Les retraités sacrifiés par Macron et Bayrou au profit des ultra-riches

Le 17 avril 2023, Emmanuel Macron avertissait gravement : la dernière réforme des retraites était nécessaire et indispensable compte tenu de l’accroissement de l’espérance de vie et de l’augmentation du nombre de retraités. Ne pas la faire, disait-il, c’était devoir envisager la baisse des pensions. Jamais avare d’absurdités, l’ex-ministre du Travail Olivier Dussopt avait à […]

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Le 17 avril 2023, Emmanuel Macron avertissait gravement : la dernière réforme des retraites était nécessaire et indispensable compte tenu de l’accroissement de l’espérance de vie et de l’augmentation du nombre de retraités. Ne pas la faire, disait-il, c’était devoir envisager la baisse des pensions. Jamais avare d’absurdités, l’ex-ministre du Travail Olivier Dussopt avait à la même période affirmé, sur des bases mystérieuses, que l’absence de réforme ferait baisser de 20% les pensions de tous les retraités !

Nonobstant le fait que l’espérance de vie en bonne santé stagne, ou que le coût annuel d’une non réforme des retraites est de 20 milliards, soit moins que le coût annuel de la niche fiscale qu’est devenue le CICE, cet argument de la « sauvegarde des pensions » est omniprésent depuis des années. Par exemple, déjà dans un discours de 2010 le 15 octobre, Nicolas Sarkozy affirmait avec son audace coutumière que sa réforme des retraites répondait à un impératif de « justice sociale », préoccupé pour les petits retraités. « Que deviendraient-ils si demain il n’y avait pas l’argent pour payer les retraites ? Que deviendrions-nous dans ce cas-là ? », s’angoissait notre ancien président et actuel condamné.

Ainsi, les français se voient régulièrement imposer une sorte de « deal » par leurs chefs d’État successifs, Sarkozy, Hollande, Macron. On peut le résumer comme suit : « tout en feignant de faire comme si nous n’avions pas d’argent pour financer vos retraites, nous allons réduire vos droits, mais en échange, nous ne toucherons pas à vos pensions ». Hélas, cette promesse s’avère aussi mensongère que le constat initial. Et c’est le gouvernement qui nous le prouve, lui qui se prépare à supprimer l’abattement fiscal des retraités, comme l’ont avoué les ministres de Bayrou Amélie de Montchalin le 19 avril au Parisien, et Marc Ferracci le 15 sur France Inter.

Cet abattement, il faut le replacer dans son contexte tant beaucoup de médias en parlent mal et semblent s’être contentés de reprendre les éléments de langage du MEDEF (à tel point que la Médiatrice des antennes Radio France, Emmanuelle Daviet, a dû se fendre d’un communiqué inquiet le 24 avril). Il ne s’agit nullement, contrairement à ce que l’on entend ici et là, d’un abattement au profit des retraités motivés par une déduction de frais professionnels. En effet, ce serait parfaitement absurde, et dès lors qu’une explication semble absurde, le journaliste sérieux serait fondé à la questionner au lieu de l’écrire telle quelle. Notre article.

La paresse journalistique au service de la communication gouvernementale

Cet abattement a été instauré par le gouvernement dirigé par Raymond Barre en 1978, pour pondérer et adoucir la fiscalité des retraités. Deux arguments principaux guidèrent alors l’action publique. Le premier, c’est que contrairement aux revenus d’activité, les retraites étant déclarées par les caisses, le risque de sous-estimation était nul et la puissance publique ne pouvait donc pas ignorer une partie de la masse fiscalisable à percevoir.

Le second, qui est à l’origine de la confusion, c’est que, effectivement, il avait été également prévu un abattement de 10 % pour les travailleurs ayant à déclarer des frais professionnels, mais sans que cela ait motivé l’abattement au profit des retraités ou que les deux choses soient liées !

Et pourtant, déjà le 9 janvier, face à une Apolline de Malherbe dont la pugnacité est décidément très variable, Patrick Martin, le président du Medef pouvait déjà tempêter : « il est aberrant (…) qu’un retraité bénéficie d’une exonération fiscale pour des frais professionnels ! ».

Mais alors pourquoi cette volonté du gouvernement et du patronat de pratiquer, en brandissant un prétexte grotesque, ce qui n’est rien d’autre qu’une hausse d’impôts indifférenciée sur tous les retraités ? Sans doute parce qu’il ne s’agirait pas de pratiquer des hausses d’impôts… différenciées !

