Le retour de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ? Jean Pisani-Ferry n’est ni gilet jaune, ni insoumis. Cet ancien économiste d’Emmanuel Macron, à l’origine de son programme économique de 2017, défend pourtant le rétablissement de l’ISF face à l’urgence climatique. Un rapport, commandé par Élisabeth Borne, présenté ce lundi 22 mai, que l’économiste a piloté avec Selma Mahfouz avec l’appui de France stratégie et de l’Inspection Générale des Finances, détaille comment atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 47,5% par rapport à 2005 d’ici à 2030 et viser la neutralité carbone en 2050, conformément aux engagements de la France.
Le rapport préconise une solution limpide face à l’urgence climatique : l’instauration d’un prélèvement exceptionnel sur le patrimoine financier des 10 % de ménages les plus aisés. Taxer les riches pour financer la bifurcation écologique ? Une solution qui rapporterait 5 milliards par an pendant 30 ans, soit 150 milliards d’euros de recettes selon le rapport. 5 milliards d’euros par an ? Exactement le montant que rapportait en 2015 l’ISF, avant sa suppression par Emmanuel Macron en 2017. Les 500 plus grandes fortunes françaises ont vu leur magot doubler en seulement 4 ans, passant de 570 milliards en 2017 à plus de 1000 milliards d’euros en 2021. Pour rappel, les ultra-riches ne payent que 2% d’impôts (source : Gabriel Zucman), le CAC 40 seulement 4,5% (l’Obs), il y a de quoi faire pour sauver l’humanité.
Rétablir l’ISF pour financer la bifurcation écologique ? Cette proposition fracture le gouvernement. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, s’est montré ouvert à cet ISF climatique. Il a été immédiatement recadré par Bruno Le Maire et Olivier Véran, porte-parole du gouvernement. Le sempiternel argument invoqué, une fois n’est pas coutume, est « il y a trop d’impôts en France » (lire notre Désintox à ce sujet). Un « argument » balayé par l’ex-économiste en chef d’Emmanuel Macron. Savoureux. Si Jean Pisani-Ferry n’est pas un insoumis, il permet de révéler en revanche l’extrémisme du camp présidentiel. Emmanuel Macron, un néolibéral radicalisé, un forcené de plus en plus seul à défendre une idéologie désuète. L’ISF climatique est pourtant une proposition de justice fiscale : le patrimoine financier moyen des 1% des ménages avec les plus hauts revenus émet en effet 66 fois plus de gaz à effet de serre que celui des 10% des ménages avec les revenus les plus faibles (rapport Greenpeace, 2020). Face à l’urgence climatique absolue, même l’ancien économiste de Macron le dit : il est urgent de taxer les riches qui détruisent la planète.
