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Désintox : non, les riches ne vont pas quitter le pays si on les taxe

« Si on les taxe, les riches vont se barrer ». Qui n’a jamais entendu cette affirmation ? Elle fait partie du « bon sens » de l’idéologie hégémonique martelé chaque jour sur les plateaux télé. Pourtant, cette affirmation relève du fantasme. Comme les chars russes qui devaient envahir l’Élysée en 1981. Non, les riches ne vont pas se barrer.

Premièrement, beaucoup d’ultra riches et de grands groupes ne payent déjà pas leurs impôts en France, ou à des taux très faibles par rapport aux TPE et PME, ça s’appelle l’optimisation ou l’évasion fiscale. Deuxièmement, quand l’impôt sur la fortune (ISF) existait, la part de contribuables redevables de l’ISF partis à l’étranger était… ridicule : de l’ordre de 0,1% à 0,2%. Troisièmement, des taxes sur les grandes fortunes existent et ont déjà existé dans l’Histoire, et les riches ne sont pas partis pour autant. Aux États-Unis, berceau du communisme, les hauts revenus ont même été taxés à… 91% ! Incroyable mais vrai : pendant près de 50 ans, les États-Unis ont vécu avec un taux marginal d’imposition sur les très hauts revenus proche de 80%. Sans que les riches ne quittent le navire. Et même si l’envie leur prenait de partir, une solution existe : l’impôt universel. Là aussi mis en place par les États-Unis, l’impôt universel permet de poursuivre les exilés fiscaux jusqu’en enfer s’il le faut. Notre article.

L’insoumission.fr lance une nouvelle série : « Désintox économique ». L’objectif : apporter des outils à nos lecteurs pour participer à la bataille culturelle contre la propagande économique véhiculée tous les jours par les médias traditionnels. Notre but : vulgariser les débats économiques pour les rendre accessibles au plus grand nombre. L’adversaire : les milliardaires qui détruisent la planète et les humains, et qui possèdent les médias dominants. Nos alliés dans la bataille : nos économistes et vous, nos lectrices et lecteurs.

Les assistés d’en haut, parasites et séparatistes

Le regretté Christian de Brie, journaliste au Monde Diplomatique, nous a quitté ce weekend. Il nous a laissé un article très précieux « Le fléau de l’assistanat ». Si vous lisez l’insoumission.fr, vous savez de quels assistés on parle : des assistés d’en haut. Ceux qui confisquent toutes les richesses en exploitant le travail des autres. Des 5 milliardaires qui détiennent autant que 27 millions de personnes dans ce pays. Pourquoi ne pas les taxer ? Pourquoi ne pas prendre moins de 2% de la fortune des 42 milliardaires pour financer nos retraites ? Car les riches risqueraient de « se barrer ». L’argument massue martelé à longueur de plateaux.

Alors, si votre tonton de droite vous assène cet argument à Noël, voici 3 points que vous pourrez lui rétorquer pour le manger avant la buche :

1) Roosevelt a taxé les hauts revenus à 91% et pendant 50 ans les États-Unis ont vécu avec un taux marginal d’imposition sur les très hauts revenus proche de 80%

Incroyable mais vrai : une taxe à 91% sur les hauts revenus. Dans un pays communiste ? Non, aux États-Unis d’Amérique ! Sous la présidence de Roosevelt. Mieux : pendant près de 50 ans, les États-Unis ont survécu avec un taux marginal d’imposition sur les très hauts revenus proche de… 80% ! Ce qui n’a pas empêché les États-Unis de rester la première économie mondiale. Non, les riches n’ont pas fui le navire.

Ce week-end, le président américain a jugé « scandaleux » les gigantesques bénéfices des compagnies pétrolières. Joe Biden a appelé à mettre en place une « taxe minimale » sur les milliardaires. En France, le groupe Total vient de réaliser 20,5 milliards d’euros de profit, le bénéfice net le plus élevé de son histoire. Pourtant, le ministre de l’Économie affirme : « les super-profits, je ne sais pas ce que c’est ». Alors que la Grande Bretagne, la Hongrie, la Bulgarie et l’Espagne l’ont déjà mise en place, que l’ONU et l’OCDE la préconise, le parti présidentiel et le Rassemblement national votent contre une taxation des super-profits à l’Assemblée nationale.

2) La part de contribuables redevables de l’ISF partis à l’étranger était de l’ordre de… 0,1% à 0,2%

Les riches vont se barrer ? Quand l’impôt sur la fortune (ISF) existait encore, la part de contribuables redevables de l’ISF partis à l’étranger était… ridicule. Selon un rapport de la Direction générale des dépenses publiques datant de 2012, ils étaient au nombre de… 587 personnes seulement à être partis cette année là. Sur un totale de 290 000 contribuables soumis à cet impôt. Soit 0,2% du total. Un exode massif ! En 2001, ils n’étaient que 384 sur 269 448 personnes, soit 0,14% du total, selon l’Union SNUI Sud Trésor Solidaires. « Il n’existe aucune hémorragie de ce côté-là » confirme l’économiste Thomas Piketty. La seule hémorragie qui existe c’est celle des grands groupes qui fuient massivement l’effort collectif par l’optimisation fiscale, faisant peser l’impôt en proportion beaucoup plus importante sur les TPE et PME. Les gros payent (très) petits, et les petits payent gros.

Sept ans plus tard, en 2008, le nombre d’exilés fiscaux redevables de l’ISF avait explosé, avec 821 installations hors du territoire. Sauf que dans le même temps, le nombre d’assujettis avait lui aussi explosé, avec 565 9636 contribuables. Le taux, 0,14%, restait lui inchangé. Et la suppression de l’ISF n’a pas permis de faire revenir les riches, contrairement à l’argumentaire d’Édouard Phillipe pour tenter de convaincre les Gilets Jaunes. Peu importe, là encore, la rationalité économique, peu importe les rapports de France Stratégie, institut rattaché à Matignon, démontrant que la suppression de l’ISF et l’instauration du Prélèvement forfaitaire unique (PFU) sur les revenus du capital ont eu un seul effet : faire exploser les revenus des 0,01% les plus riches.

3) Si les riches essaient de se barrer, une solution existe : l’impôt universel

Et si l’envie prenait les riches de se barrer, une solution existe, déjà mise en place aux… États-Unis. Une solution magique : l’impôt universel. On pourchasse les délocalisés fiscaux où qu’ils se trouvent pour qu’ils passent à la caisse. On demande à nos voisins la liste de nos ressortissants, et, comme on le fait en cas de problème de santé sur une terre étrangère, faute de rapatrier leur corps, on rapatrie l’argent que ces séparatistes d’en haut doivent à la collectivité.

Les riches détruisent l’humain et la planète : 63 milliardaires polluent plus que la moitié des Français. 5 milliardaires possèdent autant que 27 millions de personnes dans le pays. Et oui, il est possible de les taxer et de partager les richesses. C’est même urgent. Une taxe de 2% sur la fortune des 42 milliardaires suffirait à financer nos retraites (12 milliards par an, selon le rapport du COR). Qu’est-ce qu’on attend pour taxer les super-profits ?

Par Pierre Joigneaux.