Équateur. Après des élections anticipées en 2023, les Équatoriens ont à nouveau été appelés aux urnes. La candidate de la gauche de rupture, l’avocate Luisa González, a réalisé le score remarquable de 43,9 % lors du premier tour. Elle est devancée de peu par le très libéral président sortant Daniel Noboa (44,6 %), héritier d’un empire financier reposant sur la production de bananes. Un second tour incertain se tiendra ce dimanche 13 avril.
Hier, Jean-Luc Mélenchon a lancé l’alerte quant à la « fraude électorale généralisée » et les menaces contre la candidature présidentielle de gauche. « Les trumpistes locaux et les cartels de la drogue sont en action. Il nous est demandé à tous de communiquer pour protéger les équatoriens de cette violence. Passez à l’action, ne regardez pas ailleurs quand on nous appelle à l’aide ! » a écrit le leader insoumis. Notre article.
L’Équateur, berceau de la révolution citoyenne et victime du lawfare
Ce n’est pas la première fois qu’une gauche combative est en situation de l’emporter en Équateur. C’est en effet dans ce pays d’Amérique du Sud qu’est né le concept de révolution citoyenne, qui a donné son nom au « Movimiento Revolución Ciudadana » dont le leader Rafael Correa est un allié proche du mouvement insoumis et de son leader, Jean-Luc Mélenchon. Rafael Correa a été président de l’Équateur de 2007 à 2017, période durant laquelle les politiques sociales mises en œuvre par le gouvernement équatorien avaient permis de sortir plus de 900 000 personnes de la pauvreté.
Seulement, Rafael Correa a comme les insoumis aussi été victime de « lawfare », cette pratique qui consiste en une instrumentalisation politique de la justice mobilisée partout dans le monde pour faire taire les responsables de gauche radicale en situation de prendre le pouvoir. Il s’agit par ailleurs d’un phénomène dénoncé de longue date par les insoumis et d’autres personnalités à l’international, comme le rappelait Jean-Luc Mélenchon dans son dernier point politique.
Toujours est-il que Rafael Correa a dû s’exiler en Belgique pour éviter les 108 affaires judiciaires qui lui sont intentées. Depuis le retour de la droite au pouvoir en Équateur, la violence n’a cessé d’augmenter : on comptait en moyenne 6 homicides pour 100 000 habitants lorsque Rafael Correa a quitté le pouvoir en 2017, ce chiffre battait un record en 2023 de 47 homicides pour 100 000 habitants.
Face au président sortant ultra-libéral, Luisa González mène une campagne de combat pour ramener la gauche de rupture au pouvoir
La candidate de 47 ans Luisa González est, elle aussi, victime d’intimidations et de menaces de mort, mais elle a décidé de faire campagne sous le signe de l’espoir. La candidate de la gauche a insisté dans ses nombreuses interventions sur la nécessité d’œuvrer à nouveau pour la justice sociale en Équateur, tout en luttant contre la criminalité organisée. Face à elle, le président sortant, Daniel Noboa vient d’une famille traditionnelle et milliardaire profondément liée au pouvoir.
Ce que n’a pas manqué de lui faire remarquer Luisa González durant le débat de l’entre-deux-tours, lui rappelant les affaires de corruption qui touchent à la fois son parti et l’entreprise de sa famille. Non seulement libéral, mais aussi autoritaire, durant ses deux ans de mandat, Daniel Noboa a souvent eu recours à des imaginaires sécuritaires, déclarant par exemple en 2024 que le pays se trouvait « en état de guerre ». Au contraire, Luisa González a souvent recours au mot d’ordre « Luisa pour la vie », semblable à celui du président colombien Gustavo Petro qui appelait à une « paix totale » lors de sa campagne dans le pays voisin.
Un second tour serré se tiendra dimanche
La campagne officielle a pris fin ce jeudi, et le second tour de l’élection se tiendra dimanche. Il sera particulièrement scruté, puisqu’un candidat avait été assassiné durant la dernière élection en 2023, compliquant fortement la fin de la campagne.

Si le premier tour s’est cette fois-ci déroulée sans heurt majeur, le retour de la gauche au pouvoir pourrait provoquer des résistances, d’autant que les dernières projections laissent supposer un résultat particulièrement serré. Hier, Jean-Luc Mélenchon a lancé l’alerte sur la « fraude électorale généralisée » et les menaces contre la candidature de Luis Gonzalez, soulignant que « les trumpistes locaux et les cartels locaux sont en action ».
Une victoire de la gauche de rupture inquiète ces derniers en ce qu’elle amènerait l’Équateur aux côtés du Mexique et de la Colombie dans une situation de résistance au capitalisme destructeur et à l’impérialisme trumpiste.
Par Mathieu Rateau
Crédits photo : « CONTINUACIÓN DE LA SESIÓN DEL PLENO 776 DE LA ASAMBLEA NACIONAL. ECUADOR, 19 DE JULIO DE 2022 », Ecuador, 19 de Julio de 2022.- Informe para segundo debate del Proyecto de Ley Orgánica de Carrera Sanitaria. Interviene Asambleísta Luisa Gonzalez Foto Joselito Bolaños / Asamblea Naciona, ASAMBLEA NACIONAL. ECUADOR, CC BY-SA 2.0, pas de modifications apportées.