Mardi 17 mars 2020, 12h00 : début du confinement en France pour tenter d’endiguer la propagation du Coronavirus. Moment que beaucoup n’oublieront pas de sitôt. Nous entrons tous dans une période inconnue. Il est désormais interdit de sortir de chez soi. Seuls les trajets « nécessaires » sont autorisés : pour se soigner, faire ses courses, son footing, et donc, pour certaines et certains d’entre nous, pour aller travailler.
Il y a une profonde injustice dans cette période. Pendant que nous sommes confinés chez nous, d’autres continuent à se rendre sur leurs lieux de travail et à s’exposer au Covid-19.
On pense en premier lieu au personnel hospitalier et médical au front, bien sûr. Mais si nos regards et nos pensées vont naturellement à tous ces héros en blouses blanches, vertes et bleues, d’autres de nos concitoyennes et concitoyens continuent à travailler et sont particulièrement exposés.
Les caissières et caissiers des supermarchés d’abord, souvent sans masques ni protections, et directement au contact de centaines de clients potentiellement contaminés. Leur rôle est essentiel pour nous permettre de continuer à nous alimenter. Pourtant, où sont leurs protections ? L’agroalimentaire réalise des chiffres d’affaires records, profitant du vent de panique engendré par la crise sanitaire et l’annonce du confinement. Une partie de cette manne financière ne pourrait-elle pas être destinée à protéger son personnel conformément aux consignes du gouvernement ?
Les livreurs de restauration rapide ensuite : Deliveroo et autre Uber Eats sont, eux aussi, scandaleusement exposés au Coronavirus. Par le nombre de leurs déplacements et de personnes potentiellement porteuses du Covid-19 avec lesquelles ils sont en contact tous les jours. Rappel : ces « auto-entrepreneurs » n’ont aucune protection sociale en cas de problème de santé. Les plateformes ne devraient-elles pas prendre toutes les dispositions possibles pour arrêter de mettre en danger les livreurs ?
Le gouvernement doit établir une liste précise des secteurs essentiels à la Nation qui doivent poursuivre leur activité. Les autres secteurs doivent cesser si les conditions sanitaires ne sont pas réunies. Tous les travailleurs, à l'arrêt ou non, doivent être protégés.
— Manon Aubry (@ManonAubryFr) March 19, 2020
Le 14 mars, le ministre de la Santé a dressé par arrêté la liste des activités autorisées. Hier, la ministre du Travail s’est inquiétée du recours abusif, selon elle, au « chômage partiel ». Le ministre de l’Économie a, quant à lui, exhorté tous les salariés des entreprises qu’il a qualifiées d’ « essentielles », à se rendre au travail. Or il n’a jamais été indiqué dans un arrêté ce qu’est une activité « essentielle ». Une problématique évoquée par le député insoumis Alexis Corbière à l’Assemblée nationale ce matin lors des questions au gouvernement.
Dans certaines entreprises, par exemple dans l’industrie automobile, la mobilisation des syndicats a permis une mise à l’arrêt de l’activité. Autre exemple, en Seine-Saint-Denis, les éboueurs d’OTUS ont exercé hier leur droit de retrait car ils n’avaient ni masques, ni moyens de se laver les mains correctement.
Qui décide des activités « essentielles » ou non ? Cette question primordiale pour la santé de nombre de travailleurs et de travailleuses dans le pays, ne peut être tranchée uniquement par une poignée de membres du gouvernement. La communauté scientifique, les groupes politiques, et surtout les salariés doivent être associés.
Nous entrons dans une période comportant son lot d’angoisses et de bouleversements pour chacun et chacune d’entre nous. Oui, rester enfermé, confiné, ça n’est facile pour personne. Mais n’oublions pas que dehors, certains et certaines d’entre nous continuent a être exposés, tous les jours, au Covid-19. Loin de l’esprit individualiste néolibéral prônant la compétition et la concurrence de chacun contre tous, l’heure est plus que jamais à la solidarité et à l’attention à porter à chacun et chacune d’entre nous.
Par Pierre Joigneaux.