Autriche. Les négociations entre l’extrême droite du FPÖ et les conservateurs de l’ÖVP en vue de la formation d’un gouvernement mené pour la première fois par l’extrême droite en Autriche, ont échoué. La politique internationale ainsi que la répartition des postes gouvernementaux apparaissent comme au cœur des dissensions entre les deux partis. Alors que les négociations entre les conservateurs, les libéraux et les socialistes pourraient reprendre, de nouvelles élections où l’extrême droite pourrait triompher sont également possibles. Autriche, un sursis ? Notre article.
Autriche : échec des négociations entre l’extrême droite et la droite pour la formation d’un gouvernement
Soulagement ou plutôt « Erleichterung » : les négociations entre l’extrême droite du FPÖ et la droite de l’ÖVP viennent d’échouer, annonçait en début de semaine le candidat à la chancellerie et meneur du FPÖ, Herbert Kickl.
Il y a quelques semaines, des pourparlers entre les deux forces politiques pour la formation d’un gouvernement mené par l’extrême droite se sont tenus, une première en dans le pays. Or, des différends sur la répartition des postes gouvernementaux, mais également sur la politique internationale ont mis fin à ce processus.
Un soulagement, notamment pour les dizaines de milliers de manifestants qui se sont mobilisés contre la formation de ce gouvernement. Un sentiment d’autant plus grand aux vues des positions xénophobes, racistes, complotistes, voire révisionnistes d’Herbert Kickl, pressenti jusqu’ici pour prendre la tête du pays.
Pour aller plus loin : « Il ne faut pas juger la Waffen SS comme un collectif… » – En Autriche, le chef de l’extrême droite et allié de Bardella aux portes du pouvoir
Les pommes de discordes des ministères de l’Intérieur, des Finances et de la politique internationale
Déjà, il y a quelques semaines, la politique internationale était l’un des sujets cruciaux qui pouvaient mettre en péril l’alliance entre le FPÖ, vainqueur des élections législatives de 2024, et l’ÖVP, aux affaires depuis longtemps en Autriche. En effet, le FPÖ s’aligne très aisément sur les positions du voisin Hongrois, Viktor Orban : opposition aux normes européennes (surtout celles consacrées aux droits des réfugiés et des minorités), mais également sur une certaine russophilie. C’est d’ailleurs un scandale relatif à l’influence russe au FPÖ qui avait fait exploser la dernière alliance entre les deux partis en 2019.
Bis repetita ? Peut-être, en tout cas les conservateurs, pro-européens de l’ÖVP respectèrent les lignes rouges qu’ils avaient annoncés en préambule des négociations. Certains en France devraient peut-être s’en inspirer…
Mais il faut aussi souligner le cynisme des conservateurs, car ce sont avant tout la répartition des postes gouvernementaux qui semblent être au cœur du divorce. Les valeurs peut-être, les négociations avec l’extrême droite, certainement.
Kickl s’est avéré particulièrement affamé, ce dernier souhaitant non seulement la chancellerie, mais également les ministères de l’intérieur et les finances pour son parti. Ce qui aurait donné les différentes clefs à l’extrême droite pour mettre en place son agenda : contrôle sur la police, les visas, l’asile, les médias et les services secrets…
Aujourd’hui, les deux mouvements s’accusent mutuellement de l’échec des négociations comme dans un mélodrame qui verrait s’écharper Retailleau et Marine Le Pen. Risible.
Et ensuite ?
Herbert Kickl a donc rendu son mandat de formation gouvernementale (Regirungsauftrag) au président Alexander Van der Bellen, issu des verts, en début semaine.
Deux scénarii s’ouvrent alors : une reprise des négociations entre l’ÖVP avec les socialistes SPÖ et les libéraux de NEOS, qui sont prêts à une réouverture de pourparlers après un premier échec, voire une discussion avec les verts ; ou alors un retour aux urnes…
De nouvelles élections qui s’avéreraient particulièrement périlleuses. En effet, le FPÖ qui arrivait en tête aux dernières élections l’an dernier avec près de 29 %, caracole à présent à près de 35 % dans les sondages. Un retour aux urnes risquerait donc de voir l’émergence d’un FPÖ plus puissant que jamais et pouvant plus aisément imposer un rapport de force aux conservateurs, qu’ils ne devançaient que de quelques sièges dans le Parlement actuel. Elections évidemment souhaitées par Kickl.
L’extrême droite ne sera donc pas aux commandes en Autriche, en tout cas pour l’instant, mais Herbert Kickl et le FPÖ n’ont peut-être qu’à attendre que le fruit tombe de lui-même. Alors qu’un gouvernement provisoire « d’experts » pourrait être mis en place en attendant la suite des événements.