Car si Marc Ferracci, déjà cité, osait le dire le 15 avril : « à partir du moment où l’on dit que les efforts sont partagés, on ne peut pas exclure, par principe, une catégorie de la population », il y a pourtant des catégories de la population qui, décidément, sont exclues par principe. Les riches, les possesseurs et dirigeants d’entreprises, pour commencer.

Puisqu’il le faut bien, rappelons, encore, les chiffres. Les aides aux entreprises représentent des centaines de milliards, 203 milliards en 2023, par exemple, soit plus de 7 % du PIB. Pour la plupart, ces aides sont parfaitement inconditionnelles et sont versées quels que soient les moyens ou les comportements économiques de leurs bénéficiaires. Et ce, même quand aucun bénéfice n’a jamais pu être dégagé en termes d’innovation, de créations d’emplois ou de redistribution aux salariés, comme c’est le cas pour le crédit impôt recherche, le CICE, etc.

Pour aller plus loin : Bardella a avoué : le RN va s’aligner sur la retraite à 64 ans de Macron

Ces milliardaires engraissés par l’effort commun, mais dispensés d’en fournir

Répétons encore que la richesse des milliardaires a augmenté de plus de 24 milliards d’euros au total, soit 13 millions d’euros par jour répartis entre 52 personnes. C’est-à-dire que le seul accroissement annuel de la richesse de ce petit groupe de personnes représente davantage que le coût annuel allégué par le gouvernement d’une non réforme des retraites.

Même si ce n’est rien à côté des profits colossaux que ce même petit groupe a engrangé pendant la crise sanitaire. Comme le faisait remarquer très justement Oxfam dans son étude de janvier 2022, avec les 236 milliards d’euros supplémentaires engrangés en 19 mois par les milliardaires français à l’époque, on aurait pu quadrupler le budget de l’hôpital public !

En revanche, l’annexe du projet de loi de finance 2025 nous apprend que la suppression de l’abattement fiscal envisagée par le gouvernement va frapper 14,96 millions de ménages, cependant que la Fédération des associations de retraités et l’UNSA-Retraités estiment qu’elle rendra imposable un demi-million de retraités (gagnant actuellement trop peu pour l’être. Il est certain qu’une telle mesure aggraverait les difficultés financières de beaucoup de retraités au seuil d’imposition ; reste à savoir combien elle rapporterait. C’est peut-être cela le plus absurde, la Cour des comptes évalue le bénéfice à 5 milliards d’euros, au mieux.

Quand les retraités paient pour les niches fiscales du patronat

On a envie de hurler quand on sait que le seul Crédit Impôt Recherche coûte 7,7 milliards d’euros par an, n’a jamais été utilisé pour aucune recherche connue par les entreprises bénéficiaires, et est religieusement renouvelé chaque année par les zélotes du capitalisme dirigé qui siègent à l’Assemblée. Comme d’habitude, il est saisissant de constater l’existence d’un ruissellement inversé qui ne se cache même pas, où, comme dans une caricature d’Ancien Régime, on prend à la majorité pour financer les prébendes de quelques-uns.

Et pourtant l’idée fait son chemin. Et on trouve même des médias qui osent, comme Le Parisien, sortir des articles titrés « Suppression de l’abattement fiscal des retraités : le gouvernement veut lever le tabou ».

Or, s’il y a bien une chose que le gouvernement ne s’est jamais interdit, c’est de ponctionner les masses, retraitées ou pas. À l’inverse, la seule prohibition qui vaille dans la religion fiscale de nos dirigeants, c’est bien de ne surtout pas contrarier les riches et les patrons.

Ce qui demeurera de cette affaire, en tout cas, c’est que si le gouvernement réussit à faire passer cette énième attaque contre les droits sociaux, on devra en garder trace, car plus question d’entendre des ministres venir parler de sauvegarder le niveau des pensions.

Comme d’habitude dans la guerre contre nos retraites, Macron et ses amis prennent ce qu’ils peuvent, quand ils peuvent, sans aucun scrupule. Parfois, ce sera un recul de l’âge de départ, parfois ce sera une augmentation du nombre de trimestres et, parfois aussi, quand ils croiront tenir de bons éléments de communication médiatique, ce seront les pensions qui vont y passer.

Avec toujours le même objectif : protéger et financer les cadeaux fiscaux faits à l’extrême minorité fortunée pour laquelle l’Élysée et Matignon sont mobilisés à temps plein.

Par N.B.

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