Charlie Hebdo
Une bougie avec l'inscription "vous ne tuerez pas notre liberté" a été déposée devant le bataclan - Paris, 14 novembre 2015.

7 ans après les attentats de Charlie Hebdo : ni oubli, ni pardon

Charlie Hebdo. C’était le 7 janvier 2015. Notre sang s’est soudainement glacé. Sept ans jour pour jour après le massacre, la mémoire est toujours vive alors que s’est ouvert ce mercredi 2 septembre 2020 le procès « Charlie Hebdo ». L’insoumission a choisi de vous faire redécouvrir un vibrant hommage de Jean-Luc Mélenchon à Stéphane Charbonnier, dit « Charb », dessinateur de Charlie Hebdo, assassiné pour la liberté qu’il incarnait. Ni oubli, ni pardon.

« Charb tisonnait si bien pour nous la braise rouge, contre la cendre des convenances boursouflées et des certitudes aveuglées »

16 janvier 2015. Cimetière de Pontoise. Les visages sont fermés. Jean-Luc Mélenchon monte à la tribune. Une grande photo du dessinateur y est installé, son visage est encore celui d’un enfant. « La mort est passée. Elle rôde encore autour de nous. Et nous sentons son souffle froid. Nous voici rassemblés sur le rivage glacé que tracent les bords de ce cercueil. Tremblants de peine et sidérés. Nous sommes venus nous réchauffer une fois de plus auprès de lui. Car Charb tisonnait si bien pour nous la braise rouge, contre la cendre des convenances boursouflées des certitudes aveuglées. » Le député européen commence son hommage, d’une voix tremblante. Les larmes sont ravalées.

Puis, d’un coup, la voix s’élève, tonitruante, et emplit la salle : « Charb, tu as été assassiné comme tu le pressentais par nos plus anciens, nos plus cruels, nos plus constants, nos plus bornés ennemis : les fanatiques religieux, crétins sanglants, qui vocifèrent de tout temps : « à bas l’intelligence, vive la mort ». Charb, ils n’auront jamais le dernier mot, tant qu’il s’en trouvera pour continuer notre inépuisable rébellion. » Il s’en est trouvé. Dès les 10 et 11 janvier, 4 millions de personnes à travers les rues de France, pour continuer l’inépuisable rébellion, le crayon entre les dents, la liberté de conscience et d’expression chevillés au cœur.

Charlie Hebdo, un procès historique

Quatorze accusés comparaissent au tribunal de Paris, devant une coure d’assises spéciale, depuis septembre. Sur les quatorze personnes accusés, onze seulement sont présentes porte de Clichy. Les trois autres accusés, la compagne d’Amedy Coulibaly et les frères Belhoucine, sont présumés morts ou en cavale sur le front syrien. Ils sont tous accusés d’avoir, à des degrés divers, fourni une aide logistique aux frères Chérif et Saïd Kouachi ainsi qu’à Amedy Coulibaly. En janvier 2015, les deux premiers avaient mené l’attaque contre la rédaction du journal satirique Charlie Hebdo, faisant 12 morts, le second avait tué une policière et quatre clients d’un supermarché casher.

« Voici qu’avec ton assassinat et celui des membres de ta rédaction, le crayon a dessiné et la caricature sont devenus une force immense, capable de jeter un pays dans la rue, et de mettre le monde à la fenêtre pour voir la splendeur citoyenne française (…). Je dis : ici gît l’un des quatre premiers dessinateurs de l’Histoire, mort pour ce que ses dessins dérangeaient. Je dis : ici gît une somme d’éclats de rires révolutionnaires. Ici commence de nouveau un monde possible : à jamais promis celui de la splendeur de l’émancipation, de l’esprit libre, de la fraternité humaine. Le soleil brillera toujours. Adieu camarade. Merci camarade. » Ni oubli, ni pardon, ni vengeance. Que justice soit rendue face à la haine et l’obscurantisme. Que ce procès nous aide à comprendre, aussi. Pour que la liberté d’expression l’emporte. Et pour que, plus jamais, nous ne revivions un 7 janvier 2015.

Par Pierre Joigneaux.