La vice-présidente du groupe parlementaire de La France insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, a démolit méthodiquement le projet de loi de pass sanitaire du gouvernement actuellement à l’étude à l’Assemblée. Retrouvez son discours retranscrit sur l’insoumission.
« Ponce Pilate, voyant que le tumulte augmentait, prit de l’eau, se lava les mains en présence de la foule, et dit : Je suis innocent […]. Cela vous regarde. »
On ne peut s’empêcher d’y voir une ressemblance avec l’allocution du Président de la République, qui est allé bénir les passants à Lourdes la semaine dernière après avoir donné des leçons de laïcité à la terre entière.
Tiens, donc : Emmanuel Macron, voyant que le variant Delta ne cessait de se propager, prit de l’eau, se lava les mains en direct à la télévision, et dit : « je suis innocent, tout est de la faute des personnes non-vaccinées. Cela les regarde ». Avant d’ajouter : « Vive la République, vive la France. ».
Le monarque s’imagine Jupiter, quand il n’est que Ponce Pilate. Comme lui, il s’en lave les mains.
Dans dix jours, les Français devront présenter un pass sanitaire à peu près partout et tout le temps, si bien que bientôt, vous aurez le choix entre deux doses de vaccin, un test PCR à 50 euros, ou 135 euros d’amende.
Ceux qui hésitent à se faire vacciner, qui sont méfiants, ceux dont la vaccination est incomplète seront donc assignés à résidence et priés de laisser les personnes vaccinées tranquillement entre elles. Mieux, certains d’entre eux pourront même être licenciés au bout de 2 mois.
Emmanuel Macron découpe la République en deux, rend la vie impossible à une catégorie de Français sur la base d’une donnée de santé… et s’en lave les mains.
La couverture vaccinale est la plus faible pour les plus précaires, les inégalités sociales de santé disloquent notre pays, à peine 37% de la jeunesse a reçu deux doses de vaccin… Oui, mais le Président s’en lave les mains.
L’Organisation mondiale de la santé nous dit qu’il faut convaincre, plutôt que contraindre. Mais le Président s’en lave les mains.
Le Président s’en lave les mains, il a tonné, l’intendance suivra. La réalité se pliera à ses mots, et surtout à ses contradictions.
Car oui, le Président parle et se renie, donne ordres et contre-ordres.
En décembre 2020, il affirmait : « La vaccination ne sera pas obligatoire », avant de la rendre, de fait, obligatoire. En avril 2021 : « Le pass sanitaire ne sera jamais un droit d’accès qui différencie les Français. » avant d’en faire un droit d’accès qui différencie les Français. Le Président ment, et fait mentir, au passage, ses plus fidèles. Par exemple, vous, M. Véran parliez d’une « opposition de principe » au pass sanitaire.
Avalez la couleuvre Ministre et bon appétit ! Le Président fait de vous des menteurs et il s’en lave les mains.
Emmanuel Macron a des illuminations le lundi matin, dans le huis-clos d’un conseil de défense, qu’il nous confie le soir à la télévision. Depuis 2017, c’est le fait du prince. Les Français tirés au sort pour suivre la politique de vaccination ont disparu, le Parlement est sans cesse piétiné, et Emmanuel 1er décrète, prolonge l’état d’urgence sanitaire, nous convoque même en session extraordinaire.
Sachez, collègues, que le fait de décider seul n’est pas étranger à l’absurdité d’une décision ou à sa brutalité. Comment ça ? Les cafés et les restaurants, qui sortent tout juste la tête de l’eau, devront tripatouiller nos papiers de santé, au risque d’une amende et en dépit de notre vie privée ? Quel est ce désordre que vous organisez ?
Absurde. Aussi absurde qu’imposer un pass sanitaire obligatoire pour prendre un TGV ou s’asseoir à une terrasse à moitié vide, et ne rien demander quand il s’agit de monter dans un RER bondé, ou de manger à la cantine de l’entreprise.
Incohérent comme imposer la vaccination obligatoire aux soignants, en les menaçant sans scrupules de « ne plus les payer », ET d’en dispenser les policiers. Mais non, me direz-vous, les policiers ne sont pas au contact de la population ! Quand un policier applique la technique du plaquage ventral, le citoyen a la tête contre le sol, ce qui limite la contamination par aérosol et empêche le virus de se diffuser.
À ce niveau d’Absurdie généralisée, on ne serait plus étonné de rien venant de vous.
Emmanuel Macron a du talent : il transforme tout ce qu’il touche en crise politique. Après nous avoir seriné pendant 5 ans sur la liberté d’entreprendre, le libéralisme gagnant, le nouveau monde et tralala, le voilà qui s’engouffre dans une fuite en avant autoritaire sans précédent. Bienvenue dans la société du contrôle permanent. Celle où vous triez les bons des mauvais citoyens. Cette société dans laquelle nos rapports sociaux sont profondément bouleversés, où l’on ne jure que par un QR code.
La vérité, collègues, c’est que depuis le début de l’épidémie, vous faites passer des mesures autoritaires pour des politiques sanitaires. Et avec vous, toute opposition est diabolisée ! Que l’on s’entende bien : nous sommes pour les vaccins. Mais pas de politique sanitaire sans confiance. Comment voulez-vous que les Français aient confiance quand vous leur avez si souvent menti, sur les stocks, sur les masques, sur la pénurie de moyens pour les soignants, sur le pass sanitaire lui-même ?
Emmanuel Macron pourra se prendre pour Pilate aussi longtemps qu’il voudra en se disant « innocent », il faudra bien, un jour, qu’il réponde de ses actes. C’est vous qui avez annoncé fin 2020 800 millions d’euros d’économies pour l’hôpital public. C’est vous qui avez poursuivi la fermeture de lits, même en pleine pandémie. C’est vous qui avez refusé à deux reprises de lever les brevets sur les vaccins.
Vous « aaaadorez » nous répondre que nous ne proposons rien. Au fond, vous aimeriez que ce soit le cas. Mais non, nous avons fait beaucoup de propositions de lois.
Alors, collègues, revenez à la raison. Cessez de fracturer le pays. Au fond, vous devez avoir l’intuition, comme nous, que ces mesures franchissent un seuil dans l’inacceptable. La liberté est ce que nous avons de plus précieux. Ne votez pas des mesures qui la défigurent durablement.
Mathilde Panot.