avec des néonazis ?

L’activiste Ilies Djaouti a dévoilé des mêmes faits concernant l’UNI Toulouse. Sur ses images, un militant UNI effectue un salut nazi dans l’enceinte de la faculté toulousaine. Sur d’autres, un élu étudiant est traité de « sale youpin » par un autre membre du « syndicat ».

Une situation honteuse, qui rappelle étrangement celle de Strasbourg, dénoncée par le député LFI François Piquemal. D’autant que l’UNI Toulouse affiche aussi sa proximité avec le maire LR de la ville, Jean-Luc Moudenc, qu’on peut voir poser aux côtés du même étudiant filmé en train de faire un salut nazi. Entre les « Républicains » et « sale youpin », il y a un lien, qui s’appelle UNI.

Il faut dire que si la dynamique nationale voit les LR se faire remplacer par des jeunes militants plus d’extrême droite qu’eux à l’UNI, des exceptions existent, comme à Toulouse, baronnie des LR. Dès la sortie du scandale sur la branche du « syndicat » à Toulouse, les Jeunes Républicains 31 se sont empressés de communiquer… pour soutenir le « syndicat » d’extrême droite. Là encore, des agressions des « antifas » contre le « syndicat » sont invoquées.

Et pour cause, les jeunes LR ont massivement investi le bureau de l’UNI Toulouse en septembre dernier. Ils ne disent par conséquent pas un mot des saluts nazis et autres insultes antisémites dont l’organisation étudiante est accusée. Peut-être que les fameuses violences « antifascistes » viseraient… des fascistes !

Autre preuve qu’un arbre pourri donne aussi des fruits pourris. Un étudiant toulousain fin connaisseur de ce milieu décrit des simulations parlementaires dans la Cité Rose. Bien que n’ayant pas lieu dans un cadre syndical, plusieurs membres de l’UNI Toulouse (par ailleurs proches du RN) affichent leurs préférences politiques et historiques.

« Ils étaient du genre à déposer des amendements nommé Travail-Famille-Patrie, pendant la réforme des retraites », relate l’étudiant évoqué plus haut. Une référence directe à la dictature Vichyste de 1940-1944, connu pour sa politique antisémite et de Collaboration avec les nazis.

Néanmoins, l’appartenance partisane des membres de l’UNI toulousaine a évolué depuis. La Cocarde Étudiante, proche du RN, tente de s’implanter depuis 2024. Les militants lepénistes ont donc déserté l’UNI pour grossir les rangs du nouveau venu, laissant le champ libre à LR pour reprendre la main sur l’organisation « historique ».

Caen : l’extrême droite force le passage

Contre l’austérité qui s’empare des facultés, les étudiants de Caen bloquent leur lieu d’étude en protestation. Face à eux, les organisations d’extrême droite (UNI et Cocarde) se coalisent et violentent les étudiants. Un salut nazi a même été filmé par l’un d’eux : leurs motivations idéologiques font peu de doute.

Des violences dénoncées par le syndicat étudiant Union Pirate Caen, dans un communiqué paru ce jeudi, qui pointe aussi du doigt le rôle trouble de l’université.

La défense des instances nationales du « syndicat » ne tient pas la route. Même lorsqu’elles dénoncent les agissements de leurs militants, elles relativisent les accusations. Toute l’histoire récente de l’organisation montre au contraire que les « dérapages » de l’UNI trahissent une évolution idéologique profonde, partagée tant par la base que par les chefs à plume.

Alexis Poyard

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